KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Domingo Santos : el Día del dragón

roman de Science-Fiction inédit en français, 2008

chronique par Jacques Fuentealba, 2009

par ailleurs :
 

El día del dragón se présente avant tout comme un roman d'anticipation et de politique-fiction qui traite de nombreux thèmes du cyberpunk, sous-genre cher aux Espagnols, mais sans être teinté de tous les stéréotypes attendus.

Le lecteur suit un moment-clé de l'existence d'Eugen Kirzner, dirigeant de la MTT, un des cinq plus grands conglomérats contrôlant l'économie mondiale. La MTT est en charge de l'information, des médias et des communications. Elle abreuve gratuitement la population avec les émissions de son Écran Public, omniprésent.

Le futur selon Santos est vraiment peu réjouissant, mais d'une clairvoyance (tout au moins d'une vraisemblance) à faire froid dans le dos. La pollution, l'abdication des pouvoirs publics face à la toute-puissance des grands groupes économiques, la répartition révoltante des richesses, la décadence et la chute de la civilisation, le flicage et le bâillonnement des pensées dissidentes, l'injustice sociale à la puissance n par rapport à notre époque… Le roman traite de tout cela avec finesse, sans démagogie ou manichéisme simplet.

On suit un personnage assez abject dans sa façon de voir les autres, de considérer et de contrôler le monde qui l'entoure, mais l'auteur réussit le tour de force de nous attacher à Eugen sans jamais nous le faire paraître sympathique.

La structure du récit, le rythme s'avèrent classiques mais efficaces. On retrouve l'habituelle descente aux enfers pour le protagoniste, qui le met face à ses démons mais permet aussi au lecteur de découvrir d'autres facettes de ce futur de cauchemar. Plus le récit avance et plus l'obsession d'Eugen envers le Dragon (ce symbole graffité un peu partout) prend de l'ampleur et décuple sa paranoïa.

Santos nous entraîne dans des ambiances proches de celles de l'Armée des douze singes. Il nous tient et ne nous lâche pas, jusqu'au dénouement de son roman.

En résumé, un roman qui pointe vers un futur effroyable et vise juste. Une intrigue solide, un personnage convaincant auquel on s'identifie sans mal malgré son immoralité, le tout servi par une écriture vive et fluide. Après près de quarante ans de bons services dans le milieu de l'édition espagnole, comme éditeur, traducteur, anthologiste, rédacteur en chef et écrivain, l'auteur du mythique Gabriel : histoire d'un robot (1962), véritable institution en Espagne — il a même un prix à son nom ! — revient au roman, pour le plus grand plaisir de ses aficionados.

Jacques Fuentealba → Keep Watching the Skies!, nº 62-63, juillet 2009

Commentaires

Ajouter un commentaire

Les commentaires sont publiés après validation par Quarante-Deux.