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Vous êtes ici : Quarante-Deux Archives stellaires Gérard Klein : à l'auteur inconnu 10

Gérard Klein

À l'auteur inconnu 10

Première parution : NLM 21, février 1992

Fouiller son âme, quoi de plus mortellement ennuyeux. Mais échanger pour de bon des signaux avec Mars, voilà une tâche digne d'un poète lyrique.

"De l'interlocuteur" (1913)
Ossip Mandelstam
In : De la poésie

Ce que je crains, c'est qu'il n'y ait plus d'avenirs en français. Plus jamais. Au moins provisoirement. Peut-être est-ce d'avoir échoué dans mon propos de publier une anthologie française composée de textes originaux, projet qui tirait sa vraisemblance des quatre volumes publiés au Livre de Poche [1]. Cependant, malgré les efforts d'Ellen Herzfeld et de Dominique Martel et de l'extension des délais, sur soixante-dix nouvelles reçues, il n'y en eu qu'une demi-douzaine de publiables relevant au demeurant plutôt d'un bon niveau amateur que du travail de professionnels.

Elles totalisaient environ trois cent mille signes, ce qui correspondait à moins de la moitié du total souhaité. Sans doute, l'échec d'Utopies 85 et le défaut d'une revue ont-ils pesé sur le destin de cette expérience de laquelle se sont abstenus nombre d'auteurs consacrés. J'en suis, je l'avoue, pas vous ?

Mais il y a une difficulté plus profonde qui se manifeste aussi et davantage dans les manuscrits que je reçois pour "Ailleurs et demain", plus d'une cinquantaine par an et parmi lesquels, depuis six ans, j'estime n'avoir rien lu qui corresponde vraiment aux lecteurs que je représente. J'extrais de ce lot un tout petit nombre d'œuvres intéressantes qui, pour une raison ou pour une autre, ne me convenaient pas, ou étaient trop brèves ou encore me semblaient trop conventionnelles pour ma collection, et qui ont souvent trouvé ailleurs un éditeur, parfois du reste après avoir bénéficié de mes conseils.

Ce sont des autres textes que je voudrais dire un mot. Il serait intéressant de les répartir en catégories statistiques. N'ayant pas fait ce travail au fil des années, je ne puis raisonner ici que sur des souvenirs et que sur une quinzaine de fiches de lectures, les dernières établies.

Le plus grand nombre de manuscrits se situent dans des avenirs éloignés ou indéterminés et relève du roman d'aventures spatiales ou planétaires. Malheureusement, ils sont écrits par des auteurs qui ont pour seule référence la SF elle-même et pas toujours la meilleure, ou encore qui donnent l'impression de chercher d'abord à écrire des scénarios pour la cinquième chaîne. Dans ces histoires de pirates, d'aventuriers, d'arches stellaires, d'empires galactiques et d'exploration de mondes superficiellement élaborés, la reproduction servile de la SF américaine des années cinquante et du cinéma de même eau des années soixante-dix à nos jours est évidente.

Une seconde catégorie, moins abondante, évoque l'avenir proche et feint de soulever des problèmes politiques ou écologiques. Plus intéressante dans son principe, elle pêche infortunément, outre des problèmes d'écriture, par le défaut de documentation et de réflexion. Le sida, le chômage, la pollution, la corruption sont des thèmes respectables, mais ils ne peuvent pas l'être au seul niveau de l'information superficielle, pour ne pas dire publicitaire, que convoient les magazines.

Une troisième classe relève de l'Heroic Fantasy, plus ou moins dissimulée derrière un contexte science-fictionnel qui l'apparente parfois à la première catégorie.

Je passerai vite sur une catégorie inchoative qui a trouvé ailleurs sa limite et dont je ne subis du reste que des quantités homéopathiques.

Enfin, un dernier sous-ensemble dont je m'étonne toujours de recevoir des éléments réunit des textes qui se réclament explicitement du Fantastique, généralement dans une forme poético-archaïque et souvent issus de plumes féminines. Il arrive que ces auteurs, peu sûrs de leur fait, me demandent de les excuser de les avoir envoyés. Ils ont raison sur ce seul point et ils pourraient s'en dispenser. Il y a maintenant d'autres collections pour les accueillir dont "Présence de fantastique" chez Denoël.

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En bref et au total, il y a comme un problème d'orientation.

Il doit être tout à fait clair que chacun est libre d'écrire ce qui lui plaît comme chaque éditeur l'est de publier ce qui l'intéresse. Mais de mon expérience se dégage l'impression d'un mélange croissant de la représentation des différents genres. Or, ces genres ont des histoires distinctes et des structures relativement objectivables, encore que toute structure soit faite pour être subvertie ou transgressée [2]. Je voudrais d'autant plus tenter de dissiper cette confusion qu'elle m'a semblé récemment entretenue par certains de mes estimés confrères. J'entends bien que des genres ou des tendances différentes peuvent s'entrecroiser et s'interféconder. À un certain niveau de talent et d'expérience, ce peut-être l'apport d'un auteur de transgresser les frontières et de brouiller les pistes. Encore faut-il savoir d'où l'on part et où l'on va, et ne pas tenter le mariage infertile de la carpe et du lapin. Et de toute façon, ce n'est pas recommandé au débutant.

