André-François Ruaud & Raphaël Colson : Science-Fiction : les frontières de la modernité
essai, 2008 & 2014
La Science-Fiction ne pense pas l'avenir, comme le croient certains naïfs, mais elle pense à l'avenir, ce qui est mieux.
La Science-Fiction est une espèce littéraire qui présente des propriétés aussi étranges que singulières. Ainsi, un nombre considérable d'études publiées lui ont été consacrées en France. J'en possède au moins une centaine et je suis persuadé de ne pas les avoir toutes. De qualités inégales mais souvent remarquables, elles ont la plupart du temps pour auteurs, des amateurs, des connaisseurs, parfois de véritables érudits, qui ont voulu faire partager leur passion. Assez récemment, des universitaires y ont joint leurs propres travaux, guère plus d'une douzaine depuis le début des années 1950.
À ma connaissance, aucune autre espèce littéraire n'a suscité autant de commentaires édités. Bien entendu, la littérature générale, classique au sens premier du terme, a engendré d'innombrables essais et thèses. Mais en dehors de travaux universitaires qui ont un certain parfum d'obligation, et d'anthologies signées de noms impressionnants, de Gide à Pompidou, il n'est pas si facile de trouver de bons essais sur la poésie par exemple. Le roman policier a fait l'objet de quelques études dont celle, fameuse, de Boileau et Narcejac. Le Fantastique classique, surtout jadis, a bénéficié d'un plus grand intérêt. Mais rien qui se rapproche de la montagne de livres sur la Science-Fiction.
Les amateurs veulent faire partager leurs lectures, les érudits leur savoir, ainsi Pierre Versins dans sa monumentale Encyclopédie de l’Utopie, des Voyages extraordinaires et de la Science Fiction,(1) et, désormais, les universitaires leurs théories.(2) Une autre singularité du domaine tient à ce que la plupart de ces ouvrages, voire tous, tiennent à proposer des définitions de la Science-Fiction. Je n'ai jamais rencontré nulle part une telle obsession, confinant au délire paranoïaque, de la définition. Personne à ma connaissance n'a jamais tenté de définir la poésie ou le théâtre, ni même le roman. Tout le monde sait ce qu'est un roman policier même si, du récit de détective au roman noir, il en existe bien des cellules. Mais la Science-Fiction excite une sorte de prurit définitoire auquel, je tiens à y insister, je me suis toujours soustrait, affirmant que toute définition du domaine était impossible soit parce que dès qu'on en propose une, exhaustive ou compréhensive, un malin découvre un texte qui y échappe, ou un auteur la contourne élégamment, conduisant à la reformuler, ad infinitum.
On peut s'interroger sur les raisons de cette obsession. J'y vois trois figures : le souci de faire comprendre, celui de se défendre et enfin celui de se singulariser, de se définir soi-même.
Le définisseur le plus innocent tente de répondre à la question : que lis-tu ? ou encore pourquoi me conseilles-tu de lire ça (dont la couverture est affreuse — ce qui est souvent faux, mais des goûts…) ? Il entreprend d'expliquer que c'est la littérature la plus actuelle, qui aborde les rapports complexes entre les sciences, les techniques et la société. Ça ne correspond pas exactement au Iain M. Banks qu'il est en train de lire et qui regorge d'Intelligences Artificielles et de vaisseaux plus rapides que la lumière sillonnant la Galaxie. Mais toute acculturation doit être progressive. Le définisseur sur la défensive, généralement le plus agressif, rétorquera à son interlocutrice (cas possible) qu'elle ignore un genre que Michel Houellebecq a défini comme une des principales innovations littéraires du xxe siècle. Enfin le troisième affirmera, péremptoire, que la Science-Fiction, c'est ce qu'il lit et que, du reste, il ne lit pas autre chose.
Le premier illustre ou tente d'illustrer. Le deuxième échafaude des fortifications dont ensuite il redoute ou évoque la crainte de se retrouver prisonnier. Le troisième se mire dans un mur de papier. Sauvons les forêts.
Igor et Grichka Bogdanov, dans un livre très amusant, l'Effet Science-Fiction : à la recherche d'une définition,(3) ont abordé la question sous un angle original. Au lieu de se demander comment définir la chose, ils ont posé la question : « La Science-Fiction, pour vous, c'est quoi ? » à toutes sortes de personnalités et d'institutions, de Jacques Lacan à des académiciens, sans en exclure le Vatican. Les réponses généralement hostiles, du type : « Je déteste ça puisque je n'en lis jamais. », sont souvent éclairantes d'une sociologie de la lecture et parfois fort pertinentes.
Le propos de Lacan, qui ne laisse pas ignorer qu'il connaît peu la chose, est cependant subtil et sur plus d'un point pertinent. En voici quelques extraits :
« La Science-Fiction… Il existe une différence entre la Science-Fiction et le fait d'aller sur la Lune : on y est réellement allé, là-haut. Que veut dire, effectivement, la Science-Fiction ? Que coince-t-elle d'autre que l'Autre ?
» Remarquons que sans science, il n'existe pas de Science-Fiction. Le vaste déchaînement du savoir-faire (mais pas n'importe lequel) a enchaîné la Science-Fiction. Or ce rapport n'est pas simple, puisque celle-ci n'est pas prise au sérieux. Mais qu'est-ce que les gens prennent au sérieux, en dehors de leur ex-sistence ?
