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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 54 Aztechs

Keep Watching the Skies! nº 54, juillet 2006

Lucius Shepard : Aztechs

(recueil sans équivalent en langue anglaise)

nouvelles de Science-Fiction

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chronique par Noé Gaillard

Ma première lecture de Shepard fut enthousiaste, un texte dans le Chasseur de jaguar, mais sans doute pas mémorable puisque le titre m'échappe (il y a presque vingt ans). Aujourd'hui, j'ai un peu perdu de mes enthousiasmes, et surtout le cynisme, même traité de manière baroque, me laisse indifférent, pour être devenu le masque confortable de nos gens à la mode. Et pourtant, en reprendre une tranche ou une louche, m'a sérieusement agressé. On ne sort pas indemne de la lecture de Shepard.

Quatre des six textes présentés sont à la première personne, il doit bien y avoir un moment où vous devenez le héros ("Aztechs", "le Dernier testament", "Ariel", "le Rocher des crocodiles"). Les deux autres, "la Présence" et "l'Éternité et après" proposent avec réalisme des situations et des personnages d'une “noirceur” gluante.

Mais procédons par ordre. "Aztechs" raconte le combat que se livrent deux I.A. par humains — si l'on veut — interposés. I.A. et humains fournissant l'essentiel du spectacle aux chaînes de T.V. Le narrateur (je) y perd beaucoup. "Le Dernier testament" nous renvoie dans le passé littéraire et un peu bourgeois de la France tout en étalant des systèmes de protection et de défense sophistiqués pour satisfaire une vengeance… avec un héros lutteur — j'ai cru voir dans ce texte un petit clin d'œil à Stephen King.

Avec "Ariel" nous sommes en pleine S.-F. classique, si j'ose dire. Des chercheurs-étudiants et l'un d'entre eux qui découvre le moyen de réaliser ce que l'autre a pensé, une extraterrestre, des factions rivales d'extraterrestres s'affrontant sur notre Terre et bien sûr une histoire d'amour. Le héros se contente d'être obstiné et oublieux…

Pour ce qui est de "le Rocher des crocodiles" l'individu chargé de vérifier si les meurtres commis au Congo sont empreints ou non de sorcellerie tombe “aux mains” de celui qui est responsable, mais s'en tire à bon compte, c'est peut-être le monde qui en est alors plus noir. "La Présence" a tout de l'exercice imposé : “dire quelque chose contre le terrorisme après le 11 septembre”… et l'histoire est ici racontée d'un point de vue omniscient. Divin et qui nous prend à témoin… Dans "l'Éternité et après", on a fait croire au héros qu'il pouvait racheter la prostituée dont il est amoureux et cela lui coûtera plus cher que prévu.

Si j'ai bien lu, et si vous avez senti ou perçu ce que je voulais dire, nous sommes revenus au cynisme initial. Celui qui condamne Shepard à chercher un homme digne de ce nom et à reprocher en permanence à Dieu notre “imperfection meurtrière”. Petite leçon d'humilité à la manière de celles que Jacques Chambon lançait quelques fois au visage de certains. Un petit bijou ciselé de manière agressive…