J'entrerai donc dans la polémique et, dans un souci pédagogique, dirai ce qui me semble radicalement distinguer SF, Fantasy et (nouveau) Fantastique en ne reculant pas, le cas échéant devant les jugements de valeur [3].

Je m'en vais rompre quelques lances, bien que, comme on le verra tout de suite, l'expression soit judicieusement mal choisie relativement à ma position, à propos de l'espèce de douteuse promiscuité que certains choisissent de cultiver entre la SF et d'autres genres, opportunistes comme il en est de certains miasmes. J'ai nommé l'Heroic Fantasy, la Sword and Sorcery et autres pestilences qui ne se sont heureusement jamais trouvé de véritable nom dans notre belle langue [4].

Bien qu'elle soit ancienne et anglo-saxonne, l'idée d'un cousinage entre la SF et ces genres ne me semble fondée sur rien sinon la vague évocation d'un imaginaire qui pourrait aussi bien englober le Western ou le Péplum, ou sur un simple souci de marketing. Je voudrais ici relever quelques points essentiels de différence et les raisons pour lesquelles à mes yeux les différentes variétés de Fantasy ne valent pas tripette.

Un premier point sur lequel j'ai déjà eu l'occasion d'insister, c'est que la SF nécessite un minimum de culture ou de curiosité scientifique, philosophique ou parfois historique. Par culture scientifique, je n'entends pas un savoir hautement spécialisé mais, disons, une idée à peu près juste de la représentation de l'univers qui est celle des chercheurs et donc une ouverture sur une expérience collective et concrète encore que complexe et contradictoire [5]. Il est vrai que la SF demande parfois, voire la plupart du temps, une certaine culture spécialisée et peut paraître par là difficile d'accès à ceux qui en sont dépourvus : il n'est pas surhumain de se la constituer et d'en attraper de surcroît une touche d'épistémologie.

Ce qui n'est ni le cas de la Fantasy, ni du Fantastique. Même si des œuvres anciennes et marquantes comme le Monde des Ā ou les Plus qu'humains ne semblent pas emprunter directement grand-chose à la science, elles font appel la première à des considérations épistémologiques dignes d'intérêt et la seconde au concept de Gestalt qui a une antériorité en philosophie et en psychologie. Au lieu de quoi, la Fantasy continue de véhiculer aujourd'hui des inepties pas même poétiques sur la Terre plate ou creuse, les continents engloutis de Mu et de l'Atlantique, les fées, les gnomes, les sorciers, les dragons. C'est même là sa première propriété, d'être écrite puis lue par des gens qui n'ont pas eu le besoin, voire peut-être hélas l'occasion, d'acquérir la moindre bribe de savoir : une littérature faite par des ignorants pour des ignorants et dont le niveau problématique est nul.

La lecture de cent œuvres de Fantasy n'apportera aucune forme de culture, même littérairement ultra-spécialisée, parce qu'elles font à peu près toutes dans la répétition. Elles sont superposables. Il est remarquable de constater que les comptes rendus qui en sont donnés dans Locus, par exemple, sont à peu près identiques et qu'il suffit de changer les noms pour transférer les résumés d'un ouvrage à l'autre. À s'interroger sur la pulsion qui conduit des lecteurs à relire la même histoire sans se lasser, on peut imaginer que leur capacité mémorielle est si faible que, comme une machine de Türing devenue folle, ils parcourent sans cesse la même boucle sans s'en apercevoir. Il est d'autant plus difficile d'apercevoir un mouvement, l'embryon de l'histoire d'un genre dans la Fantasy, que l'objectif que se fixent ses auteurs est de reproduire à l'identique les succès de leurs plus illustres prédécesseurs. Il me semble clair que la SF est elle en perpétuel mouvement et que si elle a ses classiques, ils servent de référence dans une évolution, une histoire.

La raison pour laquelle la Fantasy se borne d'horizons indépassables tient à ce que les œuvres fondatrices se trouvent dans le passé et qu'il s'agit uniquement de les retrouver, de les prolonger, de les évoquer comme on ferait d'un revenant. Tout le propos consiste à s'approprier un petit morceau de territoire peuplé d'elfes et de hobbits ou encore de guerriers, de puissances maléfiques, de princesses et de trésors et à le faire fructifier. Personne, dans ce domaine, ne prétend faire mieux que J.R.R. Tolkien. L'idée même que ce soit concevable est sacrilège. Dans la Fantasy, on suce les os du Père sans avoir pris la peine de le tuer. Le problème est que Tolkien était un écrivain et un linguiste, ce qui confère au texte anglais un raffinement que rend du reste assez mal la version française. Tolkien a inventé une œuvre et défini un genre tandis que ses épigones ne font que les décliner sur un mode mineur [6].