» Qu'est-ce que le roman de Science-Fiction ? Je ne le sais pas. De le lire, donc de le dire, je n'ai pas le temps. […] Voyez-vous, la Science-Fiction ne se constitue que [de](4) ce qu'elle déconstitue, c'est-à-dire d'un inconscient dont on ne sait rien, sauf qu'il est structuré comme un langage. Il faudra bien qu'on comprenne un jour que la Science-Fiction ne peut se constituer que de ce qui l'exclut, car enfin, il est frappant qu'elle ne serve qu'à exprimer des structures inconscientes absolument particulières. Elle est abordée par le discours scientifique, à ceci près qu'il lui est impossible de le réaliser pleinement car le discours scientifique, lui, méconnaît l'inconscient. L'inconscient est le témoin d'un savoir en tant que pour sa plus grande part il vient à l'être parlant. La Science-Fiction est ce qui articule des choses qui vont beaucoup plus loin que ce que la science supporte de savoir énoncé : la Science-Fiction, c'est le mystère de l'être parlant. Certes, ce discours “scientifique” a quelque chose à voir avec le savoir ; la question qu'il pose, c'est celle de l'introduction de la différence dans le champ de la jouissance par l'Autre (et non pas de l'autre). […] Si l'inconscient nous a appris quelque chose, c'est que quelque part dans l'Autre ça sait mais que nous ne pouvons recueillir que des bribes de ce savoir.
» Personne au monde ne peut donc parler de la Science-Fiction, en dire quoi que ce soit de sensé et d'intelligent. […]
» […] Le monde de l'être plein de savoir n'est que le rêve du corps en tant qu'il parle car il n'y a pas de sujet connaissant. Mais il peut y avoir jouissance de parole. Et la Science-Fiction, c'est peut-être cette jouissance-là : la parole sans le savoir. Le monde sans autre connaissance que celle qu'il rêve. Celle de l'Autre. »(5)
Ce que nous dit Lacan, de façon assez surprenante puisqu'il affirme n'en rien savoir, c'est pourquoi il n'est pas possible de définir la Science-Fiction. Son rapport à la technique, à la science, au savoir est à la fois indénouable et toujours faux. Lui ôter la science, c'est la détruire, et la définir par la science, c'est s'abuser ou carrément mentir, voir nier ce qu'est la science. Ce dont il est question en la Science-Fiction, c'est d'un désir ou d'une crainte, d'un désir de savoir qui ne peut pas se satisfaire autrement que par le langage, l'introduction d'une différence dans le champ de la jouissance.
Jean-Marc Lévy-Leblond, physicien et éditeur d'une célèbre collection d'information scientifique, en jouant avec le tiret, trait d'union ou signe moins qui, redoublé, devient signe égal, qui relie science et fiction dans Science-Fiction, est parvenu dans un article paru dans la revue Alliage à peu près aux mêmes conclusions bien que son rapport à l'œuvre de Lacan soit probablement inexistant ou à tout le moins ironique.
Ce n'est pas qu'il soit impossible de définir toute forme d'expression littéraire. Ainsi, on peut donner de la tragédie classique une définition complète et satisfaisante et cela alors qu'elle était encore vivante. Peu de gens savent pourtant aujourd'hui que sa division en cinq actes, comme celles d'autres modes du théâtre, découle d'un problème technique : la nécessité de remplacer régulièrement les chandelles des lustres qui éclairaient la scène. Cette obligation technique a bien entendu exercé une influence considérable sur la forme littéraire : il fallait que chaque acte manifeste sa propre unité, on ne pouvait pas couper n'importe où, l'acte devait s'achever sur une sorte de cliffhanger qui maintienne l'intérêt du spectateur durant l'interruption. De même, mais je m'égare, la longueur des films, de l'ordre d'une heure trente, a été longtemps liée au diamètre des bobines de pellicule qui définissait le temps de la projection. Je ne m'égare du reste pas tant que ça, car ce que la Science-Fiction illustre, implicitement et explicitement, c'est le rapport de la technique à l'expression.
Fonder une définition sur les deux termes reliés science et fiction n'est pas moins redoutable. Définir la fiction en dehors d'une série de négations est difficile. Définir la science ou les sciences est carrément impossible. Les sciences seraient-elles une méthode ? Il y en a des milliers. Seraient-elles des savoirs ? Mais ils changent tout le temps et c'est même la caractéristique dominante de tout ce qui est scientifique. La science est une pratique efficace, voilà peut-être la meilleure approche qu'on peut en risquer.
Et si la Science-Fiction, au fond, était d'abord une pratique, par là-même indéfinissable, mais dont l'histoire peut être élaborée ? Et si cette pratique débordait sensiblement le seul domaine littéraire où l'enferment la plupart des ouvrages qui lui sont consacrés ? Si elle faisait même que la Science-Fiction ne soit pas, ou si peu, de la littérature ? Voilà une question qui mérite d'être posée.
