Sauter la navigation

 
Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 24-25 CyberDreams 10

Keep Watching the Skies! nº 24-25, juin 1997

Francis Valéry : CyberDreams 10 : Amours virtuelles

revue de Science-Fiction ~ chroniqué par Pascal J. Thomas

 Détail bibliographique dans la base de données exliibris.

 Chercher ce livre sur amazon.fr

Pauvres amours que celles qui sont frappées de virtualité ! Il est vrai que, pour des sentiments aussi profonds que ceux-là, la S.-F. a rarement su — ou voulu — prédire des lendemains qui chantent. La technologie est plus souvent perçue comme un obstacle que comme une aide.

À moins qu'on ne vive dans un monde hédoniste, à la recherche de sensations nouvelles. C'est ce monde que Jean-Claude Dunyach sait fort bien restituer dans "Histoire d'amour avec chute" ; il parvient même, en ouverture du texte, à adopter une voix cynique dont il n'est pas coutumier. En ouverture seulement…

Jean-Jacques Girardot nous sert une tranche de Greg Egan (décidément, ou cet auteur a acquis sur la S.-F. française une influence à faire rougir de plaisir ses promoteurs, qui sont aussi ceux de CyberDreams, ou il focalise réellement un pan entier des thématiques nouvelles de la S.-F. des années 90…). Mais Girardot ne raconte pas aussi bien que son modèle australien ; je veux dire par là que, quels que soient les défauts que l'on prête à l'écriture d'Egan au niveau du style, il sait donner un minimum de vérité humaine à ses personnages. Chez Girardot, j'ai eu cette impression désagréable que la charge émotionnelle forte du texte manquait d'authenticité dans le détail. Difficile de mettre le doigt sur le pourquoi…

Traces d'Egan encore dans le texte de Brown et Brooke, "Appassionata", dont je ne sais que dire. Il mêle fort bien art, technique, commerce et émotion, et j'ai marché à fond en le lisant, mais je ne crois pas qu'il laissera un souvenir impérissable.

Francis Valéry enfin, je veux dire, F. Paul Doster, est le seul à faire de la S.-F. sans mettre d'Egan. Mais en mettant les gants du style… L'argument un peu ballardien de l'histoire est enfoui sous une rafale de recherche de vocabulaire qui me paraît confiner à la préciosité. On sait que je suis béotien en la matière.

On retrouve Francis Valéry au niveau des essais — sa voix est assez reconnaissable dans la traduction de l'essai de Gregory Benford, pourtant bien marqué par la personnalité de son auteur (sur le thème : la sociologie du Net n'est pas nouvelle, elle imite le fandom de S.-F., thème qui a déjà été évoqué, mais rarement avec autant de systématisme) ; et surtout, il signe lui-même une longue critique de Révolte sur la Lune de Robert Heinlein, qui nous ramène à un autre FV, celui qui dans les années 80 se faisait explorateur minutieux de la S.-F. du passé, et correspondait avec le couple Heinlein. Toutes ces bonnes choses, cependant, n'arrivent qu'à me faire regretter plus encore la disparition de la partie magazine de la revue, irremplaçable avec son regard franchement subjectif et sainement décapant sur le milieu S.-F. français.