Serge Brussolo : le Jour du chien bleu (Peggy Sue et les fantômes – 1)
roman fantastique pour la jeunesse, 2001
- par ailleurs :
Il fallait bien quelqu'un pour relever le défi Harry Potter et j'avoue que devant la déferlante de l'apprenti-sorcier, sans avoir lu une ligne de ses aventures, je me suis précipité sur notre auteur national. Sans être un fanatique de Brussolo, je dois lui reconnaître au moins deux réussites : quelques titres remarquables et agréables à lire et un plan de carrière qui l'a propulsé dans les hautes sphères éditoriales. J'étais donc en droit d'attendre un produit de qualité et un plaisir de lecture certain… Hélas, trois fois hélas, il n'en fut rien. (Fort heureusement, ma découverte tardive de Harry Potter vint effacer mes déceptions.)
Peggy Sue — que les nostalgiques de Buddy Holly ou les cinéphiles célibataires ne reconnaîtront pas — est ici une jeune fille qui a la faculté désagréable de voir les fantômes à travers ses lunettes magiques, et de découvrir leurs monstrueux agissements, les malins plaisirs qu'ils prennent aux dépens des humains. Les fantômes considèrent Peggy Sue comme un trouble-fête qu'il faut pousser au suicide ou faire mourir accidentellement. Jusque-là rien à reprocher : l'idée, à défaut d'être originale, est intéressante et prometteuse. À condition que son exploitation se fasse en finesse et sans omettre un certain réalisme. J'ajouterai — pour ma part et après lecture de Potter — une touche d'humour ou/et une solide déclinaison des idées délayées dans un style irréprochable.
Hélas, trois fois hélas‥! et cela me semble un des tics récents de Brussolo, une écriture trop rapide, et dont manifestement on a laissé à d'autres le soin de la relecture, fournit un texte pénible à lire où les idées arrivent un peu comme des cheveux sur un brouet insipide. De plus — et les fidèles lecteurs du maître ne me contrediront, pas je crois —, on a un peu l'impression que Brussolo recycle sans vergogne quelques vieilles trouvailles (les canapés de cuir qui redeviennent les animaux dont ils ont pris la peau) et oublie de soigner ses images : leur existence semble lui suffire.
Je ne sais pas vraiment ce qui attire un lecteur juvénile vers un livre plutôt que vers un autre — je pense que l'influence des parents ou des enseignants revêt en l'occurrence une certaine importance — mais je crois pouvoir affirmer que si Harry Potter marche aussi bien, au point d'engendrer autant de produits dérivés, c'est parce qu'il ne se moque pas du lecteur et n'omet rien de ce qui peut l'intéresser. Les adultes se laissent emporter par H.P. — au moins par les jeux de mots — et donc valorisent l'œuvre auprès des “enfants”. Or Brussolo manque singulièrement d'humour… et d'une certaine tendresse qui pourrait rendre Peggy Sue sympathique.
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