Joe Haldeman : la Paix éternelle
(Forever peace, 1997)
roman de Science-Fiction
- par ailleurs :
Un Hugo et un Nebula ont récompensé aux États Unis ce roman qui risque de passer inaperçu en France pour cause de parution tardive (juste avant l'été). Ce serait regrettable. Haldeman propose deux histoires en une seule par le biais des “aventures” d'un héros noir, Julian Class, qui est à la fois soldat et universitaire chercheur. Deux histoires, et trois réalités.
Le monde de la guerre, côté Sud, où les latinos jouent aux terroristes, et côté Nord, où l'on utilise des corps guidés par des “rêveurs” ; le monde des universitaires qui cherchent et trouvent ; et le monde de l'Amérique : famille éclatée, racismes, mafia. Le tour de force de Haldeman est de maîtriser de manière dynamique ces trois mondes. Sans nous ennuyer un seul instant en digressions didactiques, mais sans faire de son personnage un superhéros. Les sentiments “humains” (relation amoureuse, les valeurs morales opposées aux données politiques), la recherche scientifique, le petit microcosme des individus opposés à la macro-économie, donnent la dynamique de ce roman qui se lit d'une seule traite.
Jusque-là nous sommes dans le bon roman classique, savamment dosé entre péripéties et descriptions vivantes. Mais Haldeman distribue son récit sur deux niveaux : l'un à la première personne (Julian Class parle), l'autre en adoptant le point de vue omniscient d'un “Dieu” non nommé. L'auteur nous force ainsi à reconsidérer l'histoire classique en lui trouvant une finalité autre qu'elle-même, et nous oblige à nous interroger comme son héros sur la globalité du monde, et non plus sur notre petit univers personnel. C'est sans doute la meilleure façon de dépasser un pessimisme mou conduisant au laisser-aller.
Il serait vraiment dommage que ce livre, qui aide à se remettre en cause, ne trouve pas le — grand — nombre de lecteurs qu'il mérite.
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