Ayerdhal : Résurgences
roman policier de Science-Fiction, 2010
- par ailleurs :
À mon avis, on aime ou on n'aime pas Ayerdhal mais on ne peut lui nier ses qualités d'écrivain. Étrange, j'ai l'impression d'avoir déjà écrit cette phrase à propos du même. Il n'empêche, je la maintiens. Donc, on aime ou pas et pour la même double raison : d'une part, il peut lui arriver d'être politiquement incorrect, et d'autre part, il peut donner l'impression d'une certaine insolence — sur le plan des idées comme sur celui de la forme par sa grande fluidité d'écriture ; je dirais que cette qualité relève d'un travail sérieux qui traduit un grand respect du lecteur.
Suite et peut-être pas nécessairement fin de Transparences (Prix Polar Michel-Lebrun et Grand Prix de l'Imaginaire), Résurgences (eaux d'infiltration qui remontent à la surface) reprend les mêmes personnages, leur adjoint un tueur particulier aux qualités professionnelles exceptionnelles et laisse remonter les bribes de passés nécessaires. Naïs/Ann X est menacée et gravement blessée. Elle rencontrera son tueur avant qu'il ne soit arrêté mais le délivrera — on sait le personnage riche et complexe…
Mais Ayerdhal ajoute une touche finale particulière à partir du personnage de Michel le SDF militant, une touche qui fait référence à deux articles de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme — ne partez pas ! —, le 25.1 et le 14.1 sur des sujets qui n'ont rien d'exotique.
Quel intérêt ? Sur le plan romanesque les qualités d'embrouille d'Ayerdhal rendent l'œuvre plaisante. Par “embrouille”, j'entends cette faculté de faire perdre de vue au lecteur les données de base qui nouent l'intrigue. C'est un peu moins flagrant que dans Transparences. Sur le plan humain, et comme dans Demain, une oasis, Ayerdhal nous renvoie à nous-mêmes. Il nous contraint indirectement à nous demander ce que nous avons fait. J'allais dire qu'il nous donne un peu mauvaise conscience — par le biais du personnage de Michel et des journalistes — tout en nous donnant l'impression d'être futé lorsque dans l'intrigue nous voyons où il veut en venir. Je vais me permettre une comparaison que certains risquent de trouver un peu osée, voire impertinente. Je vous prie de bien vouloir m'en excuser. En lisant Ayerdhal, j'ai parfois l'impression de lire du San Antonio, les “trouvailles” linguistiques en moins, bien sûr… mais c'est pour moi le même genre d'humanisme, le même genre de rapport au lecteur considéré — même si San Antonio s'en défend — comme un frère à qui l'on dévoile ce qu'il peut voir (rappelez-vous Baudelaire : « …mon semblable, mon frère. »
). L'un comme l'autre dénoncent les rouages d'une société où certains Humains sont totalement dévoyés.
Pour ce qui concerne mon petit monde de Science-Fiction, je suis bien content que ce roman soit dédié in fine à Patrice Duvic, qui a tant fait dans et pour le genre…
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