Certes la littérature générale peut, elle aussi, être caractérisée comme une pratique. Mais cela fait ressortir encore mieux sa différence d'avec la pratique de la Science-Fiction. La “littérature” s'emploie dans sa pratique à respecter la langue, héritage commun, voire à la sacraliser, certes avec plus ou moins de soin, et à n'en étendre l'usage, le champ, qu'à la marge, par petites excursions ; les révolutions, façon Joyce, y sont non seulement rares mais demeurent sans véritables lendemains. De même, la “littérature” se donne pour unique sujet ou à peu près, l'humain, certes dans sa considérable variété mais en le supposant immanent et éternel, inchangé dans son tréfonds, ce qu'il n'est pas, et le plus souvent en négligeant précisément l'Autre en lui.
La “Science-Fiction”, tout au contraire, se soucie peu d'écrire le mieux possible, voire seulement bien, l'idée, ou l'image, primant l'expression même si on y repère de remarquables stylistes. Et elle respecte si peu la langue qu'elle s'emploie à la maltraiter en multipliant les néologismes plus ou moins bien formés et en inventant des noms propres ou des vocables destinés à signifier l'extériorité, l'altérité, le plus souvent au prix de la naïveté et de la prolifération des syllabes imprononçables.(6) Lorsqu'elle bouleverse avec intention et habileté le langage, c'est sur le mode du 1984 de George Orwell, du Surface de la planète de Daniel Drode ou de l'Orange mécanique d'Anthony Burgess, pour bien marquer que la langue est un instrument, qu'elle ne peut se réclamer d'aucune transcendance. Le langage n'est pas servi, il est attaqué. L'humain, de même, l'intéresse peu, au fond, au profit de l'objet technique, de l'Autre, Extraterrestre, Intelligence Artificielle, robot, qui pourrait hanter un autre monde, ou encore de la société inimaginée et peut-être inimaginable. Lorsque la Science-Fiction rejoint l'humain, c'est par ce détour, ce qui, soit dit en passant, soutient la thèse de Lacan sur ce qu'elle dit. N'importe quel lecteur un peu attentif de Science-Fiction sait qu'elle se soucie peu d'être de la “littérature”, que son projet rejoint celui de la science dans la curiosité de l'impensé et forcément, du coup, trouve aliment dans la science, même si la plupart du temps elle ne la respecte pas plus qu'elle ne respecte la langue. Pour autant, puisqu'elle s'écrit et se publie, la Science-Fiction est une littérature, ou du moins une espèce littéraire.
Le temps, au sens de dimension plutôt que grammatical, de la Science-Fiction, en y incluant les textes et récits problématiques anciens sur lesquels je reviendrai, n'est pas celui de la littérature générale. Ce dernier semble respecter une chronologie linéaire, superficiellement causale, qui est celle du récit traditionnel, aux retours en arrière près qui auraient du reste été inspirés à la littérature par le cinéma, même si elle ne reproduit pas le cheminement de la conscience. Elle décrit le plus souvent un enchaînement dans un passé apparemment récent, d'où l'usage fréquent du passé simple, même s'il se déroule dans un passé beaucoup plus ancien, ainsi dans le roman historique.
La Science-Fiction au sens le plus large, elle, malmène autrement la chronologie et la dimension temps. Ainsi elle introduit, cas le plus simple, dans un présent apparent un objet, un engin ou une circonstance encore “à venir” : c'est que j'ai appelé l'anticipation dans le présent. Elle se projette allègrement dans un avenir global, parfois sur des millénaires ou des millions d'années. Mais elle se permet aussi les voyages dans le temps-dimension et les paradoxes qui en découlent. Elle explore également des embranchements de l'histoire dans les uchronies. Le temps utopique lui-même paraît socialement figé dans la perfection atteinte, une sorte de solution finale. On comprend que tout cela puisse apparaître un scandale au littérateur traditionnel.
Mais il y a pire. Alors que toute la littérature littéraire se centre sur l'humain dans ses dimensions psychologiques et sociales, au demeurant largement fantasmées, la Science-Fiction ne porte son attention même que sur l'extériorité de l'humain, machines, extraterrestres, mutants, mondes étranges, par-delà ce que Gilbert Hottois appelle très finement le mur cosmique dans son livre récent.(7) Bien entendu, la Science-Fiction se donne pour intention explicite la rencontre entre l'humain et ce par-delà, mais l'humain n'y est qu'un spectateur ou qu'un acteur secondaire. On retrouve le même trait dans l'utopie, l'anti-utopie ou la dystopie : l'humain a cessé subrepticement d'être un sujet pour devenir un subissant, éventuellement satisfait.
Ces trois négativités, relative négligence de la forme par incapacité ou par préférence, choix de l'objet comme sujet plutôt que de l'humain, bouleversement et manipulation du temps, correspondent à trois positivités : l'idée ou l'image l'emporte sur la recherche stylistique, l'accent mis sur l'objet à résonance scientifique ou technique exprime les révolutions des deux derniers siècles dans les modes de vie, généralement négligées ou minorées par la littérature générale ; les transformations de la temporalité ouvrent à des univers conceptuels jusque-là ignorés. On trouverait aisément bien d'autres divergences plutôt que différences. Ces divergences, si elles caractérisent un écart, ne peuvent pas constituer par elles-mêmes une définition ou même une ébauche de définition de la Science-Fiction. Celle-là, dans sa création ou production comme dans sa lecture ou consommation, est une pratique, historiquement évolutive, des écarts, et d'écarts rationnellement orientés, comme des possibles même si leur vraisemblance demeure très incertaine.
