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Manchester est la proie d'un fantasme. Tout le monde joue aux dominos. Mais les numéros qui s'inscrivent à la surface sont des pixels aux combinaisons changeantes. Des publims volettent à travers la ville et proclament : « Jouez pour gagner ! ». À la fois organiques et informatiques, ces mouches jouent un rôle obsédant auquel n'échappe aucun des habitants. Sauf que, pour toucher le moindre lot, il faut avoir une sacrée chance. Personne n'a encore remporté le jackpot. Ou ceux qui l'auraient dû sont morts assassinés. Qui est donc M. Million, patron d'Annodomino qui contrôle le système ?

Jazir baigne dans l'odeur de curry du restaurant paternel. Avec son amie Daisy Love, une mathématicienne pointue, ils vont chercher à comprendre. Surtout, ne croyez pas suivre une enquête. Jeff Noon est assez retors pour embrouiller les cartes, vous amener progressivement dans son délire où les apparences sont aussi changeantes que les nuages dans le ciel. Bientôt Daisy, orpheline, découvre que son père, toujours vivant, a participé jadis à une expérience fascinante. Grâce aux mathématiques noires, ses amis et lui sont parvenus à imbriquer sexe et informatique !

Comment s'étonner alors des faits bizarres, des anecdotes troublantes, des personnages sulfureux qui apparaissent dans les rues de Manchester. En savant manipulateur du verbe, complice des mots-valises, Noon joue avec nos nerfs pour transformer sa contre-utopie équivoque en comédie noire à l'image d'une société pourrie jusqu'à l'os — qui est la matière première du domino. Voilà qui devrait ravir les amateurs de romans obsessionnels. Pixel juice, recueil de nouvelles qui paraît en même temps, ne les décevra pas.