La même mésaventure, on le sait, est arrivé à Lovecraft et dans une certaine mesure à Robert Howard, bien que dans son cas le défaut de talent littéraire l'ait condamné à être le premier de ses copistes. Dans le cas de Lovecraft, le détournement est aggravé comme l'ont montré Joseph Altairac et Michel Meurger par un déroutement idéologique. D'un univers fondamentalement matérialiste, les épigones et plus encore certains des commentateurs ont tiré des développements surnaturalistes, incitant à la superstition et à l'archaïsme. En somme, ces terroristes de l'imprimé, non contents de détourner l'avion, en ont fait une galère.

Une littérature qui se donne pour objectif de reproduire l'atmosphère du Maître est d'emblée académique. Je suis désolé de voir Michael Moorcock, écrivain britannique que j'estime et dont j'ai publié un remarquable roman fantastique, le Chien de guerre [7], dilapider son talent dans la répétition sempiternelle de scènes de batailles lavées de tout sens épique par leur automatisme même. L'héroïque fantaisie — traduisons, le ridicule n'en sera que plus net ! —, c'est le whisky sans alcool, le roman historique sans l'Histoire, la mythologie sans mythes, l'épopée sans noblesse, bref, un fantôme qui n'a jamais vécu. Le problème n'est pas qu'il s'agisse d'aventures imaginaires ; il est qu'il s'agit d'aventures sans imagination, composées selon de recettes éculées.

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Bien que par les temps qui courent cela puisse paraître démodé, il est intéressant de soumettre les trois genres à une problématique politique.

La SF a pour ainsi dire toujours une dimension révolutionnaire même lorsqu'elle est de contenu explicitement conservateur voire réactionnaire par exemple chez Robert Heinlein ou Ayn Rand. C'est qu'elle s'intéresse, pour la glorifier ou pour la déplorer, à la chose qui change du fait du savoir dans la société. Elle ne peut pas s'en empêcher. Peut-être peut-on exclure de cette dimension problématique la SF militariste ou survivaliste américaine qui est en passe de constituer un sous-genre à part, à dire vrai très proche de l'héroïque fantaisie, mais je le connais trop mal pour en décider.

Je crois par ailleurs nécessaire d'insister, parce qu'il est souvent négligé, voire dénié, sur le caractère anti-prophétique de la SF. Elle détruit la veine prophétique, c'est-à-dire l'affirmation d'un savoir privilégié sur le futur, de source théologique ou parascientifique par sa profusion même. Lorsque la SF aborde explicitement le thème du prophète, comme Frank Herbert dans Dune et ses suites, c'est précisément pour montrer qu'il constitue une aberration et un danger, à commencer pour le prophète lui-même. On trouverait d'autres exemples d'anti-prophétisme explicite dans l'Année du soleil calme de Wilson Tucker, le Maître du hasard de Robert Silverberg [8] et le Livre des révélations de Rob Swigart. Cet anti-prophétisme implicite ou militant explique sans doute en partie les résistances voire l'opposition forcenée à la SF de certains milieux supposés détenir la clé de l'avenir, ainsi les défenseurs de la vulgate marxiste dans les années cinquante et nombre de scientifiques obtus naguère et aujourd'hui qui voient plus ou moins consciemment dans la Science-Fiction l'instrument du dévoiement de toutes choses y compris du futur. Certains d'entre eux ont assimilé explicitement les auteurs de SF à des sortes de braconniers illégitimes chassant sur leurs terres et s'y livrant en somme à une concurrence déloyale parce que dépourvue des nécessités et des difficultés de la validation, comme si pour eux, le terrain de la SF était le même que celui de la science. Les opposants purement littéraires, eux, n'ont du moins pas cette attitude : il y a belle lurette qu'ils ont renoncé à occuper quelque terrain que ce soit, et surtout l'avenir.

L'héroïque fantaisie, ce n'est même pas la réaction. C'est tout bonnement la régression. C'est précisément ce point où il n'y a même plus chez le sujet politique qui rejette son présent et son environnement, de possibilité à vouloir retourner en arrière, à s'affirmer réactionnaire, parce qu'il n'a plus aucun point de repère ni avant, ni après. L'HF est symptôme de l'absence du sujet sachant. Ce qui ne nous rassure ni ne nous rajeunit pas. Cette assertion est soutenue par l'exemple du roman de Norman Spinrad, Rêve de fer, que certains lecteurs, j'en porte témoignage, ont pris au premier degré, c'est-à-dire à son second degré selon le projet explicite de son auteur, comme une apologie complaisante de la force excluante. Et Francis Berthelot, homme exquis et paisible, serait sans doute surpris de l'usage fantasmatique que d'aucuns ont fait de certaines de ses productions.