Une différence supplémentaire concerne la naïveté supposée (et souvent bien réelle) de la Science-Fiction, opposée à la pertinence affirmée avec éclat de la bonne littérature. Mais c'est qu'elle affronte hardiment des questions très difficiles auxquelles ni les scientifiques ni les philosophes n'ont donné de réponses ni même d'expressions satisfaisantes. Sa naïveté, c'est en fait de l'audace, et parfois de la témérité.
Je voudrais introduire ici une petite querelle de vocabulaire. La littérature traditionnelle est souvent présentée comme mimétique,(8) c'est-à-dire reproduisant des catégories ou des traits du réel ou ce qui est perçu comme tel. Le mimétique, c'est du “même”, évidemment ici partiel. L'inconvénient du terme dont l'usage peut être par ailleurs parfaitement clair est qu'il semble impliquer une superposabilité de ce type de fiction sur le réel : Madame Bovary pourrait, après tout, avoir existé. Son histoire n'a rien d'original. On peut dès lors lui accorder des prolongements sociologiques ou psychanalytiques qui vont bien au-delà de ce que l'auteur a écrit ou même de ses intentions. Par opposition, la Science-Fiction est qualifiée de non-mimétique.(9) Je préférerais qu'on la désigne comme non-analogique, la littérature traditionnelle étant considérée comme analogique avec tout ce que cela implique dans la relation restreinte et superficielle entre l'analogie et la réalité. Je crains au demeurant que ma suggestion n'ait guère de chance d'être adoptée.
Les oppositions que j'ai relevées semblent indiquer que la littérature et la Science-Fiction (toujours au sens large) procèdent de deux cultures différentes. Mais les choses sont plus compliquées : il y a entre l'une et l'autre des mouvements de va-et-vient. C'est pourquoi j'ai préféré jadis parler de subculture à propos de la Science-Fiction dans ses dimensions littéraires et extra-littéraires. Mais quand cette distinction s'est-elle établie, quand cette subculture est-elle apparue et est-elle devenue consciente d'elle-même ?
Et alors se pose, remplaçant l'obsession de la définition, la question de l'origine, qui devient vite tout aussi obsédante et se trouve des assises fort variables selon les auteurs. Considérons seulement trois des thèses les plus remarquables qui aient été consacrées à l'espèce littéraire.
Simon Bréan, dans son ouvrage, la Science-Fiction en France,(10) tout en prenant de grandes précautions et en ne négligeant pas d'indiquer les précurseurs de l'espèce, la fait apparaître pour les États-Unis en 1929 avec le terme de science fiction utilisé par Hugo Gernsback dans son éditorial du premier numéro de Science wonder stories (terme précédé dès 1926 par scientifiction lors de la création d'Amazing stories par Gernsback lui-même), et pour la France par l'introduction du même terme avec un trait d'union en 1950. C'est le seul point, au demeurant assez secondaire, sur lequel je suis en désaccord avec lui pour cause de nominalisme excessif.
C'est Gernsback lui-même qui abandonne le terme de scientifiction et lui substitue science fiction dans l'éditorial du premier numéro de Science wonder stories en 1929. Pourquoi ? Parce qu'en 1926, il baptise dès sa création Amazing stories, “the magazine of scientifiction” et s'en explique dans son éditorial. Mais au début de 1929, Gernsback perd Amazing, soit parce que le groupe dont il faisait partie fait faillite et revend ses revues, soit parce que Gernsback lui-même n'a pas payé papier et imprimeurs (ni probablement auteurs). Il crée dans la foulée Science wonder stories en juin 1929 mais ne peut plus utiliser le terme de scientifiction qui continue à orner la couverture d'Amazing. Il forge dès lors celui de science fiction qui ne peut pas être déposé et qu'il ne risque pas de perdre. Je n'en connais pas d'occurrence antérieure (sauf en Grande-Bretagne au siècle précédent, mais sans aucun rapport). Le terme de science fiction connaît un succès immédiat et est aisément adapté et adopté en France effectivement à partir de 1950. Mais d'une part, cette terminologie et ses avatars ne marquent nullement le point de départ d'une ère nouvelle. D'autre part, elle relève surtout de la contingence et d'une sorte d'expédient.
Dans son éditorial du premier numéro de Science wonder stories, Gernsback écrit ceci : “Science wonder stories supplies this need for scientific fiction and supplies it better than any other magazine. I started the movement of science fiction in America in 1908 through my first magazine, Modern electrics. At that time it was an experiment. Science fiction authors were scarce. There was not a dozen worth mentioning in the entire world.”
.(11)
Non seulement, il utilise deux fois le terme de science fiction mais bien dans son sens moderne encore actuel. Et il fait remonter le genre bien avant 1908 même s'il se présente, de façon très exagérée, comme son introducteur en Amérique.
Natacha Vas-Deyres, dans son livre Ces Français qui ont écrit demain,(12) où elle relie Utopie et Science-Fiction, semble borner son ambition au siècle dernier. Mais en fait elle insiste sur la période 1890-1910 et plus avant sur les liens entre ces littératures et les révolutions industrielles, soit pour la France le premier tiers du xixe siècle.
