Brian Herbert & Kevin J. Anderson : la Maison des Atréides (Avant Dune – 1)
(House Atreides, 1999)
roman de Science-Fiction
- par ailleurs :
« Et aux millions de fans de Dune, qui maintiennent la célébrité de Dune depuis trente-cinq années. »
Il s'agit de la dernière phrase des remerciements adressés par les auteurs. J'avoue humblement ne pas faire partie de ces millions mais je ne peux cacher le plaisir certain éprouvé à lire les cinq cent quatre-vingt-huit pages d'aventures, de complots, de moments denses que les auteurs, sur les traces de Frank Herbert, nous proposent — la différence de pagination correspond à un glossaire, à une postface et à des remerciements.
Curieux livre qui transpose des grains de culture dans un univers de SF parfaitement maîtrisé. Cela va des Chasses du comte Zaroff à Macbeth et Richard III en passant par Hemingway (Corrida et le Vieil homme et la mer) et Eschyle bien sûr — j'en oublie sans doute ; les lecteurs attentifs ajouteront leurs références —, mais sans que jamais la citation prenne le pas sur ce qui s'instaure. Puisque nous sommes “avant Dune”, c'est le décor qui s'installe. Et sur fond de querelles, les alliances, les marchandages et les luttes intestines mettent en place les éléments des tragédies et événements à venir.
Avec le savoir-faire des auteurs anglo-saxons, Herbert le jeune et Anderson l'adjoint tissent au fil des pages des portraits de personnages en situation et les grandes lignes de ce qui a déjà suivi. Ils font par le biais de ses acteurs le portrait d'une société aux règles précises où l'honneur et les honneurs ont un rôle aussi important que le Mélange qui assure la longévité de ceux qui ne tombent pas sous le coup des trahisons et des vengeances. L'exercice était difficile. Écrire un roman avec des personnages dont on sait déjà quel est le destin, raconter une histoire alors que le lecteur sait déjà qui est important et qui ne l'est pas. C'est à mon sens pleinement réussi et c'est tant mieux : ainsi le nombre de fans ne pourra que croître et Dune et ses suites trouver de nouveaux lecteurs… C'est d'autant plus réussi que le lecteur est emporté dans le tourbillon bien construit des épisodes (chaque personnage revient à point nommé pour faire avancer l'histoire et faire oublier un temps ce qu'un précédent chapitre avait mis en place) où s'affrontent les Maisons rivales à cause de ceux ou celles qui les représentent. Leto, prince Atréide, sera plus rusé que le baron Harkonnen, qui dispose pourtant d'une technologie supérieure. Leto, animé par la foi en l'honneur et aidé par son Mentat, déjouera les plans des fauteurs de guerre ; d'un autre côté, Kynes le planétologue trouvera au sein des Fremens un destin de prophète. Éternel triomphe du Bien sûr le Mal (?), même si le nouvel empereur semble plus maléfique.
Ainsi, par la grâce de Frank Herbert, le destin des personnages est déjà en place ; ils ne peuvent y échapper, mais ses dignes suiveurs ne peinent pas à justifier ces destins, cette machinerie. Les auteurs deviennent les Parques, les trois sorcières de Macbeth qui annoncent la chute lorsque la forêt se mettra en marche… les entités qui déterminent la vie et la mort des pantins plus ou moins vivants qui s'agitent sur la scène du petit théâtre qu'est le monde qu'ils inventent. On retiendra, puisqu'il s'agit d'un monde en gestation, le grand nombre de naissances et le rôle important joué par les enfants ou les jeunes gens, et l'on s'attachera peut-être au personnage de Duncan qui bien sûr jouera par la suite un plus grand rôle.
Vous pouvez rejoindre sans risque de déception les fans de Dune : cet Avant est à la mesure de ce qui suit, au moins par le biais du traducteur (Michel Demuth), qui a retrouvé le même ton…
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