KWS : comptes rendus de lecture sur la Science-Fiction

Olivier Bruneau : Dirty sexy valley

roman d'Horreur, 2017

chronique par Philippe Paygnard, 2019

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Afin de célébrer dignement leur diplôme de fin d'études, Tom, Hortense, Clarisse, Simone, Stan et Matt décident de passer un week-end de folie dans un chalet isolé au plus profond des bois. Nos six étudiants, en quête d'émotions fortes à base de sexe, d'alcool et de drogue, sont loin de se douter que leurs voisins les plus proches, au milieu de nulle part, sont une famille de dégénérés de la pire espèce.

Avant d'envisager la moindre analyse de ce livre, il faut immédiatement préciser que ce roman est définitivement réservé à un public averti, voire très averti.

Cela étant dit, Dirty sexy valley se présente comme un “poche” d'apparence classique. Sa couverture en noir et blanc est une photo à l'aspect rétro qui n'est pas sans rappeler les affiches des films de Russ Meyer dans les années 1970. Ce sympathique emballage donne le ton, celui de la nostalgie, mais une nostalgie focalisée autour d'un genre très particulier, le slasher. Dirty sexy valley se présente comme un hommage iconoclaste à ce cinéma d'Horreur où d'impitoyables tueurs massacrent méthodiquement un groupe d'innocents. On retrouve ainsi, dans le roman d'Olivier Bruneau, tous les clichés du genre. Il y a les victimes toutes désignées. Il s'agit ici de six étudiants parmi lesquels les inévitables bombes sexuelles qui, dès les premières pages, sont déjà en tee-shirt et petite culotte. Il y a également la famille dégénérée dirigée par une matriarche qui prêche et impose un puritanisme extrême à sa fille, mais se révèle être une redoutable obsédée sexuelle. La rencontre entre les deux groupes ne peut que conduire à la violence, la souffrance et la mort comme dans les classiques du genre que peuvent être la Colline a des yeux (de Wes Craven, 1977) ou Vendredi 13 (de Sean S. Cunningham, 1980).

Turgescences monstrueuses, tourments pénétrants et rigidités qui ne sont pas que cadavériques constituent l'une des bases de cette cruelle histoire qui invoque tout à la fois les esprits du marquis de Sade et de Leopold von Sacher-Masoch, comme ceux de Herschell Gordon Lewis et​ de George A. Romero.

Ce livre, qui plonge au cœur de l'horreur graphique et de l'excès en tout genre, mêlant sexe et violence, aurait très certainement pu être publié par les défuntes et éphémères collections "Gore" du Fleuve noir ou "Maniac" de Patrick Siry. À l'époque, ces dernières jouaient la carte du grand guignol avec un certain sérieux, sous des couvertures de Dugévoy et de Michel Gourdon. Elles firent ainsi paraître, entre 1985 et 1988, des romans tels que la Mort visqueuse de Shaun Hutson, Crève, majorette, crève… de John Russo (le co-scénariste de la Nuit des morts-vivants, 1968) ou une version caviardée de Saison de mort de Jack Ketchum.(1) Parmi la soixantaine de titres publiée par les deux collections, on trouvait également quelques courts récits sanglants à souhait signés d'auteurs français bien connus : Joël Houssin, G.J. Arnaud ou Jean-Pierre Andrevon.

Comme ces livres des années 1980, Dirty sexy valley mêle sexe et violence, mais Olivier Bruneau donne une tonalité originale à son roman. Ainsi, la brutalité extrême de la plupart des scènes gore est désamorcée par la candeur des dialogues entre le bourreau et sa victime, ou la naïveté des réactions des différents personnages. Cette ingénuité renvoie tout naturellement à celle des proies des slashers au cinéma qui, tels des moutons allant à l'abattoir, préfèrent systématiquement se séparer plutôt que de rester groupées pour affronter le tueur.

Usant à fond de la carte du grotesque, alternant sexe et violence jusqu'à un dénouement assez inattendu, Olivier Bruneau signe un de ces OLNI (objet littéraire non identifié) surprenant à ne surtout pas mettre entre toutes les mains.

Philippe Paygnard → Keep Watching the Skies!, nº 84, avril 2019


  1. Le roman de Jack Ketchum a été réédité, dans une traduction non expurgée signée Benoît Domis, par les éditions Bragelonne en 2008, sous le titre de Morte saison.

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