Irène Langlet, dans un ouvrage non moins indispensable, la Science-Fiction,(13) retient plutôt la période 1863-1895 avec Jules Verne et H.G. Wells comme “grands fondateurs”.
Enfin, dans l'ouvrage ici préfacé, André-François Ruaud et Raphaël Colson optent pour une époque des précurseurs (européens), comprise entre le xvie et le xviiie siècle.
Cette question des origines, bien qu'elle ait suscité bien des disputes, ne revêt au fond pas beaucoup d'importance. Il est pourtant remarquable qu'elle paraisse inévitable. Chacun, en la posant, renvoie soit aux limites de sa propre culture spécialisée, soit à des présupposés voire des préjugés plus ou moins clairement admis : ainsi celui qui voudrait qu'en se référant à des œuvres anciennes et relevant du corpus classique tel auteur cherche à valoriser un “mauvais genre”.
Je suis du reste convaincu qu'avec la numérisation généralisée des textes et les logiciels de recherche automatique de termes ou d'expressions, voire de structures lexicales spécifiques, les questions de la définition et de la démarcation des espèces littéraires et de leurs origines se trouveront bouleversées dans un avenir proche. Espace, temps, astéroïdes, planètes, etc., sans oublier les xénolectes, sont plus fréquents dans la Science-Fiction que dans la littérature générale ou que dans le Fantastique ou la Fantasy, et fantômes ou goules plus rares. Ces approches statistiques “brutales” des vocabulaires ne supplanteront pas la lecture fine d'analystes mais vu la masse des textes à explorer, elles les aideront certainement à s'orienter. Le temps est venu de l'introduction des mathématiques dans les lettres.
Pour ma part et me plaçant dans le sillage de Pierre Versins, je n'hésiterai pas à remonter bien plus haut que Ruaud et Colson et à agréger au domaine des fictions problématiques, en tout cas spéculatives, relevant pour une bonne part de l'Utopie et remontant à l'Antiquité comme le montre Régis Messac dans son ouvrage les Premières utopies.(14) Et pourquoi pas l'Épopée de Gilgamesh, comme le suggère Versins.
Pourquoi remonter aussi haut ? Parce qu'il y a une continuité de ces fictions problématiques ou spéculatives, qui ne font appel à aucun surnaturel et qui demeurent rationnelles (en un sens large), que leurs auteurs successifs se sont lus et parfois commentés, et qu'il s'agit d'une tradition qui s'établit en marge de la littérature notamment en raison des oppositions que j'ai dégagées plus haut. Les questions posées sont d'ordre philosophique, parfois métaphysiques mais dans les limites du raisonnement, certes souvent insuffisant voire bancal. Ne voyez ici aucun essentialisme mais un enchaînement d'interrogations servies par l'imagination, qui débordent le savoir. Que peut-il bien y avoir d'étrange de l'autre côté de ces montagnes, ou encore sur la Lune, comme feignit de se le demander Lucien de Samosate dans son Histoire véridique qui inspira Bergerac et Voltaire, entre autres ?
Est-il légitime d'étendre aussi loin le champ couvert par le terme de Science-Fiction comme j'ai ici tendance à le risquer ? Mais après tout, même si l'on considère en général que la science moderne ne commence qu'au xvie siècle avec Galilée, s'interdirait-on de qualifier Archimède et Ératosthène de scientifiques ? Pierre Versins contournait la difficulté en proposant l'abréviation “Cora” pour “conjecture rationnelle”. D'autres ont tenté plusieurs fois d'imposer sans succès “fiction spéculative”. L'extension presque sans borne que je suggère ainsi du champ de la Science-Fiction s'accepte mieux si l'on renonce au scientisme optimiste d'un Gernsback et si l'on appelle science ce qu'à toute époque on croit savoir de la réalité. Au simple fil du récent xxe siècle, la science ou plutôt les “sciences” ont si radicalement évolué que leur état présent est presque aussi distant de celui du xixe siècle que des conceptions hardies des présocratiques atomistes.
Pour beaucoup de lecteurs “naïfs”, la Science-Fiction est une entité anachronique ou plutôt achronique, pratiquement une essence de leur ressenti, alors qu'elle est un produit, certes singulier, non seulement de ses auteurs mais de leur contexte scientifique, philosophique et social.
Pour ma part, j'ai donc tendance à penser qu'il y a bien une continuité mais qu'elle est marquée par des innovations, des ruptures, qui résultent de l'évolution des sociétés. C'est pourquoi je distingue très schématiquement trois périodes, la proto-Science-Fiction, des origines à l'invention de l'anticipation au tournant des xviie et xviiie siècles, la Science-Fiction archaïque qui couvre à peu près le xviiie et le xixe siècles, et la Science-Fiction moderne à partir de la Machine à explorer le temps de H.G. Wells qui fut aussi l'inventeur de la prospective. Peut-être faudrait-il y ajouter, sur le modèle des critiques d'art, la Science-Fiction contemporaine, née à mon sentiment vers 1950 tant aux États-Unis qu'en Europe ?
