Keep Watching the Skies! nº 55, novembre 2006
Édouard Brasey : Du bestaire fantastique (l'Encyclopédie du Merveilleux – 2)
rédactionnel
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Bon. C'est un nalbum de nimages pour les nenfants. Lesquels pourraient être mieux traités, mais passons. Donc, nalbum. D'où des effets de couleur sur le fond glacé des pages pour suggérer un début de commencement d'esquisse d'illusion de papier ancien. D'où une collection d'illustrations disparates, dues à Sandrine Gestin, à Alain-Marc Friez pour les fausses enluminures ouvrant chaque chapitre, et surtout pêchées aux sources les plus diverses, d'anonymes graveurs non crédités à Goya, à Memling, à Poussin, à Zurbaran, à William Blake ou aux tapissiers de la Dame à la Licorne. D'où un invraisemblable bric-à-brac, qui pourrait d'ailleurs ne pas être déplaisant.
Le bric-à-brac se retrouve dans le sommaire. Qui se veut zoologique. D'abord « dragons et serpents », puis « monstres marins et horreurs lacustres », avant « loups, chiens de l'enfer et bêtes pharamines », « animaux sacrés et sorciers » et « montures fantastiques » pour finir par « chimères et autres oiseaux fabuleux ». Avec des encadrés qui semblent mis un peu au hasard, là ou ailleurs, parce qu'il faut bien les caser quelque part, ce qui fait retrouver par exemple des « océanides, néréides, tritons » au chapitre des « animaux sacrés et sorciers » parce qu'on y a fait entrer toutes les « créatures mi-humaines mi-animales de la mythologie gréco-romaine ». Et à l'intérieur de ces catégories se mêlent des articles sur des êtres relevant aussi bien des traditions populaires anciennes et modernes (des dragons au lapin de Pâques), que de la cryptozoologie (Nessie, le Yeti), des diverses mythologies (veau d'or biblique compris), des animaux réels auxquels on prête divers pouvoirs (y compris la petite souris préposée aux dents de lait), des créations purement littéraires ou cinématographiques (de l'Ysengrin du Roman de Renart à la créature du lac noir en passant par la Vouivre de Marcel Aymé). Un peu d'Histoire, un peu de mythographie, beaucoup de recopiage, peu de cohérence, un petit-bonheur-la-chance qui, manque de chance, laisse peu de place au bonheur.
Le pire est qu'on pourrait s'attendre à quelque chose de fleuri, de précis ou d'arborescent, de docte à la manière du xixe siècle, ou mieux, de faussement érudit et de vraiment drôle. Ne serait-ce que par la faute du sous-titre complet qui s'étale sur la couverture et proclame que ce bestiaire fantastique est « composé de dragons, licornes, phénix, griffons, serres, caucatrix, basilics, hydres, salamandres, serpents de mer, malebestes, bêtes pharamines et autres animaux issus de la faune surnaturelle et des anciens traités de cryptozoologie ; de leurs origines fabuleuses, leur apparence, leur signification symbolique, leurs vertus et leurs vices… des différents moyens de les observer, de les apprivoiser ou de s'en préserver ». Or même si ces éléments peuvent être présents, ici ou là, c'est de façon si épisodique, si incohérente, qu'on est déçu. Certes, il doit être possible, pour ce sous-titre à rallonges, de plaider le clin d'œil, le roulement de tambour implicite, la voix de stentor pour fêtes foraines promettant monts et merveilles à l'entrée d'une baraque non moins foraine et que tous savent miteuse. Mais le prière d'insérer concocté par le service de presse est tout aussi généreux, sans cette possible distanciation, et affirme que le volume « rassemble toutes les sources de l'imaginaire et de l'Histoire pour brosser le portrait de chacune de ces espèces, évoquer les ressemblances ou les différences d'une créature à travers toutes ses incarnations », etc., ce qui semble renvoyer à une prétention d'exhaustivité de toute façon probablement impossible à atteindre, mais aux antipodes du bricolage à l'agrafeuse dont l'on est en réalité gratifié.
Bref, on barbote dans le foutage de gueule. Et sans doute dans la prétention. Et c'est dommage, parce que l'idée était intéressante.
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