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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 56 Paradis perdu

Keep Watching the Skies! nº 56, janvier 2007

Corinne Guitteaud ; Isabelle Wenta : Paradis perdu (GeMs – 1)

roman de Science-Fiction

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chronique par Philippe Paygnard

Dans un futur proche, les catastrophes annoncées ont bien eu lieu. Trous dans la couche d'ozone et inondations apocalyptiques obligent l'Humanité à se réfugier sous des dômes pour survivre. Une nouvelle société s'organise exploitant la force de travail de clones produits en masse par le consortium martien ProsPectiVe. Ce paradis moderne n'a pas que des adeptes, certains choisissent d'abandonner la protection des dômes pour tenter une vie beaucoup plus rude, mais entièrement libre, à l'extérieur des dômes. Ils y rejoignent ceux que cette société idéale a oubliés sur le bord du chemin du paradis. À ces idéalistes et ces laissés pour compte, se joignent de plus en plus de clones qui, prenant conscience de leur état d'esclaves, préfèrent fuir des maîtres sans cœur. Gaïl, clone modèle G-10100-3 destiné à l'agrément, fait partie de ces fuyards.

Paradis perdu n'étant que le premier volume d'une trilogie à venir, cet épais roman n'est donc, pour l'essentiel, qu'un ouvrage d'exposition où les auteurs, Corinne Guitteaud et Isabelle Wenta, mettent en place le décor et les principaux personnages de l'univers de GeMs. Et, il est certain que ces quelque quatre cent cinquante pages sont à peine suffisantes pour décrire le monde foisonnant qu'elles ont créé. Les dômes, les diverses communautés et les nombreux acteurs de cette aventure née de leur imaginaire apparaissent ainsi au fil des pages pour jouer leur rôle dans ce drame en trois actes. Deux caractères se détachent cependant de cette foule, ceux de Gaïl, jolie clone conçue pour le plaisir qui vient de fuir son maître, et de Gabriel, un monstrueux hybride de tigre et d'humain né des expérimentations militaires de ProsPectiVe. Une Belle et une Bête qui sont à l'évidence les personnages centraux de la saga de Corinne Guitteaud et Isabelle Wenta.

Il serait aisé de critiquer GeMs en constatant, tout simplement, que Corinne Guitteaud et Isabelle Wenta ne font qu'emprunter bon nombre d'idées et de personnages connus de la littérature de l'imaginaire. On retrouve ainsi dans GeMs des clones rebelles qui ressemblent à ceux du célèbre roman les Androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?. Les dômes à l'aspect paradisiaque font forcément penser à ceux de l'Âge de cristal de William F. Nolan et George Clayton Johnson. Mais surtout, la belle clone modèle G-10100-3 et l'expérimental G-807 rappellent irrésistiblement la Belle et la Bête du classique conte de Mme Leprince de Beaumont. Ce serait oublier un peu vite que ces idées ont déjà été reprises par d'autres et que chaque véritable auteur apporte sa touche personnelle aux thèmes les plus classiques du genre. Ainsi, lorsqu'il s'empare de "la Belle et la Bête" afin d'en faire un film, Jean Cocteau y insuffle sa personnalité et sa poésie pour réaliser un long-métrage sur l'amour, bien évidemment, mais aussi sur la mort. Je n'irai certes pas jusqu'à comparer Corinne Guitteaud et Isabelle Wenta à Cocteau, mais les deux auteurs de GeMs apportent leur propre sensibilité à cet amour naissant entre leur Belle et leur Bête. Il leur reste maintenant deux tomes pour faire croître et développer cette belle histoire d'amour au cœur d'une intrigue plus vaste où l'affrontement de multiples factions, dans une guerre sans merci, déterminera l'avenir de l'Humanité de souche ou artificielle.

Une fois passé l'obstacle d'une terminologie spécifique chargée d'acronymes (GeMs, EDo, EDen, etc.), on se laisse prendre par l'univers cohérent et homogène développé par Corinne Guitteaud et Isabelle Wenta. L'action progresse rapidement, simplement entrecoupée de flash-backs qui permettent de mieux appréhender les secrets de ce monde, et on ne peut qu'attendre, avec une impatience certaine, la suite de cette saga d'anticipation.