Ce n'est pas la périodisation, assurément contestable et plus pédagogique que théorique, qui m'intéresse, mais les points de rupture souvent provoqués par la réunion de plusieurs facteurs socio-culturels bien différents. Ainsi au tournant des xviie et xviiie siècles, sur une trentaine d'années, trois facteurs se rencontrent de façon inattendue et leur conjugaison va changer le cours de notre champ, la culture scientifique qui se répand après la révolution scientifique du xvie siècle et qui s'offre au regard dans les cabinets de curiosités, l'invention de l'anticipation sur la fin du xviie et qui, d'abord politique, n'a rien de scientifique ni même de spéculatif, et enfin la vogue des récits de voyages extraordinaires qui absorbe la tradition utopique. Les trois ensembles nourrissent Swift et Voltaire et peut-être bien Tiphaigne de La Roche et quelques autres. Dès avant, avec son véhicule à fusées, Cyrano a peut-être inventé l'anticipation dans le présent.
Au fil du xixe siècle, la technique, jusque là affaire de tours de main et donc d'artisans, d'ingénieurs et d'industriels, va progressivement se rapprocher de la science qui, déniaisée par la pratique, va renoncer à la pureté de son aura. Au xxe siècle, cela donnera les technosciences,(15) ingrédients indispensables dès le siècle précédent à la Science-Fiction. Ainsi, le Nautilus (1869) de Jules Verne combine la technique du sous-marin et la science pure et balbutiante de sa propulsion électrique.
Au xixe siècle encore, deux innovations majeures vont modifier la portée de l'espèce littéraire. D'abord, dès son premier tiers, la popularisation de l'image imprimée. D'un Autre monde de Grandville (1844) aux représentations prophétiques d'un Robida, médiocre romancier mais génial illustrateur du Vingtième siècle (1883-1890), prophète (hélas) de la stratégie moderne dans la Guerre au vingtième siècle (1887) que nos généraux d'avant 1914 n'avaient même pas ouvert, en passant par les illustrateurs de Jules Verne (et de bien d'autres), l'avenir se donne à voir.
Ensuite, dès la fin du siècle, cette image s'anime en 1895. Dès 1902, Georges Méliès transpose à sa manière le voyage vernien vers la Lune. Robida (1848-1926) et Méliès (1861-1938), presque contemporains, partagent cette caractéristique commune d'avoir été longtemps oubliés dans leur propre pays. Si Méliès a été trop tard redécouvert, aucun musée n'expose Robida, et ce n'est que dans une édition universitaire américaine qu'on peut aujourd'hui accéder à ses œuvres principales.
La Science-Fiction va dès lors occuper une place non négligeable mais la plupart du temps hors de France, dans le cinéma(16) et dans les séries télévisées.(17) Voire dans la bande dessinée.
La Science-Fiction a ainsi cessé d'être exclusivement une littérature pour devenir une pratique qui, au travers de la bande dessinée, des jouets et même à l'occasion de la musique, va se constituer, au sens propre, en subculture. Bien entendu, les autres domaines de la littérature vont emprunter les mêmes médias, mais de façons tout à fait différentes. Ils vont s'efforcer au réalisme, là où la Science-Fiction va tendre, par l'illusion affichée du réalisme, au vraisemblable.
Au xxe siècle, Hugo Gernsback va introduire une innovation lourde de conséquences en créant une revue, Amazing stories (1926), puis une autre, Science wonder stories (1929), exclusivement consacrées au domaine. Leur contenu emprunte beaucoup au passé européen avec Verne et Wells, et demeure médiocre pour le reste. Mais en créant la première, Gernsback, piètre éditeur mais prosélyte convaincu, montre qu'il existe un public spécialisé et suscite beaucoup d'émules. Même si ce qu'on appellera par la suite le fandom est alors réduit et sans influence au moins jusqu'aux années 1950, la multiplication de ces pulps va entraîner celle des auteurs, leur sélection darwinienne et plus peut-être encore leur attention réciproque à leurs productions. Là où les auteurs européens comme Rosny aîné et Doyle criaient trop aisément au plagiat, leurs collègues américains vont constituer une tradition, bâtir une subculture sur fondement d'intertextualité. Plus qu'un milieu organisé de lecteurs comme on l'a trop dit, c'est un milieu d'auteurs qui se constitue et qui, sous les impulsions d'éditeurs fort différents comme John W. Campbell, Jr., Horace Gold et Anthony Boucher, va conduire d'une part à une amélioration sensible de la qualité moyenne et d'autre part à l'émergence, après la Seconde Guerre mondiale, d'écrivains authentiques, ainsi Theodore Sturgeon et Ray Bradbury entre maints autres. La prééminence, pour ne pas dire la domination, de la Science-Fiction américaine sur le reste du monde est dès lors assurée. C'est de cette façon indirecte que je rejoindrai la thèse de Simon Bréan sur le rôle de Gernsback. Une autre révolution consistera dans le remplacement des revues comme débouchés par les livres de poche, puis, très tardivement, par les grands formats respectables.
Comparativement à presque tous ceux qui l'ont précédé, le mérite du livre de Colson et Ruaud est précisément de considérer l'espèce dans le temps long et dans ses extensions hors de la littérature en même temps que dans son relatif universalisme géographique.
