Thomas Disch : Poussière de lune
(Under compulsion / Fun with your new head, 1968)
nouvelles de Science-Fiction
Après la traversée du désert que subirent les jeunes auteurs durant une décennie, entre 1987 et 1997, voici que reparaissent des revues (Bifrost, Galaxies) où ils peuvent enfin publier leurs textes, de nombreuses anthologies qui révèlent l'étendue de la palette présentée par la Science-Fiction. Français, Italiens, Allemands et Anglo-Saxons y expriment pour la plupart une appétence de fusion entre les genres.
Celle-ci ne date pas d'aujourd'hui : voyez, par exemple, Poussière de lune, qui vient d'être réédité. Thomas Disch y démontre en génial précurseur que les extrêmes se touchent et que le Fantastique, la Science-Fiction, l'humour, le nonsense, la fiction spéculative, le polar métaphysique, quand on parvient à les replier en bande de Moebius, offrent une solution de continuité entre les genres littéraires. Ainsi démontre-t-il, dans "Inutile la fuite, inexorable la pitié", qu'en poussant jusqu'à l'absurde un vieux thème de SF (celui du robot asimovien), on obtient une nouvelle d'un kafkaïsme exacerbé. « Faut-il torréfier Kafka ? »
s'interrogeait déjà Jacques Bergier dans les années cinquante. La réponse est oui car la saveur en est exacerbée. Comme dans "la Descente", où l'emprunt de l'escalier mécanique appliqué au désespoir débouche sur un suspense technologique. Avec le bouleversant "Nada", Disch invente la recette qui fera plus tard le succès des X Files : le flou quantique exercé à l'élucidation d'un mystère transcende un thème majeur : les Autres sont parmi nous. Dans "la Cage d'écureuil", il pousse le plaisir de pervertir la logique relationnelle entre l'écrivain et son œuvre jusqu'à nous donner sa version personnelle de "Bartleby l'écrivain". À lire ou à relire d'urgence.