Robert Sheckley : Arena
(Victim prime, 1987)
roman de Science-Fiction
- par ailleurs :
Lorsqu'en 1958, Robert Sheckley [ 1 ] [ 2 ] écrivait "le Prix du danger", après avoir génialement esquissé le thème du meurtre légal en 1953 dans "la Septième victime", qui pouvait imaginer que trente ans plus tard les faits lui donneraient raison, ou presque ? En 1988, en Allemagne fédérale, des équipes de télévision filment en direct des braqueurs de banque et leurs otages comme s'ils participaient à un grand show réglé par les Guy Lux d'outre-Rhin et sponsorisé par les plus célèbres firmes commerciales ; dans les coulisses, la police veille à la bonne réalisation du spectacle. Bientôt les balles fusent, le sang gicle. Bilan : trois victimes. Déjà, il y a quelques années, des journalistes japonais avaient tenté une première en organisant et en filmant un assassinat. C'est sûr, encore une petite décennie et la percutante nouvelle de Sheckley, anticipant sur les jeux assassins, se verra totalement vérifiée dans une émission à succès. Je lis déjà le commentaire des journaux de télévision du futur : « Cette fois, la réalité dépasse bien la fiction ; pour un million de dollars, jouez votre vie en direct ! ». Car les penseurs cartésiens ont la vertu analgésique de faire oublier les plus fantastiques visions des écrivains de l'imaginaire en prétendant les effacer par le réel. Ils s'appuient sur la facilité qu'a le public d'ignorer les avant-gardes pour les nier ensuite quand leur aspect novateur imprègne leur culture.
Sheckley, lui-même, le grand Bob, se fait rattraper par ses propres anticipations et son dernier né, Arena, s'il se lit agréablement et possède les atouts d'un suspense bien mené, traite en mineur des thèmes saignants qu'il avait inventés trente ans plus tôt.