Keep Watching the Skies! nº 49, juillet 2004
Nancy Kress : Réalité partagée
(Probability moon)
roman de Science-Fiction ~ chroniqué par Noé Gaillard
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Les Terriens sont en guerre contre les Faucheurs, race de combattants redoutables qui ne laisse rien sur son passage. Les Terriens ont découvert un tunnel qui permet de voyager dans l'espace mais il est assez compliqué à gérer et demande une certaine organisation pour revenir au point de départ. Les mêmes Terriens ont aussi découvert Monde, une planète particulière dont les habitants vivent singulièrement. Les échanges socialisés sont codifiés par des échanges de fleurs, et leur vie est basée sur le principe de la réalité partagée. Si vous ne partagez pas cette réalité, vous souffrez d'atroces maux de tête. Mais vous pouvez être condamné à ne pas la partager comme l'héroïne mondienne, ou ne pas souffrir de maux de tête comme l'expédition terrienne qui explore Monde. Ces Terriens servent en fait de couverture à l'expédition militaire qui elle est chargée d'analyser et/ou de récupérer le satellite artificiel et extraterrestre qui tourne autour de Monde, puisque certains pensent qu'il s'agit d'une arme potentielle contre les Faucheurs. Dans ce premier épisode, l'expédition au sol est pourchassée comme ne faisant pas partie de la réalité partagée, et se réfugie dans les montagnes radioactives interdites pendant que les militaires tentent d'emmener le satellite dans le tunnel. Un satellite qui semble lié aux montagnes interdites et émet des radiations si on l'ausculte.
Complexe et passionnant. Complexe parce que mettant en première opposition deux perceptions du monde et en seconde des conceptions différentes et posant clairement le conflit entre “nature humaine et culture personnelle” d'une part et d'autre part les perceptions et la culture imposée par la société. Bien sûr, comme nous, Nancy Kress a sans doute les personnages qu'elle aime ou préfère et les autres, mais cela ne se voit pas et nous finissons par trouver les méchants gentils, et vice-versa. Passionnant, parce qu'il faudra bien que les problèmes posés trouvent des solutions et sans doute plus compliquées que celles que l'on pense avoir devinées.
J'ai eu l'impression de lire une histoire de poupées russes racontée par Escher mais revue et corrigée par Ian Watson (l'Enchâssement) avec le plaisir de n'être jamais perdu, noyé dans la complexité et les données scientifiques précises qui accompagnent le voyage du satellite. On pourrait aussi comparer ce roman au travail des Campanella et autres La Métrie et de Bergerac qui proposaient des données scientifiques et philosophiques à travers la présentation de mondes nouveaux.
À lire sans faute.