Alain le Bussy : Équilibre
roman de Science-Fiction, 1997
- par ailleurs :
L'eau est un élément qui réussit à Alain le Bussy. Équilibre est le meilleur roman que j'aie lu de lui au Fleuve noir depuis sa trilogie amorcée par Deltas, mais, cette fois, il passe d'un monde presque entièrement recouvert par un océan — à l'exception de quelques mini-continents — à un monde qui rappelle la planète Plateau de Larry Niven…
Dans Équilibre, un lac étroit sur une planète presque déserte sert de ligne de partage entre les domaines interstellaires des Humains et d'une espèce extraterrestre appelée les Fillts, en pleine expansion. (Ne nous posons pas trop de questions sur le sens littéral ou symbolique de la chose — l'orientation dans l'espace du lac à la surface d'une planète animée de plusieurs mouvements simultanés ne semble pas vraiment convenir à une démarcation permanente.) Ce lac coupe en deux un plateau qui constitue l'unique région habitable de la planète Freeman. D'un côté du lac vivent les Fillts, encore mal connus, à la fois craints et méprisés. De l'autre côté vivent les quelques colons humains, qui peinent à ne pas tomber en deçà du quota fixé par le traité assurant le partage des étoiles. Le pacte d'équilibre garantit la paix, même si cela ne va pas sans grincement de dents surtout du bord des Humains, qui se sentent injustement lésés malgré l'évidente supériorité technique des Fillts.
Néanmoins, à son arrivée sur Freeman, le docteur Claude Smith ne pense qu'à éviter le retour sur son monde natal, Pureté, dominé par une religion oppressante. Ce n'est que par hasard qu'il se retrouvera mêlé à un enchevêtrement d'événements et de conspirations visant à rompre l'équilibre… ou à en instaurer un nouveau. Par hasard… ou un peu par amour pour Jenny, née sur Freeman et intimement mêlée à tout cela.
Bref, c'est de la SF carrée et classique, qui ne casse rien, mais qui, jointe à une histoire bien remplie de péripéties diverses, conserve l'attention du lecteur jusqu'à la fin. Dans un cadre plus généreux que dans ses romans antérieurs — le livre dépasse les trois cents pages, après tout —, Alain le Bussy est en mesure de superposer les intrigues et les péripéties, les lieux et les personnages, en prouvant que, lorsqu'il s'y met, il est de loin supérieur comme écrivain à ce que certains de ses efforts antérieurs pour le Fleuve noir pouvaient indiquer. Équilibre est un roman plus qu'honnête, sans non plus prétendre au statut de chef-d'œuvre immortel, et il permettra aux voyageurs de passer deux ou trois heures agréables s'ils l'achètent en gare.
Enfin, il s'agit aussi du premier roman des nouvelles collections SF du Fleuve noir que j'aie eu l'occasion d'examiner de près. De fait, la maquette est devenue plus moderne : le quatrième de couverture comporte désormais une photo de l'auteur, une courte bio de celui-ci et un résumé alléchant de l'intrigue. En couverture, j'aime bien l'illustration spatiale de Willis, qui présente cependant le désavantage de paraître excessivement sombre en raison de la maquette aux tons de gris tirant aussi sur le noir. Le tout est peut-être moins séduisant que les maquettes bleues de l'ère Philippe Hupp, mais sans doute plus efficace et plus résistant aux manipulations. Espérons que cette nouvelle esthétique aura la chance de s'imposer.
Commentaires
Les commentaires sont publiés après validation par Quarante-Deux.