Ian McDonald : River of gods
roman de Science-Fiction, 2004
traduction française en 2010 : le Fleuve des dieux
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Le fleuve des dieux, c'est le Gange. Et ça décrit bien ce livre. Un mélange étonnant du pire et du meilleur. J'ai failli abandonner avant la fin de la première moitié, mais la lecture de nombreuses critiques très favorables m'avait convaincue que l'effort devait valoir le coup et j'ai donc persévéré jusqu'au bout.
L'histoire se passe en Inde en 2047, l'année du centième anniversaire de l'indépendance du pays. Mais en fait, il ne s'agit plus que d'un ensemble d'états disparates qui n'entretiennent pas toujours des relations amicales. La mousson est en retard de trois ans et la sécheresse est terrible, ce qui attise les tensions entre Bharat et Awadh à propos d'un barrage. Les intelligences artificielles sont partout, mais les IA de niveau trois — de loin supérieures en intelligence à leurs créateurs (ce qui, finalement, n'est peut-être pas un exploit si impressionnant) — sont interdites par des accords internationaux. Celles qui existaient ont presque toutes été détruites et celles qui persistent sont pourchassées et “excommuniées” par des policiers spécialisés. Un astéroïde proche de la Terre est découvert et il s'avère que c'est en fait un artefact artificiel bien mystérieux : il est plus ancien que le système solaire et il contient les images de trois personnes contemporaines… Celles-ci pourraient peut-être comprendre de quoi il s'agit. Un politicien de haut niveau, le conseiller personnel de la première ministre, risque beaucoup du fait de son attirance pour un être étrange, ni femme ni homme, un "neutre" par choix et chirurgie clandestine, et pourtant pas du tout sans pulsions érotiques. Un fils de famille s'est exilé en Angleterre où il commence une carrière de comédien, mais est rappelé au pays pour prendre la tête de l'entreprise familiale avec ses frères, entreprise qui travaille sur une technologie qui, si elle marche, aura des répercussions planétaires. Un spécialiste en informatique quantique a tout abandonné et s'est réfugié en Inde où il cherche à se faire oublier. Une jeune fille qui a apparemment d'étranges pouvoirs quasi divinatoires (mais en rien surnaturels) cherche à retrouver ses vraies racines, n'ayant connu que ses parents adoptifs.
Les chapitres successifs suivent chacun un des personnages principaux, et il y en a bien une dizaine. Au début, leurs histoires sont totalement séparées, ils ne se connaissent pas et n'ont rien en commun. Ainsi, quand c'était de nouveau le tour de l'un d'entre eux, le chapitre précédent où il apparaissait remontait à tellement loin que j'en avais déjà oublié les détails. Ces personnages sont pourtant tous intéressants et très bien décrits, certains tout à fait mémorables, et je n'ai jamais eu l'impression de les mélanger. Mais pour suivre leur histoire correctement il me fallait régulièrement retourner en arrière.
Le tout baigne dans une description foisonnante, parfois extravagante, de l'Inde, ses villes, sa culture, ses traditions, ses religions, ses contradictions, ses foules grouillantes, ses politiciens qui magouillent, les armées qui avancent, les robots tueurs qui attaquent, le bruit, la chaleur, la poussière… On peut dire que ce pays, tel que l'a fantasmé l'auteur, est peut-être le personnage principal du livre. Il faut tirer son chapeau à McDonald qui, n'étant pas né là-bas et n'y ayant sans doute pas vécu longuement, réussit à donner une impression très crédible,(1) du moins à une personne (moi) qui n'y connaît pas grand-chose. Mais l'intrigue, déjà complexe, est rendue encore plus difficile à suivre par l'utilisation permanente d'un vocabulaire fabriqué à partir de l'Hindi de sorte que de nombreuses phrases sont à moitié ou totalement incompréhensibles, d'autant plus que la plupart de ces mots ne figurent même pas dans le glossaire à la fin du livre. J'en ai trouvé beaucoup sur Wikipédia, mais passer sont temps à chercher la signification des mots ne correspond pas à mon idée d'une lecture agréable.
Après quatre cents pages de fils narratifs séparés, ils ont enfin commencé à se rejoindre et à former un tout un peu plus cohérent. Et là, le rythme devient nettement plus frénétique, de sorte que, à ce stade, j'ai cessé de chercher à comprendre tous les mots et je me suis contentée de me laisser entraîner par l'empilement d'imagerie haute en couleur et complètement chaotique que l'auteur déversait encore et encore. C'est finalement un tour de force osé, il n'y a pas de doute. Mais de plaisir de lecture, je n'en ai eu que très peu. C'est peut-être un livre qu'il faut lire deux fois, comme j'avais fait pour Blindsight de Peter Watts. Seulement là, il n'y avait pas l'obstacle quasi insurmontable du vocabulaire exotique surabondant. Il est certain que je comprendrais mieux au second passage — rien que pour écrire ces quelques lignes, j'ai parcouru quelques pages de nouveau et c'était déjà nettement plus clair —, mais vraiment, je n'en ai aucune envie et j'ai d'autres livres qui m'appellent et qui, j'espère, seront plus jouissifs à lire.
- Parmi les commentaires de lecteurs sur Amazon quelqu'un qui dit être Indien affirme que McDonald se trompe sur un tas de détails qu'un natif aurait vus tout de suite. Il déplore qu'il n'y ait eu personne chez l'éditeur pour proposer des corrections. Je ne sais pas si ce qu'il dit est vrai mais je sais que quand un auteur anglo-saxon s'aventure dans le domaine de la France ou du français, c'est souvent très approximatif, donc ça me paraît crédible. Cela dit, ça n'a aucune importance, s'agissant d'un texte de fiction situé dans l'avenir, dont on ne sait rien de toute façon. L'ambiance y est sûrement, et c'est ça qui compte.↑
Commentaires
Hum…
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