Nancy Kress : Feux croisés
(Crossfire, 2003)
roman de Science-Fiction
Avouons-le tout de suite, j'ai un faible pour cette auteure. Posons-nous aussi la question : écrit-elle si peu pour être si peu publiée dans notre bon pays ? Ou bien est-elle si peu appréciée des lecteurs ? Je ne sais pas, mais apprendre qu'elle était l'épouse d'un auteur comme feu Charles Sheffield devrait enthousiasmer ! Ne me demandez pas pourquoi, cherchez un peu, que diable ! et en plus elle cite Horace en exergue !
Bref résumé pour bien comprendre. L'état de la Terre : déliquescent, c'est la fin. Grâce à un inventeur génialement fou et richissime, quelque six mille personnes peuvent se payer un voyage vers un ailleurs plus vert. Une société composite qui comporte un groupe de Quakers, une ex-famille royale arabe, des Cheyennes, un contingent de Chinois et quelques individus isolés. Ajoutons un capitaine Jake Holman et son associée Gail Cutler. Tout ce petit monde s'embarque à destination d'une planète surnommée “Forêtverte” qui présente bien des similitudes avec la Terre et est censée ne pas abriter d'indigènes. Cependant, après l'installation du camp de base — sans les Cheyennes, pressés de partir s'installer loin des Hommes et de leur technique —, une navette d'exploration découvre trois villages assez éloignés les uns des autres peuplés par le même genre d'individus (une espèce de grands gorilles) mais agissant selon trois comportements différents. À force d'analyse et de réflexions, les Terriens vont comprendre que ces populations n'ont rien d'indigène et se trouver confrontés à des extraterrestres (thème déjà abordé dans la Trilogie des Probabilités). En fait à deux types d'extraterrestres. Les Tiges (plantes) qui ont capturé des Velus et qui en ont fait des cobayes sur “Forêtverte”, et les Velus (boules de poils) — on notera les dénominations péjoratives…
Bien sûr, il y a un premier niveau de lecture qui nous entraîne dans le genre western galactique, ou dans nos guerres modernes, où il est plus ou moins toujours question de libérer un pays de l'emprise d'un autre, et un deuxième niveau qui met en évidence des comportements humains complexes et notre façon de percevoir l'autre, humain ou non. Nancy Kress, grâce au choix des populations embarquées dans le vaisseau, montre qu'il est toujours possible de s'entendre entre gens intelligents, de passer outre les clivages sociaux, religieux, politiques, physiques, linguistiques, etc. Qu'une fois bien compris le principe du bien commun, il n'y a plus de différences qui tiennent.
Audacieux en 2003 aux USA, qu'en est-il aujourd'hui en France ? Est-ce que le sujet peut encore intéresser ? Vu le succès des crevettes, oui ! Vu les nettoyages successifs du côté de nos jungles, rien n'est moins sûr !
En tout cas, on souhaitera à Nancy Kress autant de succès en France que le film Welcome.
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