Keep Watching the Skies! nº 8, juillet 1994
Christopher Evans : Aztec century
roman de Science-Fiction inédit en français ~ chroniqué par Patrick Marcel
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Depuis la conquête du Royaume-Uni par les armées aztèques, Catherine, princesse d'Angleterre, a trouvé refuge dans une vallée perdue du Pays de Galles, où son mari travaille à une arme informatique contre l'envahisseur. Mais alors qu'ils vont fuir vers la Russie alliée, Catherine et sa sœur Victoria sont capturées et ramenées à Londres. Dès lors, Catherine va tenter de s'opposer de tout le poids de sa fonction à l'hégémonie aztèque représentée par le gouverneur Extepan, futur héritier de l'Empire.
On doit déjà deux romans à l'anglais Chris Evans, en particulier Chimeras, intéressant ouvrage de Fantasy. Dans Aztec century, il se livre aux délices des univers parallèles. On comprend, au fil du livre, que si les Aztèques (terme générique, voire raciste employé par leurs ennemis pour décrire l'alliance sud-américaine), si les Aztèques donc ont conquis une grande partie de l'Europe, c'est par la conjonction d'une épidémie virulente de vérole qui a décimé le Vieux Continent et retardé les expéditions de conquête, et par la trahison de Cortès, par amour pour une belle indienne. Dès lors, les Aztèques déploient leur civilisation brillante et guerrière et entreprennent de soumettre le monde.
L'intérêt du livre d'Evans, au-delà d'un roman d'univers parallèle bien mené et inventif, réside en deux lignes d'interprétation sous-jacentes. D'abord, le fait que cette hégémonie aztèque, par ses effets, n'est finalement pas trop différente de notre onde sur bien des points (l'invasion des films d'Acapulco, les fast food MexTaco). L'étrangeté des noms mexicains devient vite un moyen de rendre sa visibilité à l'invasion culturelle américaine qui existe en Grande-Bretagne — il n'y a pas que là mais l'auteur se préoccupe du Royaume-Uni en priorité, évidemment. Ensuite, parce que l'hégémonie aztèque pose vite problème à la princesse Catherine. Résolue à s'y opposer de toutes ses forces, elle découvre que les Aztèques ont la religion de la conquête mais que les pays soumis ne se débrouillent finalement pas trop mal sous leur joug. Ambiguïté d'une invasion où les ennemis se révèlent gestionnaires doués. Où est le chemin du devoir : collaborer ou résister ? Une visite incognito montrera à Catherine que la famille royale ne jouit pas d'un grand prestige auprès de populations plus soucieuses de vie et de survie quotidiennes. Evans gère habilement ces deux lignes thématiques : elles restent discrètes, secondaires. Mais elles sont là, pour plaisamment agacer les réflexions du lecteur.
Bref, un roman de Science-Fiction comme on les aime : style agréable, personnages crédibles et intéressants, climat exotique et dépaysant… Épatant.
