KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Robert Silverberg : Chroniques de Majipoor

(Majipoor chronicles, 1982)

roman de Science-Fantasy par nouvelles

chronique par Noé Gaillard, 2010

par ailleurs :

Vingt-sept ans d'écart entre la première édition (1983) et cette réimpression (2010), presque une génération ; comme on peut penser que les bons livres sont comme les bons vins : ils se bonifient en vieillissant. Je vous laisse imaginer la qualité de cette œuvre. La quatrième de couverture — je vous entends d'ici : « Ça y est, le revoilà avec sa quat. de couv. ; quel pénible ! ». Moi je veux bien, mais c'est fait pour “piéger” l'acheteur, lui faire confirmer son intention. C'est important ! signale en rouge : « Les Mille et une nuits de notre temps ». Là, je respire un bon coup et je m'interroge : l'auteur de cette trouvaille sait-il de quoi il parle ? Il me semblait que les Mille et une nuits correspondaient à une suite de récits faits chaque matin pour maintenir un prince en haleine et se maintenir ainsi en vie ; pour ces Chroniques, aucune menace ne pèse sur le récitant, et d'ailleurs qui est-il ? Et surtout, que vient faire ce “notre temps” sur un volume de la collection "Ailleurs et demain" ? Mais il est vrai qu'il s'agit d'une suite de récits reliés par l'évolution de celui qui les choisit. Cela pourrait s'apparenter à un recueil de nouvelles, bien que l'unité autour de Majipoor et du jeune “lecteur” semble indiquer une volonté manifeste corroborée par le fait que chaque récit n'est pas composé comme une nouvelle pouvant être lue en dehors de ce livre.

Hissune, jeune garçon remarqué par Lord Valentin, est censé collationner et classer des rapports de percepteurs, mais il profite de ses connaissances pour se permettre de “lire” des récits mémoires déposés en archives. Il insère le mémoire dans une machine, coiffe les écouteurs et devient le temps du récit celui qui raconte. Il incarne ainsi deux femmes, un voleur et des responsables avant de finir par être même Lord Valentin jeune. Une remarque importante à mon avis : aucun des récits n'est à la première personne… C'est-à-dire que si le jeune héros est censé devenir un autre personnage le temps du récit, il n'entre pas dans le corps de celui qui a laissé le mémoire. Pourtant, il ressent les rapports sexuels que la première femme qu'il habite a avec un extraterrestre (par rapport à Majipoor, bien sûr). Autre subtilité des récits : nous dresser une carte physique et démographique de la planète sans nous accabler de données brutes tout en traitant de sujets sensibles : le racisme, la manipulation des individus, la confiance en soi, le crime, le rêve.

Et tout cela se lit avec une facilité déconcertante. On ne s'ennuie pas un seul instant et bien sûr on en redemande — la réédition de Valentin de Majipoor, publié en 1985, ne saurait tarder…

Noé Gaillard → Keep Watching the Skies!, nº 65-66, juillet 2010

Lire aussi dans KWS la chronique de : les Montagnes de Majipoor [ 1 ] [ 2 ] par Noé Gaillard ou Éric Vial & le Roi des rêves par Noé Gaillard

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