Certains contradicteurs érudits pourraient m'opposer, à propos du féerisme, la tradition légitime du conte de fées, célébrée comme nécessaire au développement du psychisme de l'enfant par Bruno Bettelheim dans sa célèbre Psychanalyse des contes de fées, ou encore le fameux livre de Joseph Campbell, le Héros aux mille visages, que l'on dit avoir inspiré George Lucas ou Steven Spielberg, ou les deux. Je ne conteste pas un instant que les contes, genre faisant généralement dans le bref, puissent structurer par l'exemple l'identité des enfants et leur faire ressentir la nécessité d'un certain nombre de valeurs ni que les mythes héroïques aient contribué à constituer des identités collectives. Je crois même volontiers que la télévision ne fournit qu'un piètre succédané aux contes dans la formation des enfants, puisqu'elle suggère répétitivement que la force prime sur le droit et l'intelligence, que les ogres triomphent et qu'ils ont raison, que les fantômes existent et que le matin ne les balaye pas, et que l'irrationnel est d'autant plus efficace qu'il est plus bruyant.

Mais on ressent bien que ce n'est pas du tout de cela qu'il s'agit dans la majorité des textes de Fantasy. Ils ne s'adressent pas à des enfants mais à des adolescents ou à des jeunes adultes qu'on pourrait espérer sevrés depuis longtemps. Ils n'expriment aucune morale ou valeur décelables mais se contentent de transmuer la réalité de l'impuissance (sociale) en fantasme de la toute-puissance tyrannique. Comme j'en ai esquissé l'approche théorique dans "Trames et moirés", ils visent, au moins aux États-Unis, un public jeune ou demeuré, insuffisamment acculturé et ressentant comme inquiétante la déréliction sociale croissante au point de rechercher l'évasion dans des pseudo-passés de pacotille. Il y a certainement des choses bien plus dangereuses que la Fantasy dans la société nord-américaine et dans ses productions culturelles, mais là se dévoile un symptôme passablement inquiétant, celui de l'utilisation mercantile et orchestrée des effets d'un manque, je dirais même plus, d'un défaut sociétal. Là où le conte de fées de Perrault, de Madame d'Aulnoy, de Grimm ou d'Andersen ou plus généralement dans sa version délicieusement savante et naïve du Cabinet des fées, vise, délibérément ou non, à parer à l'inexpérience et à l'impuissance ressentie mais qu'il espère et sait provisoires de l'enfant et de ce qu'il en reste chez l'adulte, la Fantasy exploite cyniquement l'inexpérience et l'impuissance effectives et subies du jamais-devenu-adulte. Comme toute la littéraire commerciale dont elle n'est qu'un aspect secondaire, elle fonde son efficacité sur l'exploitation des narcissismes de groupe, c'est-à-dire sur le renvoi au groupe consommateur de sa propre et étroite représentation du monde, au lieu que la fonction de la littérature me semble être d'assurer des relations entre groupes sociaux, ou plutôt entre subjectivités collectives, et par là une certaine cohésion dynamique de la société globale.

Le fantastique, c'est tout autre chose, le refoulement conservateur. Dans sa préface alphabétique à ses Territoires de l'inquiétude, Alain Dorémieux allègue d'une sorte d'intolérance des amateurs de SF à l'endroit du Fantastique. C'est d'autant plus surprenant qu'il est pratiquement impossible, j'ai essayé, de trouver un texte qui fonde cette allégation sinon dans le courrier des lecteurs, quasiment préhistorique et fort peu statistique, de Fiction. L'inverse en revanche, à commencer par sa préface et dans la presse est assez courant. Dorémieux se félicite d'autre part d'une sorte de retour au Fantastique qui refoulerait la SF. Comme si l'amateur de Fantastique trouvait dans l'abaissement supposé de la littérature de l'imaginaire qui s'est construite à l'envers du Fantastique classique, c'est-à-dire contre la notion de surnature, motif à satisfaction.

Ne distinguant apparemment pas Fantastique Classique (FC) et Fantastique Nouveau (FN), Dorémieux constate l'éventuelle réémergence du Fantastique pour s'en féliciter sans se poser la question du pourquoi du symptôme. Ce qui est dommage. Car s'il se l'était posée et s'il s'était interrogé sur le sens de la continuité arbitraire qu'il introduit entre le Fantastique du siècle passé et sa prétendue résurgence américaine des années 70 à 90, il se serait aperçu que, de son point de vue, les deux aspects fondent cette idée étrange que rien n'a jamais changé et qu'il y a une éternelle nature humaine entée sur ses terreurs et hantée par elles. Rien ne change et nous voilà rassurés au prix minime d'une inquiétude toute esthétique. Un brin d'honneur sauve du doute. Humanisme de bazar enseigné dans l'après-guerre — je veux parler de la Seconde Mondiale, comme on dit parlant de football — et qui n'a pas fini de servir. Certes, le Fantastique est dans les deux cas aveuglément conservateur, en cela que sachant, il choisit de n'en rien dire, de faire semblant de ne pas savoir. Mais du FC au FN, ce ne sont pas les mêmes choses, ou valeurs, qui sont conservées.

