D. Morlok : le Clan du Grand Crâne (la Saga de Shag l'Idiot – 1)
roman de Science-Fiction, 1998
- par ailleurs :
Allez, enlève ton faux-nez, Brubru, on t'a tout de suite reconnu ! Dès la deuxième page, on dérape dans l'imparfait de répétition, du temps imprécis des souvenirs vagues et des légendes, et quoi de plus brussolien que cela, surtout quand on sait qui était à l'époque directeur de la collection "Présence du futur" — déjà démissionnaire quand le livre est sorti, mais bon ! Les premières pages du roman sont un florilège de stupidité tellement crasse qu'on a envie de les citer en intégralité. C'est trop drôle. « Toi, Morgo, l'autre nuit, j'ai bien vu que tu ne savais même plus comment t'y prendre pour copuler avec ta femme. Elle a dû t'aider… et pourtant nous savons tous que les femelles ont encore moins de cervelle que les mâles »
. Ces propos, naturellement, sont placés dans la bouche d'un crétin patenté, chef de clan poilu et baraqué.
Ce qui ne reste pas drôle longtemps, c'est la façon dont Brussolo insulte l'intelligence, non seulement de nos ancêtres préhistoriques — il esquisse même à un moment une corrélation entre pilosité et perte d'intelligence ! —, mais aussi de son lectorat, qu'il a ici supposé jeune (le prix du livre, les remarques faites à certains auteurs quand on leur refusait leurs ouvrages), et assez crétin pour prendre de la SF pour de la Fantasy, à condition qu'on s'y estourbisse à coups de gourdin. Plus le roman avance, plus il relève d'une SF pure (mais singulièrement peu réfléchie), et fantasmatique, comme celle dans laquelle Brussolo peut exceller. Il y a même sur la fin des scènes surréalistes de batailles rangées de robots qui peuvent valoir le détour. Si l'on est suffisamment pervers, ou suffisamment fasciné par l'univers littéraire indubitablement unique de Serge Brussolo, même quand il commet une œuvre de commande. Rendons-lui cette justice que la commande a probablement été passée par lui-même, et qu'il a pondu cette horreur sans doute dans l'idée que cela profiterait au redressement commercial de l'éditeur qui l'employait : car je suis sûr qu'il aurait gagné plus d'argent en écrivant une quantité équivalente de pages sous son propre nom, qui conditionne la loyauté d'un important lectorat.
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