Biotope
éditorial à KWS 72, août 2013
Le desman des Pyrénées est un curieux animal. Insectivore, semblable à une grosse taupe (50 grammes), il est surnommé rat-trompette à cause de sa longue queue et de l'organe tactile et olfactif surdimensionné qui lui sert à compenser sa vision presque inexistante. Il vit dans des terriers qu'il creuse au bord des rivières de la péninsule ibérique et du massif pyrénéen, se nourrissant de larves d'insectes aquatiques. C'est un excellent nageur… mais les insectes qu'il mange sont très sensibles à la moindre pollution, à la moindre variation de la composition chimique du milieu qui entraînerait, par exemple, une prolifération d'algues. Et il ne sait creuser ses terriers que dans des berges restées vierges de l'aménagement humain. Ajoutons à cela le fait que le desman ne peut pas migrer d'un bassin-versant à un autre, et qu'il est impossible de le faire se reproduire en captivité (il ne partage pas son territoire, et peut se battre à mort avec ses congénères ; il est même assez difficile de le maintenir en vie, car il est très pointilleux sur ses conditions de vie) : vous ne serez pas surpris d'apprendre que l'espèce est considérée comme menacée, et aussi comme un indicateur de la qualité de son environnement.
KWS est de nos jours une espèce menacée — pas de numéro sorti depuis dix mois, il y a de quoi s'inquiéter ! Et pareillement, c'est un révélateur de la mauvaise qualité de son environnement. L'environnement de KWS, c'est la vie de son rédacteur en chef, votre serviteur, et le moins qu'on puisse dire est qu'il n'a pas été bon cette année, pollué par toutes sortes de soucis, familiaux, et surtout professionnels.(1) Du coup, la rivière de mon temps a été abondamment bétonnée et polluée, je n'ai guère pu croquer de larves littéraires… le découragement a fait le reste, qui m'a empêché de m'occuper correctement des articles des collaborateurs qui ont eu le mérite de rester fidèle au fanzine, malgré l'attente interminable à laquelle il les soumet.
Ce numéro de KWS est une tentative de reprendre pied. De garder aussi le contact avec la communauté SF, via le pourcentage minime qu'en représentent les abonnés (et lecteurs sur toile) de KWS. Je n'oublie pas les deux liens qui m'y attachent encore : les merveilleuses rencontres de Peyresq (sur lesquelles vous trouverez plus de détails dans ce numéro à l'occasion de la chronique d'un recueil de leurs actes, Imaginaires scientifiques & hard science fiction), et la convention nationale annuelle (cette fois-ci organisée à Aubenas par Mireille Meyer et Jean-Jacques Régnier, lui-même trop peu fréquent contributeur de KWS). Mais si Peyresq est merveilleux, c'est aussi parce qu'il exige du travail de ses participants, sous forme de lectures préalables et d'articles après coup. Je vous laisse donc, pour retourner jongler avec mes retards…
PS : mauvaise organisation oblige, je n'inclus pas dans ce numéro de courrier des lecteurs. Mais continuez de m'écrire. Un grand merci à Daniel Le Mercier, qui me tient au courant des bonnes nouvelles et des mauvaises, comme cette mort annoncée (et désormais réalité) de Iain Banks, mon auteur préféré ces temps-ci,(2) celui dont aucun livre ne m'ennuie… Imité, jamais égalé. Il nous manquera.
- Au premier rang desquels une réforme calamiteuse du recrutement des enseignants du second degré ; pour lire une opinion brute de décoffrage sur la chose, cherchez sur Google professeurs ignorants.↑
- Voir ma chronique de Transition dans ce numéro.↑
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