Les oppositions sont significatives et éclairantes entre FC et FN. Le premier se fonde sur la notion de surnature que le second exclut presque partout, qui ne lui est plus nécessaire. Au contraire, il exploite des thèmes issus de la SF comme les mutations ou les invasions d'étrangers mais après en avoir gommé toute référence épistémologique puisque c'est bien de ne pas savoir, de ne pas comprendre, qu'il s'agit. On peut même dire que ces thèmes n'y sont intelligibles que parce qu'il y a dans le passé du FN une tranche de SF, soigneusement refoulée mais encore reconnaissable. Dans le Fantastique classique, les victimes sont fréquemment des gens puissants, juges, nobles, soldats, qui ont failli au devoir de justice ; ce sont toujours dans le Fantastique nouveau des faibles, enfants, femmes, vieillards. Corrélativement le châtiment infligé par la surnature de FC a fait place dans le FN à une culpabilité généralisée qui bien souvent précède la transgression. La femme, le jeune, le chômeur, l'étranger, le vieillard, sont responsables de leur état qui justifie aux yeux du lecteur, rasséréné de n'en point être au moins le temps de sa lecture, la fatalité qui les écrase. Stephen King s'en est montré remarquablement conscient dans nombre de ses entretiens où il se montre beaucoup plus fin sociologue, voire politique plus radical, que la plupart de ses lecteurs des deux côtés de l'Atlantique. Son œuvre contient un message socio-politique dont l'ambiguïté même contribue sans doute largement au succès puisqu'il est tout à fait possible d'ignorer son sens social.

De façon générale, le FN me semble lié à l'existence d'un public terrifié par un environnement économique, social et technologique incompréhensible pour lui, trop mûr pour accepter la régression dans l'héroïque fantaisie mais pas suffisamment pour se poser des questions. Il demeure figé dans l'entre-deux de l'angoisse sans interrogation sociale ni philosophique.

En tant que forme littéraire, il me semble important de souligner que le FN est une littérature de genre au sens strict, ce que n'est sans doute pas la SF. Les auteurs y écrivent donc les uns par rapport aux autres — on est tenté d'écrire les uns sur les autres, comme un palimpseste — sans le ressourcement au réel qu'implique la SF. La relation entre Henry James, Kafka, Borges et les autres, parfois invoquée sous prétexte de donner ses lettres de noblesse au genre, est donc infondée. Ces auteurs exprimaient l'expérience personnelle de l'étrangeté tandis que les auteurs de FN exploitent des effets dans un univers social étroit, voire fantomatique. D'où l'impression de ressassement sur laquelle laissent les anthologies, même les mieux constituées. Il est heureux pour le genre mais peu prometteur qu'il ait pu aller chercher sa pitance, comme je l'ai déjà souligné, dans les poubelles de la SF.

Il n'est pas négligeable de relever qu'à côté du FN s'est constitué outre-atlantique une littérature spécialisée de l'horreur qui, sans plus faire référence à l'irrationnel ou à la puissance maléfique dans la nature, fait pont avec le para-policier et trouve son expression limite avec le Gore. Là, au moins, les choses sont claires. Le héros y est le serial killer comme le Dr Lecte(u)r du Silence des agneaux de Thomas Harris ou comme le sadique analphabète — je parle de l'auteur — d'American psycho dont la plaisanterie favorite consiste à crucifier une femme sur un parquet avant de lui enfoncer un rat affamé dans le vagin. On s'amuse comme on peut, de peu. Ou comme le dit Dorémieux lui-même, professant son horreur du gore mais y cédant tout de même, sans doute par inadvertance, on a cherché « à raccommoder les morceaux » [9]. Dans cette littérature, la place du démembrement, de la dislocation, du dépeçage physique ou psychique, me semble à mettre en rapport avec le réel. Je propose ici comme hypothèse de travail que l'être humain dans la fiction est une métaphore de la représentation du réel pour l'humaniste, et que son dépeçage est l'homologue d'une décomposition du réel social, du corps social.

Si l'on tente de voir les choses d'encore un peu plus haut, on peut être tenté, pour user du jargon à la mode, de tenir la SF pour une littérature moderne et la HF et le FN pour des formes post-modernes. Pour ceux qui ne seraient pas familiarisés avec ces catégories largement issues de l'architecture, je rappellerai que la modernité est programmatique, qu'elle se fonde éventuellement avec prudence sur la raison et procède plus ou moins des idéaux, des valeurs et des projets intellectuels et sociaux d'allure ou d'inspiration scientifique exprimée en gros au xviiie siècle. Son intégrisme, redoutable, est la totalisation et la globalisation qui mènent au totalitarisme. Mais sa force est la systématisation recombinatoire ou la recombinaison systématique. Elle tient plus ou moins au progrès. En ce sens, les sciences elles-mêmes continuent d'être non sans succès ni dangers, le bastion principal et consistant du modernisme.

