Michel Houellebecq : Soumission
roman de Science-Fiction, 2014
- par ailleurs :
Je voulais consacrer ce carnet particulier à Soumission de Michel Houellebecq. Quand j'appris que l'auteur lui-même avait brusquement disparu des écrans radars tandis que plus de trois cent mille exemplaires s'écoulaient. Je n'avais théoriquement plus rien à ajouter.
Mais, comme la tortue dans la fable de La Fontaine, j'ai réfléchi en prenant mon temps.
Je ne sais ce qu'en pensent les milliers de lièvres qui se sont précipités sur Soumission, mais à mon avis, ils ont couru trop vite pour comprendre qu'ils avaient été floués.
Non que ce roman ne manque pas d'un certain charme pour ceux qui apprécient la prose synthétique de Houellebecq, son art de nous entraîner doucement vers la dépression, de nous suggérer qu'une bonne fellation vaut mieux que tout l'amour du monde.
J'admire surtout sa capacité à triompher de l'ostracisme qui pèse sur la Science-Fiction pour en écrire sans que les membres du prix Goncourt y trouvent à redire. Ce qui donne d'excellents ouvrages comme la Carte et le territoire, plus encore les Particules élémentaires.
Donc, a priori, lorsque je me suis décidé à lire Soumission, je me réjouissais du propos, soupçonnant d'après la quatrième de couverture qu'il s'agissait d'une fiction spéculative. Plutôt une “diachronie”, soit la description évolutive d'un fait ou d'un ensemble de faits opposés à un état théorique de la société.
Malheureusement, au fil des pages, je me suis aperçu que la lente islamisation de la France dans un futur proche, aboutissant à l'élection d'un président de la République issu de la Fraternité musulmane n'était qu'esquissée, jamais traitée. Une simple bouée de sauvetage pour un roman désabusé.
Dommage, le sujet méritait qu'on le creuse en profondeur, en détaillant l'insidieuse progression d'un changement de mœurs et de mode de pensée, rongeant la civilisation judéo-chrétienne. Seule est mise en valeur la décrépitude d'une démocratie à bout de souffle, dominée par le politiquement correct.
Déçu, je me suis attaché au puissant intérêt que le personnage principal de Soumission voue à Huysmans. Ce qui m'a procuré l'occasion de relire les Sœurs Vatard. La superbe écriture de Joris Karl m'a donné l'impression d'être projeté dans un milieu extrêmement étrange, celui des petites mains ouvrières qui travaillaient au xixe siècle dans un atelier de reliure.
Avec le recul, la description de certaines planètes et de ses habitants extraterrestres dans nombre de space opera paraît bien fade en comparaison.
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