Puisqu'ils présentent, non sans raisons, la Science-Fiction comme un symptôme voire un mode de la modernité, ils prennent en compte ses relations avec les évolutions politiques, économiques, sociales et technologiques, en particulier aux États-Unis, ce qui a trop rarement été proposé. Ils débordent le cadre habituel de l'Europe et des États-Unis pour l'étendre à celui de la mondialisation, ou tout au moins du Japon. Enfin, ce qui est également trop peu commun, ils étendent leur réflexion à l'illustration, au cinéma et à l'audiovisuel en faisant une place particulière aux mangas. Non sans malice, sur ces derniers points, je me permettrai de leur faire remarquer que l'écrit a presque partout gardé de l'avance. La plupart des illustrations et pratiquement tous les films et toutes les séries renvoient à des thèmes (et parfois des clichés) que la littérature de Science-Fiction a explorés des décennies plus tôt. Dessinateurs, scénaristes et réalisateurs sont aussi des lecteurs attentifs. Pour l'instant, l'écrit conserve son primat.
Sur le terrain socio-économique, la seule lacune que je leur reprocherai tient à leur oubli de la concentration prodigieuse des fortunes qui s'est opérée entre les années 1970 et notre présent, sans équivalent depuis le xixe siècle. Manifeste d'abord dans le monde dit capitaliste, elle a été aggravée par l'apparition des oligarques russes sitôt après la chute du communisme, puis chinois sans même cette circonstance pour l'instant, et dans le cadre de la globalisation qui a eu d'autres conséquences sur lesquelles je vais revenir. Or elle a été très bien perçue par nombre d'auteurs anglo-saxons de Science-Fiction, à commencer par Philip K. Dick et Frank Herbert qui ont bien vu en quoi elle menaçait le principe démocratique, la notion même de république, et pouvait introduire à une société néo-féodale.
Plus surprenante est l'omission de toute allusion au déclin et aujourd'hui à la presque disparition du lectorat de Science-Fiction et par extension à la réduction de la production intéressante et cela, aussi bien aux États-Unis qu'en France, avec une légère exception pour la Grande-Bretagne. D'après différents critères, on peut estimer que cette désaffection a commencé vers le milieu des années 1990 et qu'elle a conduit à diviser sur deux décennies par dix, voire par vingt, c'est-à-dire amener à presque rien, le lectorat de la Science-Fiction de qualité. Pendant un temps, la Science-Fiction a fait jeu à peu près égal avec la Fantasy, elle-même détrônée par le supernatural ou la paranormal romance.
Les explications courantes proposées de cette évolution ne sont guère recevables. Elle serait ainsi due au fait que vivant dans un monde de Science-Fiction (sans doute avec les écrans plats et les smartphones !), le public n'aurait plus besoin d'en lire. Mais la situation était-elle différente dans les années 1950, à la fin des années 1980, sans même remonter plus haut, avec l'explosion de la technologie, les explorations lunaires et celles, par des sondes, de tout le système solaire, et de découvertes scientifiques aussi sidérantes que l'accélération de l'univers ? Une autre rationalisation veut que le sense of wonder soit passé massivement du côté de l'image et donc du cinéma et de la télévision, au détriment de l'écrit. Mais l'examen approfondi du programme de toutes les chaînes d'hier indiquait que seize d'entre elles proposaient des séries et des films policiers alors que deux seulement faisaient un peu de place à la SF et encore, dans un cas, l'attribution était douteuse. Dans ces conditions, les romans policiers auraient dû disparaître des librairies alors que celles-ci en regorgent. Certes quelques films de pure Science-Fiction ont connu ces dix dernières années un succès du reste variable. Mais on les compte sur les doigts d'une seule main, et la proportion en est négligeable dans l'ensemble des productions. D'autres encore estiment que le domaine a épuisé ses sujets. Mais c'est une antienne que j'entends rabâcher depuis les années 1960 pour le moins.
Mon hypothèse personnelle, qui ne se veut que partielle, est socio-économique. D'abord, l'espèce Science-Fiction n'a jamais connu qu'un public minoritaire même s'il fut important. Ce public, très majoritairement masculin, était composé pour l'essentiel de techniciens et de scientifiques qui avaient dû à leur formation une ascension sociale significative après la Seconde Guerre mondiale. Il était donc concerné, voire passionné, par les représentations de l'avenir, inquiétantes ou idylliques. La mondialisation a brusquement freiné puis pratiquement arrêté cette ascension à partir du début des années 1990. Un ingénieur ou un technicien indien, puis chinois, revenait, et revient toujours, dix fois moins cher, à qualité équivalente, que son homologue occidental. La modernité pratique, en termes de revenus, a changé de camp et donc de frontière. C'est du côté de la Chine, et peut-être de l'Inde, qu'il convient de voir s'il se passe quelque chose en matière de Science-Fiction. Nos scientifiques et techniciens ont perdu confiance dans le grandiose avenir. Lorsque la mondialisation sera achevée, que les revenus se seront équilibrés d'un continent à l'autre, d'ici peut-être un quart de siècle, alors les grands vents de l'avenir spéculatif recommenceront peut-être à souffler de notre côté de la planète. Plus généralement, la mondialisation a suscité, dans les plus vieilles sociétés développées, une crainte de l'avenir et un repli frileux sur des formes mythiques du passé ou sur les dérivés de superstitions qu'on croyait disparues.