Le post-modernisme au contraire, considère l'efficience, la raison, les grandes idéologies, les projets rationnels et les grands programmes comme dépassés et comme dangereux. Il prêche leur décomposition. Il met l'accent sur l'éclectisme, voire le syncrétisme, l'hétérogénéité, la juxtaposition, la mosaïque culturelle, le collage, l'apologie de l'archaïsme, ce qui nous vaut en architecture d'étranges montages qui tiennent de la forteresse féodale, du temple grec et du château d'eau. Il rejette l'idée du progrès. Son intégrisme est l'apologie de la décadence : tout a été dit et fait, et il n'y a plus qu'à puiser dans le stock. Le passé est un supermarché. Ses tentations sont le New Age, le culte du n'importe quoi, le relativisme intégral et la globalisation floue dite holistique.

La difficulté tient à ce que ces deux visions du monde, apparemment opposées, sont souvent complémentaires et que les délimitations sont loin d'être nettement tracées entre elles. Le scepticisme scientifique et la capacité à réorganiser le savoir en fonction de l'expérience introduisent dans la pratique de la science elle-même des attitudes post-modernes.

C'est aussi qu'elles sont plus anciennes qu'on le dit souvent. Après tout, il y a place dans notre culture pour Platon et pour Aristote, pour les deux Bacon et pour Montaigne, pour Thomas Kuhn et pour Paul Feyerabend. La vision post-moderne trouve d'autre part quelque aliment dans les événements mondiaux de ces dernières décennies. Mais il m'est plus difficile de ne pas penser qu'elle reflète au-delà d'une déconstruction sans doute nécessaire, d'un désillusionnement salutaire, d'un désenchantement, un état passager — au sens historique — du monde plus qu'elle n'est une révision radicale et définitive de la pensée. Elle correspond trop bien à l'idéologie implicite — et parfois explicite — des grandes entités économiques transnationales qui tiennent à supplanter les États dits modernes.

Le post-modernisme trouvera sans doute de toute façon sa limite dans l'exploitation qu'il fait des formes antérieures et en particulier de celles crées par la modernité. Un art fondé sur la citation tient de la récupération dans les décharges publiques mais aussi de l'hommage au moins inconscient, presque fétichiste, rendu aux créations élaborées sur des convictions plus fermes. Une fois la décharge épuisée, il faudra bien revenir à un projet. Et les problèmes sont là, qui têtus et patients, attendent des réponses.

Ne grimpons pas top haut. Il est amusant de constater que la problématique modernisme contre post-modernisme traverse la SF elle-même. Le mouvement cyberpunk par exemple ; à supposer qu'il existe, ce dont je doute avec Gibson et Sterling, se voudrait, paraît-il, post-moderne, ce qui est peut-être simplement une façon d'être à la mode. Mais dans son essence même, la réalité virtuelle, il repose sur l'anticipation des grands réseaux informatiques, c'est-à-dire sur un projet technologique de type résolument moderne.

Le véritable clivage passe entre la SF d'une part, littérature moderne de par ses attaches, au moins idéologiques, avec la science, et l'HF et le FN d'autre part, littératures post-modernes en ce qu'elles jouent sur la décomposition de l'intelligibilité et exploitent des filons archaïques et fétichistes. Certains verront là une raison (sic) de les défendre contre des formes modernes (re-sic). Je n'y vois pour ma part que des symptômes très locaux d'un conflit beaucoup plus vaste entre ceux qui pensent que le monde est un endroit partiellement intelligible et améliorable et ceux qui affirment, souvent naïvement, parfois cyniquement, le contraire. Les sectes sont terriblement post-modernes. Remember Guyana.

Le lecteur le moins perspicace aura sans doute compris que je me range du côté des amateurs de SF, dans le camp des intégristes modérés, ce qui est une occasion de rester fidèle à ma nature paradoxale. Mais ce serait céder à la tentation fanzineuse, que je côtoie ici de façon de plus en plus redoutable, que de tenter de me situer de manière plus précise par rapport à l'intégrisme radical de Joseph Staline Altairac ou au positivisme forcené de Bernard A. Dardinier. Je réaffirmerai simplement avec Humpty-Dumpty qu'il faut savoir rester le maître des mots et par conséquent écrire de la SF quand on a décidé de publier de la SF. Pour toutes sortes de raisons, je suis extrêmement sceptique sur l'avenir en France de la Fantasy ou du féerisme sous toutes ses formes. Aux États-Unis même d'où l'on nous ramène de très vieilles lunes pour ne pas dire des fonds de tiroir, en tout cas de fausses découvertes, la Fantasy, après avoir semblé devancer la SF il y a environ cinq ans, connaît une désaffectation marquée qui a rendu à la SF sa prééminence, ne serait-ce que parce que cette dernière est un domaine mobile et évolutif. Il est beaucoup plus difficile de se prononcer sur les avenirs respectifs du Fantastique Nouveau, de l'Horreur, voire du Gore, mais leurs succès durables me sembleraient encore une fois avoir valeur de symptôme.

