Carnet de Martinique Domel, catégorie Vrac

Vaisseaux spatiaux et WC spacieux

Martinique Domel, billet du 4 décembre 2006

Chez Gibert Joseph, juste au pied de l'escalier qui mène au deuxième étage, une table ronde est recouverte de livres conseillés à la clientèle. On ne sait si c'est comme avec l'électroménager dans d'autres magasins, c'est-à-dire si ce qui est proposé correspond à la marge la plus forte pour le vendeur cette semaine-là, en tout cas il est bien difficile de ne pas y jeter un œil dans l'espoir futile que traînerait là un livre de crypto-SF dont personne n'aurait entendu parler.

C'était en quelque sorte le cas cette après-midi sous le titre improbable de Lire aux cabinets d'un certain Henry Miller, un livre rose comme il va de soi. La quatrième de couverture fait bien sûr appel à la psychanalyse pour voir un signifiant dans la différence notable entre ce que l'on lit là et pas ailleurs, et après un sourire amusé, on pourrait se contenter de reposer l'objet pour en prendre en main deux ou trois autres en laissant faire le hasard. Pourtant quelque chose nous a poussé — rien de paranormal, bien sûr — à lire les deux dernières pages du texte et bien nous en a pris.

En voici un court extrait, où l'on reconnaît tout de suite une relation très forte avec le nouveau space opera cher à nos éditeurs modernes :

Et dire que c'est nous […] qui allons d'ici une cinquantaine d'années conquérir l'espace. C'est nous qui […] allons nous transformer en êtres interplanétaires ! En tout cas, on peut prédire une chose : c'est que même là-haut dans l'espace nous aurons nos water-closets ! […] Quand nous voyagerons à une vitesse plus grande que celle de la pensée […] est-ce que nous serons seulement capables de lire là-haut entre les étoiles et les planètes ? Je demande cela parce que je suppose que l'astronef modèle aura des lavabos aussi impeccables que des laboratoires, et que, dans ce cas, nos nouveaux explorateurs du temps et de l'espace emporteront sans aucun doute avec eux leur littérature de cabinets. Voilà un problème sur quoi méditer… la nature de cette littérature interspatiale ! […] Ce premier vaisseau qui quitterait la terre, peut-être pour n'y jamais revenir… que ne donnerai-je pas pour connaître les titres des livres qu'il contiendra !

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