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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 60 les Allées de Cocagne

Keep Watching the Skies! nº 60, juillet 2008

Gary A. Braunbeck : les Allées de Cocagne

(recueil sans équivalent en langue anglaise)

nouvelles fantastiques

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chronique par Jérôme Charlet

J'adore avoir entre les mains le résultat du travail colossal que peuvent abattre quelques passionnés quand ils se mouillent pour produire des choses de qualité. C'est pour ça que j'adore les fanzines (surtout papier). C'est par exemple pour ça que je suis abonné à Borderline. Et c'est comme ça que j'ai découvert ce recueil.

Gary A. Braunbeck est peu connu en France. Quelques nouvelles par-ci par-là (dont deux dans des Territoires de l'inquiétude, tout de même !), à opposer à la vingtaine de romans et aux quelque deux cents nouvelles disponibles qu'il a produites. Cet ouvrage répare une flagrante injustice et il est à souhaiter qu'il donnera envie aux éditeurs de traduire du Braunbeck !

Les Allées de Cocagne propose donc neuf nouvelles, dont, affirmons-le tout de suite, un nombre impressionnant de chefs-d'œuvre. Toutes ne sont pas liées à un des genres qui nous occupe ici, mais toutes s'avalent avec le même plaisir.

À noter aussi, l'incroyable travail de traduction, dû à Maxime Le Dain pour la majorité des textes. D'une fluidité impressionnante, d'une justesse de ton… Ce qu'il fallait pour la prose de Gary Braunbeck.

Je vous le répète : de véritables passionnés de qualité que cette équipe de Catharsis…

Revenons aux nouvelles. Neuf textes, jouant avec les marges. Parfois franchement fantastiques, parfois franchement pas. Toujours très belles, drôles ou cruelles, difficiles ou tordantes. Parfois tout cela à la fois.

Ainsi de la nouvelle donnant son nom au recueil, "les Allées de Cocagne". Dans un supermarché américain, le jour du premier anniversaire du 11 Septembre, un vieil homme, Afghan ayant fuit le régime Taliban, déclenche la psychose. Touchante et inquiétante, pleine d'humour et lourde d'un passé difficile. Elle résume magnifiquement l'art de Braunbeck.

Je pourrais ici énumérer toutes les autres nouvelles, dire combien elles sont, toutes, formidables, à lire, magnifiques. J'attirerai juste votre attention sur quelques-unes, perles entre les perles. Je mise sur le poids de votre curiosité pour que vous découvriez par vous-même toutes les autres…

"Rami Temporales", tout d'abord, qui nous livre un secret divin… Ne vous êtes-vous jamais demandé pourquoi certains d'entre nous attirent plus la sympathie que d'autres ? Pourquoi les confidences sont plus faciles, presque naturelles, vers telle personne plutôt que n'importe qui d'autres ? Joël, le héros de cette histoire, qui accueille à longueur de journée les confidences de quidams qui le trouvent sympathique, devra faire un lourd choix moral… Cruelle et humaine, divine et posant un réel choix de conscience, une nouvelle remarquable.

Avec "une Femme sur commande", on a affaire à un Western version petit peuple. Un homme arrive à Cedar Hill pour prendre possession de la pension de famille dont il vient d'hériter. La vie l'y attend, ainsi qu'un nombre impressionnant de chats… Flirtant avec le Fantastique, pleine de ces bonnes ondes positives qui font du bien, un beau moment de lecture.

Je pourrais continuer ici. Vous parler de cette bête immonde qu'est toute guerre ("Matthew, le matin"), de monstre dévoreur de vie version Métropolis ("Cotisations syndicales"), de ce grand éclat de rire qu'est "Crème glacée, pop-corn et canards homicides : une histoire d'amour, à peu de chose près".

Une dernière chose : bien sûr, le prix est un peu élevé, bien sûr, la maquette de l'ouvrage est perfectible. Mais une chose est sûre : si vous vous arrêtez à ces détails, jamais vous ne découvrirez les chefs-d'œuvre qui sont proposés ici !.. Pour moi, ce fut une magnifique rencontre que ce recueil de Gary Braunbeck, humaniste, poétique, drôle, touchant, dérangeant… Un ouvrage à lire, sans aucun doute.