Quant à ceux qui, comme Philippe Curval et Daniel Walther, professent en toute bonne fois la cause de l'abolition des genres ou plutôt la dissolution de leurs frontières, espérant par là rejoindre une littérature générale et son public qui, dans le fait, n'existent plus, il est clair qu'ils ne peuvent pas trouver dans des textes amorphes ou au contraire ultra-spécifiés, motif à satisfaction. Ce n'est pas parce qu'on ne sait plus de quoi on parle qu'on dit ce qu'on veut. Ce qu'on nous propose ici ou là, c'est une anomie de l'imaginaire, une aboulie de l'intelligence.

La confusion ambiante apparente, loin d'être innocente, entretenue par une multiplication des labels singuliers (Science-Fiction, Science Fantasy, Weird Fantasy, Dark Fantasy par exemple) qui n'ont d'américain que la consonance, faute d'exister outre-atlantique et d'avoir de la consistance historique, et dont la pertinence extra-commerciale est pour le moins douteuse, résulte surtout d'une intention de nommer les territoires pour mieux les accaparer. L'année 1991, calamiteuse pour l'édition, aura vu se déchaîner au pire moment une guerre picrocholine entre Presses Pocket et J'ai Lu pour la maîtrise du linéaire, lisez des rayonnages des librairies et surtout des grandes surfaces, ruineuses pour tout le monde, à commencer par les intéressés qui souffrent de taux de retours himalayens. Si j'ai à peu près bien fait mes comptes, Presses Pocket aura publié, rééditions rebadigeonnées comprises, cinquante à soixante titres dans l'année et J'ai Lu environ trente-six. Et "Présence(s)" se sera dédoublé sinon tétriplé.

Les fins navigateurs savent que par gros temps on prend des ris, c'est-à-dire qu'on réduit la toile. C'est ce que j'ai tenté pour ma part, tant au Livre de Poche (onze titres) que dans "Ailleurs et demain" (six titres dont, il est vrai, deux au moins doubles). Je ne prétends pas avoir eu raison. J'ai essayé d'être raisonnable.

Mais le plus grave, quand les blessures seront pansées et les morts enterrés, restera l'impression désolante que cette marée, souvent impudente, aura laissé sur le public et sur la critique, médusée et pratiquement saisie de mutisme à force de lassitude ou d'effroi. À savoir que le genre est doté d'excroissances aussi infantiles que monstrueuses et qu'il est la plupart du temps infiniment méprisable ou du moins négligeable. L'exigence de qualité, la revendication de la maturité du domaine, construites à grand-peine en une génération et par une génération [10], déjà bien ébranlées il y a plus de dix ans par la débilité somptueuse de la Guerre des étoiles (1977) et de ses “séquelles”, ont, semble-t-il, provisoirement cédé devant l'invasion mercantile des faux prophètes et des magiciens. Alertez les bébés. Il semble bien tard pour les ados, pardon, les jeunes adultes.

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Je me suis, pourrait penser le lecteur, écarté à force de polémique, du propos central et serein de cette chronique qui vise à renseigner les auteurs actuels et postulants. Mais je crois au contraire avoir approché un des cœurs du problème : comment ne pas faire mauvais genre ?

Et ce que j'espère, c'est qu'il y aura encore des avenirs en français.

Qui l'emportera, de l'abominable Darth Goider ou du sinistre magicien Lodaüs ? Le valeureux Luclain Skywalker, traqué par les Empires, chassé de sa planète, parviendra-t-il à tirer son épingle du jeu et conquerra-t-il enfin le cœur de la princesse ? C'est ce que vous saurez en lisant nos prochaines parutions.

Notes

[1] qui vient de recevoir le Grand Prix de l'Imaginaire 1992, ex-Grand Prix de la SF Française. Il reste que d'avoir débaptisé le GPSFF pour barbouiller d'un vague qualificatif qui noie tous les genres et gomme toutes les différences, sous prétexte d'œcuménisme et d'internationalisme, va dans le sens de la confusion organisée qui est le sujet principal de cet article, et constitue accessoirement une erreur médiatique dont une distinction déjà peu connue n'avait guère besoin. Il est difficile, au demeurant, de faire plus ridicule que le texticule accompagnant la proclamation du Prix, qui se réclame du Goncourt et, pour faire bon poids, voit en Stephen King « Le grand héritier de Zola ». On se demande pourquoi Zola, puisqu'il n'eut jamais le Goncourt, étant mort l'année précédant celle de la création du prix, et non Victor Hugo qui aurait eu le mérite au moins d'avoir quelque rapport avec le Fantastique. Ce texte devant certainement être publié dans Nous les Martiens, je laisse le lecteur s'en faire une idée par lui-même. Je constate simplement qu'il n'y a plus de Grand Prix de la Science-Fiction Française.

