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Vous êtes ici : Quarante-Deux KWS Sommaire du nº 51 Emporium

Keep Watching the Skies! nº 51, septembre 2005

Adam Johnson : Emporium

(Emporium)

nouvelles de Science-Fiction et de littérature générale

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chronique par Éric Vial

La couverture peut être un avertissement : en principe, une photographie de paysage, tout ce qu'il y a de plus réaliste, ne renvoie guère à la Science-Fiction, mais il s'agit ici d'une batterie de radiotélescopes sur fond de ciel, et basculés de quatre-vingt-dix degrés. On est entre le presque familier et l'étrange. Et sur les neuf nouvelles du recueil, deux au moins ne peuvent être que de la S.-F. Anticipation à court terme pour la première, dont le narrateur est un adolescent employé comme tireur d'élite par la police pour des liquidations qui ne sont pas tout à fait celles avouées aujourd'hui, dans un monde où les otages peuvent être des données informatiques. Et il est beaucoup question de ses relations avec le robot-négociateur de son équipe. Pour l'autre, c'est de l'Histoire secrète, ou de l'uchronie, mâtinée de farce, avec des scientifiques des années 1960 lancés dans la mise au point d'un rayon de la mort et d'un vaisseau pouvant emporter un homme sur la Lune avant, y réussissant mais ne pouvant en aucun cas l'avouer, le tout dans le grand Nord canadien, sous la peu compétente houlette du premier ministre Mulroney, avec une CIA qui est la Canadian Intelligence Agency et d'un MIT à traduire par Manitoba Institute of Technology. Pour faire bonne mesure, on y ajoutera un trappeur francophone assez particulier.

Dans une autre nouvelle, il est question — en principe — des difficultés d'un petit commerce installé dans un quartier qui ne s'est pas développé comme prévu, et confronté à une grande surface (l'Emporium du titre). Mais ils vendent et louent des gilets pare-balles et autres protection de Kevlar (y compris pour des coufins) dans un monde où c'est manifestement de la plus grande utilité. Le reste est sur le fil du rasoir, relevant de ce réalisme qui glisse vers l'insolite, ou de ce présent si présent que la littérature — du moins en France — ne l'évoque généralement pas. On trouve par exemple un ancien policier employé dans un zoo à des rondes de nuit et à la liquidation des animaux excédentaires ou des lièvres envahisseurs, et affrontant la dérive de son tout jeune fils vers la violence. Ce n'est pas ce qu'il y a de plus décalé, de plus étrange ; juste un exemple.

Le reste est à découvrir, tout le reste, sans ségrégation entre réalisme et imaginaire, du fait de l'homogénéité de ton et la récurrence des thèmes (adolescences, rapports avec des parents parfois absents ou disparus, subsidiairement animaux sauvages réduits en captivité ou pris au piège, etc.). Du fait aussi de l'étrangeté du monde réel. Et de l'insistance sur les personnages.

Autant dire que ce premier recueil de nouvelles laisse bien augurer, et au delà, du roman du même auteur, annoncé dans la collection "Lunes d'encre".