Rudy Rucker : le Secret de la vie
(the Secret of life, 1985)
roman de Science-Fiction
- par ailleurs :
Parfois, les parutions suscitent des configurations néfastes. Ainsi en est-il de ce mois où deux astres en opposition créent une sorte de vide. Pourquoi ne pas en parler néanmoins ? Ne serait-ce que pour suggérer qu'en Science-Fiction, les chefs-d'œuvre n'abondent pas plus qu'ailleurs.
Le premier de ces astres à l'apparence d'une nova. Il s'agit de Rudy Rucker dont Maître de l'espace et du temps a créé une belle surprise l'année dernière. Las ! frappé du même virus contagieux qui a réduit Spielberg et les autres à la sénilité infantile, notre merveilleux Rucker, paré de tous les talents, n'a pas résisté à l'épidémie dont souffre le cinéma américain.
Tout commençait si bien, pourtant. Conrad Bunger s'interroge soudain : « Le ciel et l'enfer, c'est jamais que de la Science-Fiction. Mais n'y a-t-il vraiment rien du tout après la mort ? »
. Il faut dire que notre héros, en pleine crise d'adolescence, vient d'être ému par les œuvres de Sartre, ce qui est rare à Louisville. De surcroît, ses études ont créé chez lui une véritable aversion pour la religion catholique. Ce dégoût et cette inquiétude existentielle l'amènent à s'écœurer de la persistance de la matière quand il pelote les nénés de sa petite amie. L'affaire est grave au point qu'il simule un suicide avec une cartouche à blanc. Réflexe instinctif, son corps s'envole pour échapper à la balle. Pourquoi cet extraordinaire pouvoir ?
Commence alors une époustouflante enquête qui mènera notre Conrad à épuiser ses cinq dons pour apprendre qu'il est extraterrestre, né de la rencontre fortuite d'un jambon de porc et d'une soucoupe volante. Sur ce plan, rien à dire, notre auteur travaille dans le cousu main. Il séduira ceux qui aspirent à l'évasion des bluettes.
En effet, la fine fleur intellectuelle de l'Amérique semble élevée par monsieur Spock. Préférant les clins d'œil appuyés du feuilleton aux jongleries métaphysiques auxquelles il nous avait habitués, Rudy Rucker cède alors à toutes les facilités qu'offre la nostalgie des années soixante. Beatles, boums, soûleries, banquettes arrière des Chevrolet. Ne subsiste plus alors qu'un mince filet d'imaginaire exploitant les ficelles du conte de fées et du conte philosophique. Exit, la spéculation et l'invention ; la SF devient tiédasse.