Patrick Ness : le Cercle et la Flèche (le Chaos en marche – 2)
(Chaos walking – 2: the Ask and the answer, 2009)
roman de Science-Fiction pour la jeunesse
- par ailleurs :
À l'heure où je rédige cette chronique, ceux qui fréquentent assidûment les librairies auront pu remarquer sur les présentoirs à nouveautés la Guerre du Bruit, le troisième et dernier tome de cette trilogie. Je suppose que ceux qui ont suivi jusqu'ici les aventures de Todd et Viola vont s'empresser pour en lire la chute. Pour ma part et pour ne pas déparer ma collection, je pousserai le suspense jusqu'à la parution en poche.
Vous vous souvenez ? La Voix du couteau racontait la fuite en avant de Todd juste avant son anniversaire et son passage de l'état d'enfant à celui d'homme, sa rencontre avec Viola, une jeune fille venue de l'espace — dont le vaisseau est détruit et les parents morts. Fuite devant le maire Prentiss qui veut tuer Todd et s'emparer de Viola. Mais Davy, le fils du maire, blesse gravement Viola et Todd se rend pour qu'elle soit sauvée.
Dans ce deuxième tome, Prentiss a pris sans coup férir la ville de Haven. Il dirige des opérations de maintien de l'ordre mais surtout il sépare les hommes des femmes et organise la distribution du produit (drogue ?) qui permet aux hommes de supporter le Bruit de leur tête qui donne à entendre leurs pensées (on se souvient que les femmes n'ont pas ce bruit). Parmi les guérisseuses qui soignent Viola, Maîtresse Coyle s'oppose à Prentiss.
Il faut dire que, dans la guerre que se sont livrée les Humains et les Spackles (les autochtones), les femmes ont joué un grand rôle et qu'elles reprochent aux hommes de les tenir à l'écart. Ainsi deux camps s'opposent : le Cercle d'une part et la Flèche d'autre part. Avec la formule : je suis le cercle et le cercle est moi. Prentiss maîtrise son Bruit au point d'en faire une arme. Les femmes signent leurs attentats d'une flèche.
Todd doit subir la puissance de Prentiss et les trahisons des faibles tout en cherchant à rejoindre Viola. Elle, de son côté, supporte mal la violence que Maîtresse Coyle organise tout en cherchant à retrouver Todd. Contre son gré, le garçon marque les Spackles comme du bétail et en laisse fuir un.
Bon, j'arrête de jouer les spoilers et je vous explique l'intérêt de ce roman. D'abord, c'est passionnant, difficile à lâcher pour faire autre chose ; ensuite, cela ne prend pas le lecteur pour un imbécile : ça parle adulte. Les personnages ne sont ni des silhouettes, ni de vagues porteurs d'idées : ils sont riches, complexes, pervers et/ou honnêtes au service de quelque idée plus importante qu'eux. Bref, ils sont touchants, énervants, humains même quand ils torturent. Le fait d'avoir un héros et une héroïne à suivre, avec deux points de vue bien distincts, évite l'impression de linéarité, et les passages où l'alternance de ces points de vue est très rapide confondent les deux protagonistes dans un vertige. On sent que l'auteur prend plaisir à écrire, à mener le lecteur par la main sans le laisser souffler et surtout sans lui infliger des leçons moralisatrices parachutées. Les moments où Prentiss et Coyle, les “adultes”, font la leçon à Todd ou à Viola sont glissés dans l'action, et je pense que le lecteur ado les sent bien comme venant des personnages et non comme des cheveux sur la soupe — nous, en revanche… Si vous offrez cette trilogie à un jeune lecteur — un de ceux qui aiment bien lire —, demandez-lui incidemment ce qu'il pense des déformations de mots qui parsèment le texte. J'avoue que si je comprends bien l'accent du “terroir” de Wilf ou Jane dans “J'vé'l prindre”, je perçois mal l'intérêt direct des “sexions” et autres “construssions” ou “vibrassions”… Mais il s'agit là de broutilles qui ne doivent pas vous empêcher de lire…
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