Guillaume Lebeau : Cold Gotha (Club Van Helsing – 1)

L'assassinat d'une actrice porno oblige le professeur Hugo Van Helsing à quitter sa forteresse londonienne pour se rendre aux États-Unis. Le chasseur de monstres qu'il est, depuis que son glorieux aïeul a croisé la route du prince de la nuit et du seigneur des vampires, Dracula, sait pourtant qu'il ne peut s'agir que d'un piège mortel. Un piège qu'il est prêt à affronter afin de démasquer l'assassin de Winona Seward, une jeune femme qu'il ne connaissait que très peu, mais dont la famille et celle du professeur Van Helsing entretiennent des relations depuis fort longtemps.

Au premier abord, ce Cold Gotha ressemble à un joyeux mélange de genres totalement maîtrisé par Guillaume Lebeau. S'inspirant ainsi de l'œuvre de Bram Stoker, le romancier donne une nouvelle jeunesse au classique affrontement entre le chasseur de vampires et son immortel adversaire. Ce n'est certes pas la première fois que l'on donne un héritier au personnage imaginé par Stoker, mais le Hugo Van Helsing proposé par Guillaume Lebeau dispose d'atouts incomparables pour terrasser bon nombre des héritiers présomptifs du professeur Abraham Van Helsing1.

Par ailleurs, la citation régulière de grandes marques, la multitude de détails techniques et une certaine sexualité débridée ne sont pas sans rappeler une certaine littérature d'Espionnage popularisée par Gérard de Villiers et dont son altesse sérénissime Malko Linge fut le très élégant et très efficace porte-drapeau.

Autre élément de ce sympathique mélange, il y a ces clins d'œil tout à fait volontaires à la série télévisée 24 h chrono. Ils sont présents à travers les titres horodatés de chacun des chapitres, ainsi que dans la retranscription, assez ingénieuse sur papier, de l'un de ses gimmicks, l'écran splitté, en tête de certains chapitres. Enfin, il y a bien évidemment la date choisie pour débuter l'action de ce roman, un certain 10 septembre 2001, à 9 h 37.

Ultime ingrédient de ce joyeux mélange, le titre de ce premier volume du Club Van Helsing renvoie irrésistiblement à la Petite écuyère a cafté de Jean-Bernard Pouy et aux jeux de mots savamment recherchés qui se trouvaient en couverture des nombreuses et — presque toujours — excellentes aventures du Poulpe2 publiées, elles aussi, par Baleine.

Au vu de tous ces éléments, il est impossible de lire Cold Gotha au premier degré. Le jeu des références et des clins d'œil impose une lecture au second, voire au troisième degré. Bourré d'action, ce court roman peut fort bien se lire d'une traite, mais une seconde lecture s'impose pour ne rien manquer de ce récit foisonnant. Premier ouvrage d'une série dirigée par Guillaume Lebeau et Xavier Mauméjean et ouverte à d'autres auteurs3, Cold Gotha n'est pas forcément le modèle standard des œuvres à venir, mais il présente l'univers, les personnages et donne une bonne idée du ton que les directeurs veulent pour leur collection.

Délirant, décalé et on ne peut plus addictif, Cold Gotha se dévore et donne une sauvage envie de découvrir ce que les futurs scribes du “Club Van Helsing” vont faire des héros et concepts de la série. On ne peut que souhaiter une longue vie à cette collection fantastique placée sous le double parrainage du Polar et de la S.-F. à travers ses deux directeurs.