Thierry Jonquet : Vampires
prologue et six premiers chapitres d'un roman policier fantastique inachevé, 2011 [2009]
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C'est une bien étrange affaire qui offre au substitut Guillaume Valjean et au docteur Pluvinage, médecin légiste de son état et poète à ses heures, l'occasion de collaborer à nouveau. Les deux hommes vont devoir faire face à un crime d'une violence extrême puisque le ou les meurtriers encore non identifiés ont procédé, dans les règles de l'art, à l'empalement d'un être humain. Alors que le bon docteur est littéralement fasciné par ce défunt qui a connu les affres d'une lente et insoutenable agonie, le substitut tente d'interroger le seul témoin à sa disposition, un immigré clandestin roumain qui ne sait que répéter deux mots : Vlad Țepeș !
Vampires est l'ultime roman écrit par le maître du roman noir que fut Thierry Jonquet. Brutalement disparu à l'âge de cinquante-cinq ans, il n'a pas eu le temps de donner une conclusion à son récit, mais ce sont un prologue et six chapitres totalement aboutis que son éditeur nous offre à lire (même si offrir n'est pas le terme le plus adéquat pour décrire l'édition grand format publiée au Seuil en 2011 et vendue au prix d'un roman entier).
Noirceur et humour sont au rendez-vous de cette œuvre inachevée qui, à la lecture de ses six premiers chapitres, ne peut être cataloguée dans le genre Polar, mais appartient plus certainement au Fantastique. En effet, si Thierry Jonquet se livre, comme dans plusieurs de ses romans précédents, à l'art de la critique socio-politique, n'hésitant pas à grossir le trait de certains personnages et allant parfois jusqu'à la caricature comme c'est le cas des habitants des cités de banlieue dans ce roman, la plupart de ses personnages n'ont rien de conventionnel.
Ainsi, si Vampires peut être rattaché au genre Fantastique, c'est bien évidemment à cause de son titre, mais au-delà parce que l'ensemble des membres du clan Rădescu, dont Thierry Jonquet nous dresse le portrait, sont de véritables suceurs de sang. Chacun des membres de cette étrange famille trouve le moyen d'assouvir sa faim de la manière la plus discrète possible : la fille aînée, consœur et amie du docteur Pluvinage, se contente du sang des défunts qu'elle autopsie, tandis que son frère profite des cycles menstruels des serveuses de la boîte de nuit gothique qu'il dirige.
Pour sa part, le docteur Pluvinage, médecin légiste fantasque, participe également, par ses réflexions et par sa dévorante passion pour son métier, à l'humour décalé de ce roman. On peut signaler au passage que, dans la série télévisée Boulevard du Palais, régulièrement diffusée sur France 2 et inspirée du roman les Orpailleurs de Thierry Jonquet, le comédien Olivier Saladin a donné un visage et une réelle présence à ce bon docteur Pluvinage.
Intégrant à son récit des références au personnage historique de Vlad Țepeș qui servit d'inspiration au plus célèbre des vampires, le Dracula de Bram Stoker, mais aussi diverses théories plus ou moins scientifiques pouvant expliquer l'état de la famille Rădescu, il est bien évidemment difficile de savoir si Thierry Jonquet allait conduire son récit vers plus d'horreur ou amener une conclusion plus réaliste. Sous sa forme incomplète, Vampires est et reste un demi-roman fantastique dont la lecture laisse un cruel goût d'inachevé et c'est bien dommage.
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