John Varley : Gens de la Lune
(Steel beach, 1992)
roman de Science-Fiction
- par ailleurs :
Premier constat, l'impression en lisant, sans effort, ces presque sept cents pages d'y trouver matière à au moins quatre romans d'auteurs français… Deuxième constat, ce n'est pas parce que l'on complique le récit d'intrigues diverses qu'on le rend illisible.
Varley nous présente un monde à travers le regard d'un(e) journaliste. Un monde sur la Lune puisque la Terre est nettoyée des Humains depuis que les extraterrestres sont venus, mais un monde où l'on a reconstitué des lieux et des modes de vie terrestres, et qui est géré par un ordinateur super-puissant. La fonction du personnage principal est très importante, d'une part parce qu'il/elle dispose de moyens de comparaison entre les deux mondes, et d'autre part parce qu'il est curieux et peut enquêter.
Varley ne se contente pas de jouer les Montesquieu ou les Voltaire en mettant ses commentaires critiques dans la bouche du héros observant un monde extérieur (les “sélénites” sont bien depuis longtemps des “gens” qui aiguisent notre curiosité et notre imagination). Il s'inquiète des effets de ce monde sur les Humains. Ceux qui en sont prisonniers — par force — et ceux qui ont tenté de tourner les contraintes…
Un monde où l'on peut changer de sexe à volonté, où la mort est “impossible”, finit par devenir un monde ennuyeux et la seule distraction se trouve dans la “lecture” presque en continu de la presse ; au point que lorsque l'info vient à manquer, c'est une catastrophe. Les vivants ont une tendance croissante au suicide et les dissidents développent une certaine liberté.
Bien sûr, Varley se veut convaincant et son personnage est attachant malgré un cynisme exacerbé. Un cynisme qui laisse le lecteur sur la défensive et lui permet de considérer la galerie de portraits et de situations avec un œil critique. Disons que Varley parvient — sans doute parce que le roman est écrit à la première personne — à nous montrer ce qu'il veut sans que nous soyons prisonniers de son monde. Il nous laisse, comme à son héros, le soin de notre lucidité…
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