[2] De telles structures sont-elles de simples créations de l'esprit ou ont-elles une existence objective, dans la réalité, sociale et littéraire en l'occurrence ? Cette intéressante question que je ne puis traiter ici au fond trouve une solution élégante dans mon hypothèse des subjectivités collectives. Ce sont bien des créations, non pas d'esprits individuels au sens courant du terme mais des subjectivités collectives, parfois fort vastes et anciennes. De ce dernier trait vient qu'elles se présentent presque irrésistiblement à l'esprit individuel comme des données de la réalité puisqu'il est incapable d'en repérer et d'en nommer les auteurs. Je dois préciser, pour ceux qui n'auraient pas lu "Trames et moirés", que “l'esprit individuel” me paraît également être une fiction, précision qui sera également utile à ceux qui l'ont lu car sans elle je donnerais l'impression de me contredire, ce qui est toujours pénible à un esprit même inexistant qui s'efforce de conserver une certaine consistance.

[3] Le Professeur Dardinier s'est, comme sur le sujet de la revue française, exprimé avant moi sur ce thème avec beaucoup plus d'érudition, d'élégance et de pertinence. Qu'il veuille bien considérer comme un hommage à sa modestie et une concession à ma paresse le fait que je ne le cite pas ici à toutes les lignes.

[4] Je ne me permets cet éclat ou cet écart que pour faire assaut de patriotisme avec Roger Bozzetto qui, dans un récent numéro de Solaris, revient assez lourdement sur la notion de SF nationale, traitant de la française. Décidément, Le Borgne rôde sur tous les seuils. (Solaris nº 97, mai-juin 1991, page 4).

[5] Voici un exemple concret : dans un manuscrit reçu récemment, l'auteur imagine que les Martiens, réfugiés sur un monde artificiel, volent l'ozone de la Terre de façon à rééquiper leur planète d'un écran contre les U.V. Même si l'on néglige le fait que la teneur en ozone de notre atmosphère est si faible que ce larcin me paraît hautement problématique, un élève de cinquième était de mon temps supposé savoir que l'ozone (O3) s'obtenait aisément avec de l'oxygène (O2) et une étincelle électrique.

[6] Une exception notable, le Terremer d'Ursula K. Le Guin qui comporte désormais avec Tehanu quatre livres, mais dont la structure est beaucoup plus proche de celle de ses romans de SF que la Fantasy ordinaire. En fait, cette tétralogie est entre autres choses une réflexion sur les conditions de fonctionnement et sur les limites de la littérature de Fantasy. C'est aussi un essai non mystificateur puisque fictionnel sur les conditions de fonctionnement d'une épistémologie autre, beaucoup plus proche que celle de notre science des contenus affectifs et émotionnels de l'inconscient. L'œuvre de Castaneda représente à l'opposé un essai mystificateur, puisque donné pour témoignage ethnologique, de même type, le talent littéraire en moins.

[7] J'ai également contribué à faire paraître chez J'ai Lu son délectable roman érotico-historique — s'agissant bien entendu d'une uchronie — la Maison de Rosenstraße, qui met en scène un descendant d'Ulrich von Bek, le chien de guerre de celle de Trente Ans, auquel du reste, je suis apparenté par la branche luxembourgeoise. On sait par ailleurs que le nom sacré de Gernsback résulte d'une altération de celui de Bek, signifiant à peu près : “au meilleur Bek” comme on disait, avant le déjeuner du lundi : “Il n'est bon Bek que de Paris”. Le lacanoïde aura évidemment saisi sans retard la connotation sexuelle de ce bec sur lequel il ne fait pas bon tomber et l'allusion à la rue du Bac, dans sa prononciation anglo-saxonne, éminemment proche à Paris de la demeure du Maître défunt, rue de Lille, et l'évidente proximité du bègue et de la bogue, cette ratiocination, ou mieux ce lapsus du logiciel.

[8] Aujourd'hui disponible dans Le Livre de Poche et publié initialement dans "Ailleurs et demain", puis repris chez J'ai Lu sous le titre de L'Homme stochastique, fidèle au titre originel (the Stochatic man) mais dont l'expérience a montré qu'il était incompréhensible pour le lecteur français, même cultivé. Je prie ici tous ceux qui ont pu être induits en erreur par ce changement de titre de recevoir mes excuses : j'avais négligé de rédiger en temps utile la note de page de copyright prévue.

[9] In Territoires de l'inquiétude 2.

[10] Dont faisaient partie notamment Alain Dorémieux, Jacques Goimard, Michel Demuth, Jacques Sadoul, Demètre Ioakimidis, Philippe Curval et Gérard Klein. Que sont mes amis devenus ?