KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Bram Stoker : la Palissade rouge

récits fantastiques réunis en français en 1997

chronique par Philippe Paygnard, 1998

par ailleurs :

L'année 1997 marque le centenaire d'une des œuvres phares de la littérature fantastique : Dracula. Dans le monde de l'édition, cet événement a été marqué par la publication de plusieurs monographies consacrées au personnage. Il semble cependant que l'on ait oublié d'honorer comme il se doit le créateur du plus célèbre des vampires littéraires : Bram Stoker. Ce sont deux véritables spécialistes, Jean-Pierre Krémer et Alain Pozzuoli, qui viennent, avec cette Palissade rouge, réparer ce tragique oubli.

Il est certainement inutile de rappeler — mais faisons-le quand même — que Jean-Pierre Krémer, qui a traduit et choisi les textes et cosigne l'avant-propos, est le traducteur de plusieurs des meilleures nouvelles écrites par Bram Stoker. On peut ainsi retrouver son travail dans les recueils Au-delà du crépuscule (Séguier, 1989), l'Invité de Dracula (10|18, 1992) et Récits gothiques (Fleuve noir, 1994). Alors que l'autre signataire de l'avant-propos et auteur de la postface biographique, Alain Pozzuoli, est l'un des plus passionnés biographes de Bram Stoker, auteur notamment d'un excellent Bram Stoker, prince des ténèbres (Séguier, 1989).

Au travers des sept récits qui composent ce recueil, Krémer et Pozzuoli ont choisi de présenter quelques aspects méconnus du romancier que fut Bram Stoker. Célébré pour un seul et unique roman : Dracula, Stoker est pourtant l'auteur de plus d'une douzaine d'ouvrages, sans compter plusieurs dizaines d'articles, des nouvelles et de nombreuses adaptations théâtrales. C'est cet homme à facettes que tente de nous présenter la Palissade rouge.

Seule concession faite à la tradition, on retrouve au sommaire de ce recueil "l'Invité de Dracula", qui semble n'être qu'une nouvelle variation de son roman vampirique. Il s'agit en fait des premières pages écrites par Stoker pour son Dracula ; elles furent refusées par l'éditeur déjà impressionné par le poids du manuscrit.

Ouvrage consacré à Bram Stoker, la Palissade rouge débute pourtant par un récit qui n'est pas écrit par le romancier. En effet, le texte d'ouverture est une lettre de Charlotte Stoker à son fils Abraham (Bram). Loin d'être inutiles, ces quelques feuillets nous montrent, d'une part, que l'auteur de Dracula avait de qui tenir. D'autre part, ils prouvent que l'époque n'était pas rose et qu'il n'y avait nul besoin de vampire pour décimer villes et villages. Accessoirement, ils constituent fort certainement la source d'inspiration de la première nouvelle présentée dans ce recueil : "le Géant invisible".

Rassurons immédiatement le lecteur, les autres textes de ce recueil sont bel et bien signés de la main de Bram Stoker. Ils permettent de découvrir un écrivain différent, très éloigné du seul auteur de Dracula. Écrivain moraliste avec "le Géant invisible", Bram Stoker démontre également qu'il sait jouer — ou déjouer — des influences de Lewis Carroll avec sa nouvelle "Comment 7 devint fou" ou de Robert Louis Stevenson avec "la Palissade rouge".

"La Catastrophe" et "le Mystère de la mer" ne sont hélas que des morceaux choisis de romans de Stoker, encore inédits en français, qui révèlent certainement les talents d'écrivain de Stoker mais laissent le lecteur sur sa faim.

Cette véritable introduction à l'œuvre de Bram Stoker est agréablement complétée par l'essai d'Alain Pozzuoli, "Bram Stoker : une vie", ainsi que par les bibliographie, filmographie et chronologie de Bram Stoker moultement documentées.

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