Quoi qu'il en soit, et en espérant que la frontière que décrivent et analysent André-François Ruaud et Raphaël Colson demeure plus ouverte sur nos longitudes que je ne le redoute, je ne peux que recommander la lecture de leur livre mis à jour, pour sa triple ouverture, finalement rare, aux influences socio-économiques et politiques, à des productions lointaines, et à des formes débordant l'écrit, graphiques et audiovisuelles, bien au-delà des pures théories littéraires certes pertinentes mais risquant l'enfermement. Ce qu'ils soulignent, c'est que la Science-Fiction s'inscrit dans une histoire qui n'est pas seulement la sienne mais aussi celles de la société et des technosciences, et que ces histoires peuvent substantiellement différer dans des sociétés, voire des civilisations, différentes. Cette prise de conscience est évidemment extensible à d'autres domaines de la littérature. Cela peut sembler une banalité de le dire mais cette banalité est trop souvent négligée.
Pour paraphraser Nelson Goodman, philosophe américain de l'esthétique, qui parlait, lui, de l'art, la question n'est pas « qu'est-ce que la Science-Fiction ? » mais « quand y a-t-il Science-Fiction ? ».
- l'Âge d'homme, 1972.↑
- Parmi les plus récents et les plus remarquables de ces derniers, citons Fictions philosophiques et Science-Fiction de Guy Lardreau (Actes Sud, 1988) ; D'Asimov à Tolkien : cycles et séries dans la littérature de genre d'Anne Besson (CNRS, 2004) ; la Science-Fiction : lecture et poétique d'un genre littéraire d'Irène Langlet (Armand Colin, 2006) ; Ces Français qui ont écrit demain : Utopie, Anticipation et Science-Fiction au xxe siècle de Natacha Vas-Deyres (Honoré Champion, 2012) ; la Science-Fiction en France : théorie et histoire d'une littérature de Simon Bréan (PUPS, 2012) ; la Littérature d'imagination scientifique de Daniel Fondanèche (Rodopi, 2012). Abordant la Science-Fiction sous l'angle philosophique, de la théorie littéraire ou de sa propre histoire, ils ne font pas double emploi avec le présent ouvrage.↑
- Robert Laffont › Ailleurs et demain › Essais, 1979.↑
- Manquant dans le texte, probablement à la suite d'une erreur.↑
- Op. cit., pages 280 et 281. Il mérite d'être lu intégralement.↑
- Voir à ce sujet Irène Langlet, op. cit.↑
- Généalogies philosophique, politique et imaginaire de la technoscience (Vrin, 2013). Gilbert Hottois y fait une grande place à la Science-Fiction. Il fait du reste écho, là-dessus, peut-être à son insu, à l'emploi du même terme "mur" par Guy Lardreau (op. cit.) pour évoquer le clivage irrémédiable entre réalité et Réel.↑
- Sauf erreur, c'est Lukács György qui a introduit le terme.↑
- Le cas du Fantastique classique, avec surnaturel, fantômes et pouvoirs irrationnels, est ici délicat. Certainement pas mimétique, est-il analogique, et à quoi ? Pour qu'il manifeste une certaine efficacité, il faut que ses lecteurs conservent au moins un résidu de croyance religieuse ou en des pouvoirs surnaturels, à défaut de quoi il devient simplement insensé. Même le portrait de Dorian Gray n'est pas de même nature qu'une machine à voyager dans le temps. Le Fantastique n'est pas analogique à la réalité commune mais il l'est au moins à une croyance répandue qui ne se soutient d'aucune explication.↑
- Op. cit. Voir les pages 31 et 32 notamment.↑
- « Science wonder stories satisfait ce goût de la fiction scientifique et le satisfait mieux qu'aucune autre revue. J'ai lancé le mouvement de la Science-Fiction en Amérique en 1908 dans mon premier magazine, Modern electrics. À cette époque, c'était une tentative. Les auteurs de Science-Fiction étaient rares. Il n'y en avait dans le monde entier même pas une douzaine qui méritaient d'être cités. » Là dessus, Gernsback exagère quelque peu. D'abord, il n'est pas le premier à introduire l'espèce littéraire aux États-Unis. Ensuite, entre la Grande-Bretagne, la France et l'Amérique, on peut aisément dénombrer quelques dizaines d'auteurs notables avant 1908.↑
- Op. cit.↑
- Op. cit.↑
- Dans les Primaires de février à juin 1938. Rédité sous forme de livre par les éditions Ex nihilo en 2008.↑
- Sur l'origine et l'histoire du terme, voir Georges Hottois, op. cit.↑
- On en trouvera d'innombrables références dans le monumental (le problème, c'est déjà de le soulever) ouvrage de Jean-Pierre Andrevon, 100 ans et plus de cinéma fantastique et de Science-Fiction (Rouge profond, 2013).↑
- On se reportera ici à Sériescopie : guide thématique des séries télé de Pierre Sérisier, Marjolaine Boutet et Joël Bassaget (Ellipses, 2011).↑