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Keep Watching the Skies! nº 11, avril 1995

André François Ruaud : Star trek – le fabulaire du futur

essai ~ chroniqué par Pascal J. Thomas

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Le Guide du Téléfan” chez …Car rien n'a d'importance s'est fait une spécialité de jouer sur deux tableaux : des couvertures toujours très proches d'images à valeur d'icônes, pour raccoler un public visuellement orienté (dirons-nous), assorties de sous-titres ambitieux qui se veulent le gage d'une certaine tenue de la pensée critique, d'une certain distanciation vis-à-vis de l'icône.

Le contenu du livre correspond à la promesse implicite : illustrés de quelques photos de la série, une chronologie des trois saisons de la première série Star Trek, une liste sommaire des dessins animés, et une analyse des six (!) films qui se sont situés dans sa continuité, constituent l'essentiel du livre. Ils sont accompagnés d'un certain nombre de commentaires et de détails anecdotiques, avec force d'indications sur la carrière passée et future des acteurs impliqués dans l'entreprise (euh, je voulais dire, "le projet"). L'approche se justifie, quand on se rend compte (en lisant ce livre, par exemple) à quel point la série a fini par être menée par ses acteurs après avoir été fille spirituelle de son producteur, Gene Roddenberry (et du méconnu Gene L. Coon).

André-François Ruaud fournit des détails intéressants sur la genèse de la série, et réussit à synthétiser de façon agréable la masse énorme de documentation qui a foisonnée autour de ce qu'il faut bien appeler le phénomène Star Trek. Je suppose que d'autres volumes suivront sur les séries filles, “The Next Generation” et “Deep Space Nine” — mais je doute que, malgré leur avantage quantitatif, elles arrivent jamais au même niveau d'impact que l'idée d'origine.

Ruaud échoue relativement dans le parti-pris de distanciation qui est celui de la série dirigée par Francis Valéry. Certes, il porte des jugements de valeur sur les différents épisodes et films constitutifs du mythe, et je ne peux m'empêcher de penser qu'il n'est pas sans ironie quand il cite certaines des déclarations les plus “énormes” des acteurs-vedettes de la série (“La relation avec le personnage de Monsieur Spock m'a donné un guide constant pour une approche digne de la vie en tant qu'être humain”, Leonard Nimoy, cité page 113).

Toutefois, je trouve qu'il utilise un peu trop souvent le mot “intellectuel” en relation avec la série, parle avec un enthousiasme peut-être pas assez filtré. Surtout, son analyse n'est sous-tendue par aucune thèse, aucun point de vue unificateur ; on ne trouve pas non plus d'approche sociologique du succès de la série, ni de questionnement de cette dissolution de la barrière entre fiction et réalité qui semble vécue par George Takei, ni d'exploration des résonances que Star Trek a pu avoir avec la masse des Trekkers (ou Trekkies, si vous voulez vous moquer d'eux), un fandom qui a vite dépassé la taille du fandom de SF lui-même.

Dommage, car enfin, André-François pschanalysant la “Kirkspockiana” (branche des écrits de fiction fanique utilisant pour personnages l'équipage de l'Enterprise et partant du principe que Kirk et Spock sont amants, mais que leur liaison est censurée à l'écran…), cela n'aurait pas manqué de saillant. Ce qui n'empêche pas ce petit guide d'être aussi utile qu'indépendant.