Stephen Baxter : Origin (Manifold – 3)
roman de Science-Fiction, 2001
traduction française en 2008 : Origine
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Après Time et Space, voici Origin. Il faut dire que l'idée générale pour la “trilogie”(1) Manifold est franchement originale. Une exploration du paradoxe de Fermi en trois volets, trois univers en quelque sorte parallèles, avec les mêmes personnages principaux dans des rôles plus ou moins similaires, mais dans des décors, des situations et des histoires totalement différentes.
Cette fois, on trouve l'astronaute Reid Malenfant fort dépité car il a été déclaré inapte au vol pour des raisons en réalité purement politiques. Il part donc faire une tournée publicitaire pour la NASA en Afrique du Sud et se retrouve aux commandes d'un T38, avion utilisé pour l'entraînement des astronautes, que lui a obligeamment prêté un copain de l'aviation sud-africaine, juste au moment où on annonce un OVNI, mais ce coup-ci un vrai. C'est un anneau bleu — symbole déjà présent dans les volumes précédents — qui flotte dans le ciel juste au-dessus des gorges d'Olduvai. L'anneau recrache des hominidés et avale des spécimens d'homo sapiens, en l'occurrence la femme de Malenfant, Emma. En même temps, notre bonne vieille Lune disparaît, remplacée par un satellite rouge bien plus gros ce qui ne tarde pas à provoquer de multiples désastres sur la Terre, tremblements de terre, tsunamis, marées gigantesques, etc. Emma se retrouve sur cette lune, peuplée de toute une panoplie de nos ancêtres éloignés, homme de Neanderthal, homo erectus, Australopithèque, mais aussi quelques homo sapiens plus ou moins contemporains, bien que venant d'autres univers, les plus vils n'étant pas nécessairement les plus primitifs.
Malenfant, qui ne sait rien de tout ça, assisté de la Japonaise Nemoto (encore elle), décide de tout faire pour retrouver Emma, et réussit à convaincre la NASA de monter une mission d'exploration de cette nouvelle lune où il semble bien y avoir de la vie, avec lui-même aux commandes. Ils partent donc et arrivent sans encombre, mais les choses tournent mal immédiatement.
On suit alors Malenfant, Nemoto, Emma, et divers habitants de la nouvelle lune qui se traînent péniblement de lieu en lieu, en essayant, avec plus ou moins de succès, de survivre dans un environnement qui varie du désert à la forêt tropicale, mais reste implacablement hostile. Hostilité de la nature, des diverses variétés d'hommes qui se battent contre les tribus ou les groupes adverses mais aussi entre eux. L'analyse des divers stades de l'homme primitif est fort bien faite, avec une spéculation brillante sur leur fonctionnement intellectuel, cloisonné et limité, incapable de dépasser le présent immédiat, sans pensée symbolique, et sur leur organisation sociale parfois très réduite mais avec des ébauches de pouvoir tantôt patriarcal tantôt matriarcal. Un groupe d'Anglais alternatifs est sur place depuis des dizaines d'années et a réussi à créer une petite colonie bien organisée, si tant est que ce soit possible avec pratiquement rien du monde moderne. Un groupe de fanatiques religieux pas si éloignés de certains qu'on peut voir chez nous apparaissent finalement comme bien plus terrifiants que même les plus grotesques de nos supposés ancêtres. Il y a aussi, venant d'un univers encore différent, une espèce super intelligente et évoluée qui ressemble physiquement à un gorille mais qui est capable, depuis des millénaires, de manipuler la matière au niveau subatomique ainsi que l'espace. Ils peuvent donc réaliser une sorte de téléportation, comme si c'était la chose la plus normale du monde.
Mais pendant un bon nombre de pages, les événements sont très répétitifs, la situation des divers personnages dont on partage successivement le point de vue va de mal en pis, ils vivent dans la boue, le sang, le cannibalisme, la violence parfois extrême répétée ad nauseam. Baxter semble avoir une vision très noire de ce que nous avons été, de ce que nous sommes et de ce que nous pouvons devenir. Sans doute pas sans raison d'ailleurs. Je n'ai rien contre des scènes difficiles, mais j'ai trouvé la dose un peu forte ici. Il faut vraiment que j'aie eu confiance dans l'auteur pour continuer et lire tous les mots. Au quatre cinquièmes du livre, la souffrance des personnages (et du lecteur) s'atténue un peu et on progresse enfin vers la découverte de la raison d'être de tout ça. Les hominidés de la lune rouge apparaissent de plus en plus comme des évolutions parallèles plutôt que des ancêtres “primitifs”, la nature de l'intelligence, les valeurs de la vie, tout est revu et remis en perspective. Une fin finalement moins grandiose que dans les deux précédents volumes, mais adéquate.
Au total, une “série” de haute tenue, avec des images et des idées très fortes, qui restent en tête longtemps.
- Il y a en quatrième position un recueil de nouvelles non traduit, Phase space.↑
Commentaires
Ad nauseam. C'est la bonne expression. Autant Time et Space sont des chefs-d'œuvre de la SF, autant Origin est une horreur. Meurtres (d'enfant en bonne quantité), meurtres, et meurtres. Franchement, le mieux qu'il y ait à faire avec Origin c'est de ne pas l'ouvrir, et de passer directement au recueil de nouvelles qui clôt le cycle : Phase space.
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