Keep Watching the Skies! nº 43, juin 2002
André François Ruaud : Étoiles vives 9
anthologie de Science-Fiction et de Fantastique ~ chroniqué par Sandrine Grenier
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Sommaire cent pour cent féminin pour cet ultime numéro d'Étoiles vives. Té, vé, que du tout bon, ma ninne ! Un vrai régal.
En matière d'amuse-gueules, l'anthologiste nous offre un avant-propos en forme de baroud d'honneur, où il nous explique sans détour pourquoi ce nº 9 est le dernier.
On débute ensuite ce plat de roi avec deux nouvelles d'Elizabeth Hand, "le Roi des aulnes", et "Au mois d'Athyr". J'adore cette autrice. Qu'elle s'illustre dans le Fantastique (pour la première nouvelle) ou la Science-Fiction (pour la seconde), sa plume est toujours rêveuse et poétique, d'une tendresse trompeuse, car sous la douceur se cache toujours la douleur. Les mots s'enchaînent avec fluidité, les images sont belles et évocatrices. Elle possède l'art de mettre en place les situations de façon rapide et efficace, sans jamais être floue ou imprécise, sans rien laisser dans l'ombre. Ses nouvelles font la part belle aux sentiments. Et ça sonne toujours juste.
On enchaîne avec Léa Silhol et son "Xolotl". Et là, surprise. Je m'entends habituellement assez mal avec les écrits de la dame. Non qu'elle manque d'idée, mais son style est… comment dirais-je, un peu too much, “prout-prout” diraient les mauvaises langues. Mais pas cette fois-ci. "Xolotl" est débarrassé de toutes ses fioritures langagières qui alourdissent habituellement ses nouvelles, et va droit au but, précis et efficace. C'est court, un peu trop même, car la fin, limite bâclée, mériterait que l'autrice s'y attarde un peu plus. C'est classique, mais c'est bon.
Ellen Klages prend la suite avec "Filles du voyage", une histoire de voyage dans le temps ultra classique qui ressemble à s'y méprendre au Voyage de Simon Morley, de Jack Finney, mais pimentée d'une belle histoire d'amour lesbien qui, pour une fois, n'est pas tragique. Une fin en forme de pied de nez aux arrivistes de tous poils. On a envie de dire :« Et toc ! C'est bien fait ! ». C'est naïf, mais ça fait du bien.
On poursuit avec "Danse avec les morts" de Marie-Pierre Najman. À mon sens, la nouvelle la moins maîtrisée de cette anthologie : enjeu confus, personnages trop flous pour être intéressants, une fin où la réaction de l'héroïne paraît disproportionnée, car on a du mal à comprendre où l'autrice voulait en venir.
On passe à Sylvie Lainé avec "la Mirotte", ou comment acquérir un ascendant terrible sur son prochain grâce à la technologie, et sans l'avoir cherché ! Le thème est peut-être classique, mais Sylvie Lainé l'explore de façon intéressante. C'est bien ficelé, même si, encore une fois, le récit est bien trop court pour être complètement satisfaisant. Il manque une ou deux pages pour développer la fin, qui laisse dubitatif tant elle donne l'impression que l'autrice s'en est un peu débarrassée.
L'anthologie se termine par "une Autre façon de faire", de Molly Brown. Le glissement du héros vers l'antihéros, un type qu'on prenait au départ pour quelqu'un de bien, et qui s'avère être plutôt minable, est assez réjouissant. Pour le reste, c'est une nouvelle qui entrerait plutôt dans la catégorie fable avec une fin en forme de morale. Mais quelle morale, ça, c'est au lecteur de le déterminer. Et c'est ce que j'aime dans cette nouvelle. Est-ce bien, est-ce mal ? La fin est faite de façon à ce que chacun y voit midi à sa porte.
Voici sept nouvelles qui confirmeront, s'il en est encore besoin, le bon goût d'André-François Ruaud. Et dire que l'animal nous annonce dans l'avant-propos qu'il avait déjà préparé le nº 10, avec un sommaire pré-maquetté !!
Ah misère…