KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Jean-Pierre Andrevon : Tous ces pas vers l'Enfer

nouvelles fantastiques et de Science-Fiction, 2008

chronique par Noé Gaillard, 2009

par ailleurs :

Sous une couverture illustrée par l'auteur, huit nouvelles, dont trois inédites. À lire en huit épisodes, sous peine de saturation d'autant plus horripilante que comme on le sait, quand il s'en donne la peine, Andrevon est un remarquable styliste.

"Dans le train" (inédit) : le lecteur avisé ou amateur du genre devinera aisément la chute du texte, mais ce n'est pas un problème. Ce n'est pas la chute qui compte mais les images qui y conduisent…

"Une Enfant perdue" (1991) : de l'influence des catastrophes et de la solitude humaine sur le comportement des femmes… Surtout ne pas généraliser, se contenter de s'en servir pour se poser des questions (petit bijou de second degré). Avec comme un écho de Supervielle.(1)

"Le Sacrifice" (inédit) : quand il suffit de faire sauter un chaînon pour que tous les garde-fous sautent. Personnellement, je trouve que ce texte fait écho au précédent avec les distorsions produites par la punition de la nymphe.

"Si nombreux !" (2000) : quand l'Andrevon poétique rencontre l'Andrevon politique. Une violence et une tendresse effrayantes…

"Le Cimetière de Rocheberne" (1982 & 2008) : écho (!) au premier texte et comme lui, pour moi, légèrement en dessous des autres. J'y ai vu beaucoup moins de second degré. L'idée est moins marquante ; reste au moins le style.

"Des Vacances gratuites" (inédit) : l'apprentissage du purgatoire ou l'art de la putréfaction morale et physique qui met en évidence la vanité de toute entreprise humaine. Heureusement qu'il y a un peu d'humour (noir).

"T'as pas fini d'en baver" (1996) : pensées mortuaires, dernière veillée sur son propre corps. Cynique en diable. Tout ce qu'il faut pour donner envie de jouer les Tatie Danièle ou les Dennis la Peste.

"Il suffit d'un rien" (2001) : mono-dia-logue à propos de la mort, soliloque du pauvre d'esprit… Souvenir de Théophile Gautier ?

On aime ou on n'aime pas Andrevon — en me rangeant dans les premiers, je plains les seconds qui ne savent pas ce qu'ils perdent. Andrevon est un auteur pervers. Son style, son phrasé séduisent au premier degré, à moins d'être insensible à la sonorité de la plainte. Mais la ligne mélodique, l'air de la chanson me fait l'effet d'Éric Satie, un air de légèreté grinçante qui vous incite à vous poser des questions, à réfléchir sur la “portée” du texte (!). Lu d'un trait, ce recueil donne une impression de redondance et de répétition ; le compte-gouttes laisse le temps aux mélodies de s'interpénétrer et de composer autre chose, plus effrayant parfois que les textes eux-mêmes…

Noé Gaillard → Keep Watching the Skies!, nº 62-63, juillet 2009


  1. Cette référence, comme celle à Gauthier qui suit, ne vise pas à diminuer le talent d'Andrevon, bien au contraire. On doit y voir des incitations à lire.

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