S.M. Stirling : les Lanciers de Peshawar
(the Peshawar lancers, 2002)
roman de Science-Fiction
- par ailleurs :
Voici que l'uchronie imprègne peu à peu la SF. Sa forme la plus moderne, le steampunk, explorant d'abord Wells, Doyle et Verne, s'attaque maintenant à Kipling pour jongler avec le passé. Afin d'interférer avec notre présent. Ce goût de revisiter les écrivains mythiques du xixe siècle en prolongeant leur œuvre sous l'impact d'événements divergents, stupéfiants, n'est-il pas le signe d'une immense nostalgie suscitée par la disparition des utopies ? Cela semble évident à la lecture des Lanciers de Peshawar, inspiré par les Quatre plumes blanches et les Trois lanciers du Bengale, films tellement culte qu'ils sont invisibles sur nos écrans.
S.M. Stirling, qui est un auteur professionnel chevronné, s'empare sans état d'âme des poncifs les plus assurés, chute d'un météore qui perturbe l'atmosphère terrestre au point d'obliger les Anglais à se réfugier aux Indes et les Français en Afrique du nord. Les Russes, adorateurs de Malik Noûs, le dieu du néant, se nourrissent de chair humaine. Naturellement, les voyageurs se déplacent en dirigeable et les calculateurs sont à vapeur. Nous voici au xxie siècle où les abominables Thugs ont conservé leur cruauté proverbiale et les lanciers, leur courage. Mais si la structure du roman est habile, les aventures bien enchaînées, le sens du détail ethnologique si pointu qu'il exige un dictionnaire spécialisé, la spéculation est absente et les personnages ont une psychologie vieillotte. Le problème des fabricants de rêves cultivés, c'est qu'ils puisent dans la mémoire d'une époque dont ils ignorent la vraie sensualité.