Keep Watching the Skies! nº 60, juillet 2008
Catherine Dufour : Délires d'Orphée (Club Van Helsing – 5)
roman fantastique
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Leader incontesté du Club Van Helsing, le professeur Hugo Van Helsing confie à l'un de ses chasseurs de monstres la délicate mission de retrouver un objet précieux qui a été dérobé au cœur du Bedlam Asylum, sa forteresse londonienne. L'heureux élu n'est autre que Senoufo Amchis, dernier Grand Maître de la Confrérie des tueurs de cachalots des Açores, qui préférerait et de beaucoup être à la barre de son bateau.
Après les vampires de Cold Gotha (de Guillaume Lebeau), les loups-garous de Mastication (de Jean-Luc Bizien), les golems de Tous ne sont pas des monstres (de Maud Tabachnik), les tueurs en série et autres monstres de Question de mort (de Johan Heliot), ce nouveau dossier issu des archives du Club Van Helsing nous entraîne sur les traces d'une créature dont les origines remontent à la mythologie. Cette mystérieuse entité a le pouvoir de conduire ses victimes au désespoir le plus absolu, ne leur laissant qu'une unique porte de sortie : la mort. C'est ce monstre millénaire que Senoufo Amchis va devoir identifier, traquer et vaincre pour mener à bien la mission que lui a confiée le maître du Club Van Helsing.
Passée maître dans l'art du détournement des légendes et des contes de fées, il suffit de lire ne serait-ce que la quatrième de couverture de Blanche Neige et les lance-missiles (2001) pour en être convaincu, Catherine Dufour joue ici la carte de l'enquête psycho-mythologique avec ces Délires d'Orphée1. Car, bien plus que l'action, c'est la psychologie des personnages qui est mise en valeur dans ce récit, et tout particulièrement celle de Senoufo Amchis2. Ce marin mélancolique et solitaire, que l'on croirait tout droit sorti des pages du Moby Dick d'Herman Melville, semble définitivement perdu à la terre ferme et pressé de retrouver les flots. Mais aussi, celle de la victime du monstre, une certaine Eileen Leier, dont Senoufo dresse peu à peu le portrait en menant une enquête discrète et efficace, avant l'inévitable rencontre finale qui lui permettra d'affronter le monstre. Et, il y a enfin la personnalité tourmentée de Hugo Van Helsing, qui semblait bien plus héroïque dans Cold Gotha, et qui, au-delà d'un caractère manipulateur déjà mis en évidence lors de quelques-unes de ses précédentes apparitions dans la série, semble cacher de lourds secrets, même à ses plus proches et ses plus fidèles compagnons. À cette première strate psychologique, s'ajoute de constantes et érudites références aux mythes et aux légendes de la Grèce antique qui participent pleinement à la résolution de cette enquête largement teintée de nostalgie.
Apportant sa pierre à la construction de cette “première saison” du Club Van Helsing, Catherine Dufour, tout en respectant pleinement les règles du jeu de la collection dirigée par Guillaume Lebeau et Xavier Mauméjean, conserve un style et une personnalité inimitables pour un récit, moins enjoué que Blanche-Neige et les lance-missiles et à peine moins sombre que le Goût de l'immortalité.
→ lire par ailleurs dans KWS [1] [2] [3] [4]
Notes
- Sur son site, Catherine Dufour livre quelques-uns des secrets de fabrication des Délires d'Orphée, à commencer par l'identité du monstre, que je me garderai bien de révéler ici…↑
- Membre à part entière du Club Van Helsing, Senoufo Amchis apparaît dans d'autres volumes de la série, notamment dans Léviatown de Philip Le Roy, mais il lui manque le supplément d'âme que lui insuffle Catherine Dufour tout au long de Délires d'Orphée.↑