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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 6 le Saut-du-Diable

Keep Watching the Skies! nº 6, janvier 1994

Hélène Abert : le Saut-du-Diable

roman ~ chroniqué par Micky Papoz

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Ce n'est pas vraiment du mainstream ; ce n'est pas vraiment du Fantastique non plus, bien qu'il soit omniprésent dans ce court roman. C'est comme le bourdonnement des abeilles, ou le vent d'été, ou les arômes du thym et du romarin. Le Fantastique, quand on sait le voir, le sentir ou l'entendre, on le devine à chaque page de ce roman. L'auteure est comparée à Giono en dos de couverture, pourtant, dois-je l'avouer, je préfère mille fois le style d'Hélène Abert à celui du défunt conteur. Le Saut-du-Diable est un village du Haut Var. H. Abert décortique quelques pages/jours d'un été meurtrier avec la même précision qu'en fit Sébastien Japrisot. Elle dissèque sans complaisance les corps et les âmes des habitants au sang violent, où comme dans n'importe quel village, on n'aime pas trop ceux qui ne sont pas pareils. La différence, ça ne fait pas net. Ca ne fait surtout pas souche. Lui, c'est Diégo, berger, beau comme un dieu. Bâtard d'un gitan, fils d'une coureuse, enfin, ILS la pensent ainsi, celle qui n'a pas voulu de l'un d'eux, les gars du pays. Celle qui a préféré les bras musculeux et la peau épicée d'un galvaudeux. Un errant qui a dû l'abandonner, vu qu'elle est revenue avec le bastardon. Puis un jour, elle s'est suicidée. Devant son fils, elle s'est jetée de la roche d'où le Diable prit son élan pour retrouver son monde ténébreux. De l'endroit même où il a laissé la marque de ses pieds griffus. Depuis, Diégo n'a plus jamais parlé. Il vit chez un fermier dont il garde les moutons et les chèvres. Le beau Diégo a grandi et c'est le gars le plus convoité par les filles et les femmes du pays. Surtout Pascale, la fille du fermier, qui se damnerait pour goûter à lui. Il y a aussi la bête, chien sauvage ou loup, un peu celle du Gévaudan, qui arrive uniquement quand un malheur va arriver. Et justement la bête est revenue dans l'été. Bête infernale, que même les plus rusés chasseurs ne peuvent attraper. Puis, il y a la pitchoune, cette petite de neuf ans qui vient passer l'été au village chez sa grand-mère, histoire de se refaire une santé. Elle seule saura se faire aimer de Diégo. Amour fatal de pureté, de chasteté dans le grésillement d'un été brûlant comme un feu. Brasier purifiant. Mais cet amour dérange la conscience de ceux qui se croient normaux. Alors quand la malédiction s'en mêle, le diable peut arriver… Un pas de trop et c'est le grand saut… Une histoire haletante, bourrée de poésie à chaque mot, sans que cela nuise ou avantage le récit, ce qui en fait toute la qualité. Un must à offrir ou à s'offrir.