KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Danielle Martinigol : les Abîmes d'Autremer

roman de Science-Fiction pour la jeunesse, 2001

chronique par Noé Gaillard, 2001

par ailleurs :

« Les Abîmes d'Autremer est un roman dont l'univers et les personnages tiennent particulièrement à cœur à Danielle et qu'elle portait en elle depuis des années. » nous informe la page consacrée à la présentation de l'auteur. Si la troisième partie de la phrase suggère un lent mûrissement de l'œuvre et l'idée d'un aboutissement, le roman traduit cela à merveille. Nous savions tous que depuis ses trois premiers livres Danielle Martinigol était un auteur non négligeable de productions destinées à la jeunesse, avec celui-ci non seulement elle confirme son talent de conteuse mais elle livre une œuvre forte et dense comme on aimerait en trouver plus souvent dans ces collections parfois un peu bébêtes.

Pour moi, la force de ce roman vient du fait que l'intrigue écologique pourrait très bien être celle d'un roman pour adulte et que son traitement — loin d'être infantile ou trop intellectuel —, en utilisant les sentiments des personnages plus que les astuces et les ruses tordues des adultes, nous oblige à réagir. Ainsi l'héroïne de l'histoire, la jeune Sandiane, mi-Agrippine — voir Brétécher —, mi-chipie, mais aussi ambitieuse qui veut devenir grand reporter, est un condensé de tout ce que son monde (celui des médias où les gens de plus de trente ans sont parqués et considérés comme des vieux) peut produire de négatif. Mais comme c'est aussi un être sensible et capable d'aimer, elle devient une exception qui réconcilie les parties en présence. D'un côté ceux qui voyagent dans des navires de l'espace construits de main d'homme, et de l'autre ceux qui fusionnent dès leur plus jeune âge avec les habitants d'une planète, et qui demeurent pilotes de ces navires jusqu'à leur mort…

Sandiane découvre un monde et si son désir de devenir reporter numéro un l'entraîne à des écarts, des imprudences qui menacent ce monde, son “humanité” en fait un fervent défenseur de ce qu'elle apprend à aimer, parce que l'on s'occupe d'elle au lieu de l'utiliser.

Grâce à des ellipses et de brefs “reportages” sur le monde des adultes sans scrupules, Danielle Martinigol égratigne tout ce qui nie l'individu, de la presse à la politique en passant par l'économie…

Il serait tout à fait normal, à mon avis, que ce roman soit couronné par quelque(s) prix(1) et trouve les lecteurs qu'il mérite.

Noé Gaillard → Keep Watching the Skies!, nº 39, juin 2001


  1. Le Grand Prix de l'Imaginaire 2002, par exemple. — Note de Quarante-Deux.

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