Keep Watching the Skies! nº 8, juillet 1994
Francis Berthelot : l'Ombre d'un soldat
roman ~ chroniqué par Éric Vial
→ Chercher ce livre sur amazon.fr
Ce n'est pas de la S.-F., ni du Fantastique. Encore que, si dans les romans de littérature générale les enfants sont autorisés à parler à leurs jouets, ceux-ci n'ont guère coutume de répondre, même comme supports d'un monologue intérieur. Il y a donc un peu de merveilleux qui se glisse dans l'étude psychologique et dans la reconstitution historique. Et puis, pourquoi ne pas signaler le premier roman de “littérature générale” de quelqu'un qui a largement parcouru les domaines qui nous intéressent ici, du space opera à l'étude historique, en passant par l'Heroic Fantasy, l'exploration métaphorique de l'imaginaire et la transposition des événements réels…
C'est donc une histoire d'enfance, de construction d'une identité, dans un trou perdu de la Drôme, dans les années cinquante (soixante ?). Une histoire de secret de famille, de secrets ruraux, une histoire de parents qui se haïssent, de commérage, de mère tondue à la Libération, de gosse qui cherche à savoir, à comprendre. Qui part, pour trouver, sans savoir bien ce qu'il trouve. Une histoire étouffante, comme un village. Une histoire qui n'est pas tout à fait cohérente parce que l'enfant apprend — officiellement en classe — ce qu'il sait, ce qu'il exprime, ne cadre pas toujours parfaitement avec ce qu'il est censé être, avec la date à laquelle il est censé l'être, avec même son milieu. Ce n'est d'ailleurs pas grave, parce que le récit est à la fois relativement bref et bien maîtrisé, parce que même si l'on devine vite une partie de la vérité, on n'en devine justement qu'une partie, parce que l'on “marche” finalement.
En profitant de l'élan des causeries matutinales francinteresques et approximatives d'un Amouroux, ou de la réédition en poche (chez Hachette Pluriel) du livre d'Alain Brossat les Tondues, un carnaval moche, le roman de Berthelot aurait pu être un peu plus mis en avant. Il ne semble pas que ce soit beaucoup le cas. C'est dommage. Alors, s'il échappe à beaucoup autant le signaler aux amateurs de S.-F. ou d'Heroic Fantasy, qui avaient aimé ce qui a précédé : ce sera toujours ça !
