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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 45 le Roi des rêves

Keep Watching the Skies! nº 45, octobre 2002

Robert Silverberg : le Roi des rêves

(the King of dreams)

roman de Science-Fiction ~ chroniqué par Noé Gaillard

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Les amateurs de Silverberg seront comblés : en mars un recueil de nouvelles, en avril un roman. Les amateurs de Majipoor seront sans doute déçus car ce volume est le dernier, il conclut le cycle. Mais — même si l'on a parfois l'impression que Silverberg tire à la ligne — il termine l'histoire en beauté.

Si j'osais, je dirais que le Roi des rêves est le roman de la légitimité ou de la légitimation. En effet, qu'est-ce qui légitime le fait que Lord Prestimion devienne Pontife et que Lord Dekerret le remplace. Qu'est-ce qui légitime le pouvoir ? La force, la violence de l'ennemi ou du vainqueur ? Le nom et la lignée, l'ascendance, la mère ou le père ? Les dieux qui accordent une partie de leur puissance ? La race ? Comme dans un cercle infini, chaque élément possible de réponse doit être lui aussi légitimé. Ainsi on en revient à qu'est-ce qui légitime la force ? et le reste… Prestimion et Dekerret sont contraints à se légitimer eux-mêmes en tant que personnes avant de pouvoir légitimer leurs actions. Heureusement, Dekerret trouvera le moyen de légitimer son refus de la violence, d'une guerre et deviendra en cela un grand Lord, un de ceux dont le nom reste dans la mythologie des peuples. Vous avez compris, je suppose, que c'est en maîtrisant les rêves — de gloire et de puissance — que Dekerret, devenant le Roi des Rêves est pleinement légitimé…

Je n'ose penser à l'impact de ce roman aux États-Unis. Il est copyrighté 2001 sans précision de date, et qu'il soit sorti avant ou après le 11 septembre change beaucoup de chose… Avant, c'est un roman de S.-F. intéressant d'un auteur coté ; après, c'est une façon de refuser un interventionnisme guerrier et une violence aveugle… Je vous entends d'ici crier au fou, au délire ! Attention : je ne dis pas que Silverberg connaissait les intentions des terroristes… Je dis simplement qu'en écrivant une histoire qui raconte comment on peut légitimer une attitude, un comportement, il amène un de ses personnages à légitimer la paix et non la guerre et que cette histoire, ce roman tombe l'année où la question se pose pour les États-Unis. Cela ne veut pas dire que Silverberg est un voyant, un prophète ; cela signifie simplement qu'il se pose de bonnes questions.