Blog dans le coin
Blague dans le coin, rien n'est plus fascinant que les blogs, surtout quand ils n'ont rien à dire. J'ausculte sur la toile des dizaines de remugles sur ordinateur par des inconnus qui ne font pas de distinction entre l'oral et le verbalisable, confondant les deux avec l'écrit. Dire que leurs blogs sont rédigés – ce qui peut s'avérer souvent vrai par ailleurs —, revient à affirmer qu'il suffit de s'introduire dans les narines de l'encre avec un compte-gouttes et de se moucher ensuite pour lire le résultat sur un kleenex.
Mais je m'emporte inutilement. Ces tests de Rorschach dissimulent peut-être des beautés que je ne soupçonne pas car ils appartiennent à un avenir de l'expression que je ne discerne pas. Penser autrement, admettre que les traces incohérentes de pixels qui apparaissent sur l'écran sont les pierres de Rosette des temps futurs, voilà ce que je devrais faire en tant qu'écrivain soucieux de suivre attentivement l'évolution de nos sociétés.
Car bien des choses changent en ce moment sur lesquelles tout le monde s'exprime sans rien connaître des tenants et des aboutissants. Il faut bien analyser ce nouveau phénomène. En bloguant par exemple, à la manière d'un tapir dans une forêt amazonienne qui voit disparaître ses repaires et dépose ses fumées au hasard de la forêt en espérant qu'un autre tapir lui apprendra pourquoi les arbres deviennent des huttes en ciment.
Prenez par exemple la nanotechnologie. Depuis le mouvement cyberpunk, en Science-Fiction, tous les lecteurs avertis s'enthousiasment au sujet de cette nouvelle possibilité offerte à l'Homme avec un tel aplomb que le pape actuel devrait publier une bulle mortifère pour la condamner.
Eh, bien ! non. La nanotechnologie dont 99 % de la population mondiale ignorent tout suscite de terribles antagonismes. Manipuler de simples atomes et molécules à l'aide d'un microscope à effet tunnel ressemble pour beaucoup à une ruse du diable. Pour 70 % des Américains, en particulier qui rejettent ce concept, “moralement inacceptable“, parce que la création de structures artificielles à l'échelle de l'atome peut être une tentative de se substituer à Dieu. Tout à fait normal pour une population dont l'indice de religiosité s'établit à 8,3/10. Ce qui l'est moins, c'est que ces mêmes Américains admettent les OGM sans broncher, avalent par bols entiers du pop-corn génétiquement modifié. C'est sans doute parce qu'il y a étymologiquement du “saint” dans Monsanto que les modifications du gène divin ne les gènent pas.
Des coups de pied aux molécules se perdent dans la nature !
Mais, comme je ne verse pas dans l'antiaméricanisme primaire, il me semble utile d'aller plus loin dans la confusion. Car, en Europe, c'est le contraire. Britanniques, Allemands, Français considèrent que les nanotechnologies sont d'une joyeuse moralité. La moitié des habitants jugent que Dieu n'a aucun droit sur leurs corps, apprécient — dans un temps qu'ils espèrent proche — que leur capital santé soit amélioré par la science grâce au clonage cellulaire.
Par contre, ils ravagent des champs de maïs sous prétexte que le diable se cache dans les épis.
Le corps, oui ! Le pop-corps des culs-terreux monsanctifiés, non !
On comprend mieux pourquoi les blogueurs débloquent. Pour eux, la Science-Fiction, ça se vit si vite qu'on n'a pas le temps d'y réfléchir.
Voilà pourquoi je porte l'avenir en bandoulière.
Commentaires
Peut-être ne faut-il pas trop vite généraliser.
Pour une présentation d'une recherche en cours dans une perspective un peu théorique, voir la Science-Fiction comme avant-garde.
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