Olivier Paquet : le ‘Melkine’ (la Trilogie du ‘Melkine’ – 1)
Olivier Paquet : la Mort du ‘Melkine’ (la Trilogie du ‘Melkine’ – 2)
romans de Science-Fiction, 2012 & 2013
Un space opera en trois volumes, nous dit la quatrième de couverture ; et, contrairement à une de mes habitudes, je ne vais pas vous recommander d'attendre la parution du dernier volume pour lire ce premier.
Imaginez un univers d'après l'Expansion des Terriens. Des colonies dans lesquelles les enfants sont dès le départ “conditionnés” pour mener le mode de vie choisi de leur monde (mondes viking, hindou, etc.). Les communications se font par le biais des Fréquences, qui sont en même temps maîtresses des TV et des informations. Mais Azuréa, qui dirige la Fréquence Banquise, vient de découvrir un moyen de transmission instantané. Dans le même temps, le navire-école Melkine parcourt la galaxie et sélectionne les enfants qui vont subir un déconditionnement et être rendus libres… Lors d'une escale particulière dans le fief de Banquise, Ismaël, un des jeunes élèves du Melkine — déjà considéré comme brillant —, commet une faute irréfléchie et impardonnable qui le condamne aux yeux d'Azuréa, et des règles en vigueur, à être banni du navire-école. Il se retrouve en exil. Mais le Melkine n'a pas cédé au chantage d'Azuréa.
Le deuxième volume se situe quinze ans plus tard. Quinze ans après le bannissement d'Ismaël. Nous sommes en pleine guerre des Fréquences, qui pourrait se résumer à un affrontement entre Ismaël et Azuréa, entre Crépuscule et Banquise, entre surdoué et Techno-prophète. En commençant votre lecture au chapitre 7, page 103, et en lisant d'une traite jusqu'à la page 105, vous découvrirez une activité humaine presque disparue de nos contrées et décrite là avec une précision, une affection et une émotion des plus denses. Littérairement, c'est une réussite et, humainement, c'est un plaisir — on retrouve sensiblement la même densité aux chapitres 3 et 9.
Et vous comprendrez ce pour quoi Ismaël lutte : instaurer une autre façon de vivre, différente du néo-conditionnement instauré par la Techno-prophète. Ismaël est marié et sa femme, Orphyne, a donné naissance à un enfant, Prodige, attardé mental ou autiste. Les anciens amis-camarades d'Ismaël ont un peu changé avec le temps mais semblent encore le comprendre… Malgré sa troupe d'Assassins (redoutables combattants lointains cousins de ceux qui fumaient avec Arthur Rimbaud), Ismaël recule devant Azuréa et le Melkine est contraint de se saborder. Mais bien sûr les anciens camarades se sont réfugiés sur les planètes qui leur convenaient.
On se doute que le troisième et dernier volume, l'Esprit du Melkine, doit voir le triomphe d'Ismaël et le rétablissement d'un certain type de valeurs. Et si vous avez bien lu jusque-là, vous savez que ce ne sera pas le triomphe d'un seul individu. Les anciens ont bien œuvré à leur manière et la victoire relève aussi d'une bataille de l'espace façon Guerre des étoiles…
En fait et en ce sens, cette trilogie aurait mérité un prix littéraire pour avoir su maîtriser le mélange d'affectif et d'action. Pour moi, maîtriser signifie ici éviter un pathos mélodramatique — avec le rôle de l'enfant autiste et ses “frères et sœurs”, par exemple, ou celui du couple Ismaël/Orphyne — et ne pas en rajouter dans la violence à grand spectacle couleur hémoglobine. Il s'agit d'un livre riche, dense. Non, je ne me suis pas trompé, c'est un livre en trois parties et je pense que ce type d'exercice oblige l'auteur à doser, à étaler les révélations. Dire sans dévoiler est tout un art et je crois qu'Olivier Paquet s'en sort par le biais d'une certaine poésie, par la force des images.
Attention ! Vous avez là un auteur à suivre avec patience, qui risque de devenir sous peu un des meilleurs écrivains français de Science-Fiction.
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