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Dans la série “Cher lecteur, que ne ferait-on pour toi !”, et parce que l'héroïne de ce roman écoute du Keane — en bon béotien des musiques de jeunes, je ne connaissais pas —, j'ai emprunté Under the iron sea à ma médiathèque. Et je tente de supporter en rédigeant ces lignes… Dernière remarque liminaire : j'ai lu ce roman parce que j'avais fortement apprécié le Combat d'hiver [ 1 ] [ 2 ] du même auteur.

Bref résumé : Anne part à la recherche de sa sœur aînée, disparue depuis un an, et se retrouve dans un pays où les gens ne respirent pas et ont peur de tout ce qui est organique. Dans ce pays vivent aussi des hybrides exilés ou enfants d'exilées et d'autochtones qui sont partagés entre les deux. Aidée par deux autres ados, des hybrides, et un couple passionné, Anne sauvera sa sœur de la mort et la ramènera sur sa Terre.

Il semblerait que ce roman ait du succès auprès des lecteurs auxquels il est destiné. Il faut dire qu'il a obtenu les cautions de Lire et d'Elle. Et cette fois, l'auteur n'aura pas la mienne. Il ne suffit pas de convoquer Charles Perrault et "la Barbe bleue", un auteur de Fantastique pour jeunes qui généralement ne prend pas d'auto-stoppeuse, un pays où tout est aseptisé, une peur vague du nucléaire, Keane, le plaisir des “Nourritures terrestres”, une technologie avancée, l'idée de passage et des amours d'adolescents pour réussir un bon livre. J'ai l'impression que Mourlevat s'est contenté de mettre ses ingrédients dans un grand sac, de secouer et de regarder les séquences s'organiser selon un plan un peu aléatoire. La rencontre avec l'auteur sexagénaire qui considère son dernier roman comme mauvais et qui prend Anne en stop jusqu'à un point de passage entre les deux univers peut servir à présenter la jeune fille. Directement d'abord, par un jeu de questions-réponses, indirectement par le fait que la petite fille de l'auteur et Anne ont fréquenté la même école. Ensuite Anne, qui se sent perdue malgré l'aide d'une “indigène”, fait appel au vieil auteur, qui pénètre au pays aseptisé avec sa propre voiture sans le moindre problème. L'auteur sera défenestré mais Anne récupérera le portefeuille de celui-ci, qui contient la photo de l'auteur et de son épouse Madeleine du temps de leur bonheur… et procure une séquence nostalgie au cours de laquelle Anne regarde la photo avant de lester et de jeter à l'eau le portefeuille. Sur le plan de l'intrigue proprement dite, cela n'apporte rien et s'avère — à mon sens — un peu gratuit, tout comme l'allusion rapide au nucléaire. Les gens du pays aseptisé surveillent l'attitude des Terriens quant à son utilisation sans dire pourquoi.

J'ai eu l'impression que Mourlevat s'empêtrait dans son idée de quête au point de plus ou moins négliger le monde inventé. D'une part, des jeunes sont formés pour aller kidnapper des Terriennes, et, d'autre part, le passage entre les deux mondes ne sert que deux ou trois fois par an. Et surtout, le monde aseptisé n'est absolument pas justifié ; c'est un monde sans Histoire, sans vie, géré par des ordinateurs qui appareillent les individus (à l'aide d'implants sous-cutanés).

En tant que lecteur, je veux bien suivre Anne dans sa recherche mais je veux savoir pourquoi elle se heurte à une usine à tuer — qui ressemble à un camp de concentration — plutôt qu'à une armée de tueurs. J'ajouterai que les péripéties sont cousues de fil blanc et surtout que la façon de s'en sortir tient du miracle littéraire par excellence. Vous voulez la cavalerie ? La voilà qui sort du néant, à point nommé !

On aura compris que la lecture de ce roman ne s'impose guère et qu'elle peut attendre une édition de poche. Ah ! j'oubliais… on peut aussi se dispenser de l'écoute de Keane, qui n'apporte rien de nouveau à la musique.