Vous souvenez-vous du feuilleton télévisé V ? On voyait, avec les yeux des bons et braves Terriens résistants, des extraterrestres envahisseurs. Patricia Anthony nous propose des envahisseurs pacifiques installés depuis bien longtemps sur Terre — au moins depuis la fin de la Deuxième Guerre —, qui tentent de pérenniser leur race par le biais d'enfants mixtes. Le tout décrit par un extraterrestre. Tentative audacieuse que celle de se mettre dans la peau d'un monstre !⁽¹⁾ Le problème de l'anthropomorphisme est détourné sans l'être puisque notre personnage principal, celui qui raconte, est contaminé par le comportement humain et se plaint même de cette contamination…

Comme dans la Guerre des mondes, les envahisseurs disparaissent. Mais ce qui les chasse ici, ce n'est pas un microbe, une maladie, c'est le caractère des Humains. Des Humains querelleurs, paranoïaques, cruels, irresponsables — voir les passages à propos du président des États-Unis qui vit grâce à ses médiums et au whisky — au point que les “termites” en deviendraient sympathiques si eux-mêmes ne se disputaient le pouvoir à coups de trahisons.

Un étrange roman qui, refermé, laisse une impression de noirceur, de pessimisme que n'atténuent guère les séquences qui paraissent humoristiques. Seuls peut-être les extraterrestres échappent-ils à ce désespoir dans la mesure où ils vont retrouver leur planète d'origine. Mais à nous, pauvres Terriens, Patricia Anthony ne dit rien de notre avenir une fois notre indépendance retrouvée, et l'on est contraint de penser qu'extraterrestres ou pas nous continuerons à nous comporter comme elle l'“imagine”…