Éric B. Henriet : l'Uchronie
essai, 2009
- par ailleurs :
Mettre l'Histoire en question, n'est-ce pas une merveilleuse occasion de jongler avec le destin ?
L'idée qu'il aurait suffi d'un rien pour qu'à un moment donné, sa vie ait pu changer si tel incident ne s'était pas produit semble évidente pour chacun. Et d'imaginer comment son avenir se serait dessiné autrement. C'est dire que l'uchronie est une forme de pensée aussi naturelle à l'Homme que l'utopie. Sinon que cette dernière incline à envisager des jours meilleurs, tandis que l'uchronie n'est pas nécessairement optimiste. Voilà pourquoi les écrivains s'en sont emparés. On s'étonne alors que le mot ne soit inscrit ni dans le Larousse ni dans le Petit Robert.
Pour réparer pareil oubli, Éric B. Henriet aborde toutes les facettes de ce genre littéraire dans un passionnant essai.
À n'importe quel moment, l'Histoire offre des alternatives pour en changer la trame. Mais si l'on trouve par ci par là des exemples dans la littérature ancienne, ce n'est qu'en 1876 que Charles Renouvier définit l'uchronie dans un vaste ouvrage dont le propos est d'affirmer le libre arbitre de l'être humain. Déjà, Louis Geoffroy avait publié en 1836 le premier roman uchronique, Napoléon ou la Conquête du monde (Napoléon apocryphe en 1841), où l'empereur, qui ne connaît pas la Bérézina, poursuit sa marche triomphale, conquiert la planète et impose la paix universelle. Dès lors, l'uchronie va souvent privilégier les grands hommes ou les héros littéraires.
Cent soixante-treize ans se sont écoulés. En cinquante questions-clé, Éric B. Henriet met en perspective les milliers d'ouvrages qui ont paru depuis, analyse les subtiles différences qui existent entre l'uchronie et l'histoire secrète, l'anticipation et la politique-fiction, évoque son rôle dans la Science-Fiction, le steampunk, qui est une intrusion du futur dans l'Histoire. Fait la part entre les historiens déterministes qui dénient l'intérêt du genre et ceux qui en louent l'aspect philosophique.